Premier guillotiné le 19 juin 1956
Ahmed Zabana, un chahid immortel
«Je suis fier de monter le premier sur l’échafaud», s’exclama le jeune militant, âgé à peine de 30 ans. Malgré son état de santé détérioré, ses blessures par balles à la jambe et au bras gauche, les signes de torture très apparents et les séquelles d’un séjour de plusieurs mois au quartier des condamnés à mort, ses bourreaux se montrèrent inflexibles. Il sera exécuté et quelques minutes auparavant, il lancera un cri prémonitoire : «Je meurs mais l’Algérie vivra». Il est 4h du matin, ce 19 juin 1956, quand Ahmed Zabana s’avança vers la guillotine, dressée dans la cour de la sinistre prison Barberousse. La scène a été reconstituée et immortalisée dans le film «La bataille d’Alger» de l’Italien Gilo Pontecorvo. Ahmed Zabana, surnommé H’mida, un des moudjahidine de la première heure et responsable du FLN-ALN de la zone Ouest d’Oran, a été le premier à être exécuté à la guillotine. Le chahid est devenu le symbole du combat et de la résistance du peuple algérien face à l’occupant français. Á deux reprises le couperet de la terrible machine à tuer tombe mais la lame se coince à quelques centimètres du cou du condamné. La tradition veut que si un condamné n’est pas exécuté à la première tentative, sa peine est commuée en prison à perpétuité. Ce ne fut pas le cas pour Zabana. Une troisième tentative et la guillotine a fini par fonctionner. Condamné à la peine capitale par le tribunal d’Oran, Ahmed Zabana, de son vrai nom Zahana, a été exécuté le 19 juin 1956 à la prison Barberousse, sur les hauteurs d’Alger. Il était le premier à subir cette peine capitale parmi 222 autres condamnés tout le long de la guerre de libération nationale.
Les adieux…..
Une semaine après le déclenchement de la lutte armée, le 8 novembre 1954, à l’issue d’une résistance héroïque, le chahid a été arrêté à Ghar Boudjelida, où il s’était refugié avec une dizaine de moudjahidine. Il est aussitôt transféré et emprisonné à Oran. Le tribunal de la même ville le condamnera à la peine capitale le 21 avril 1955. Toutes les demandes de grâce introduites ont été rejetées.
De sa cellule à la prison de Barberousse, et avant l’heure fatidique, Ahmed Zabana écrit une lettre d’adieu à ses parents. Le message est également adressé au peuple algérien l’invitant à continuer la lutte armée et à résister contre l’occupant français jusqu’à l’indépendance. En voici le texte intégral
Mes chers parents, ma chère mère
Je vous écris sans savoir si cette lettre sera la dernière et cela, Dieu seul le sait. Si je subis un malheur quel qu’il soit, ne désespérez pas de la miséricorde de Dieu car la mort pour la cause de Dieu est une vie qui n’a pas de fin, et la mort pour la patrie n’est qu’un devoir. Vous avez accompli votre devoir puisque vous avez sacrifié l’être le plus cher pour vous. Ne me pleurez pas et soyez fiers de moi. Enfin, recevez les salutations d’un fils et d’un frère qui vous a toujours aimés et que vous avez toujours aimé. Ce sont peut-être là les plus belles salutations que vous recevez de ma part, à toi ma mère et à toi mon père ainsi qu’à Nora, El Houari, Halima, El Habib, Fatma, Kheïra, Salah, Dinya et à toi, mon cher frère Abdelkader ainsi qu’à tous ceux qui partageront votre peine. Allah est Le Plus Grand et Il est seul à être équitable.
Votre fils et frère qui vous aime de tout son cœur.
Hmida. (Le Surnom affectueux d’Ahmed Zabana).