CAP VERS L’HYDROGENE VERT
L’ALGERIE SE LANCE VERS UN AVENIR PROMETTEUR
(*) Ikram-Eddine HAICHOUR
La configuration du monde est entrain de muter au regard du conflit Russo-Ukrainien qui annonce un nouvel ordre économique et géopolitique. Les conséquences négatives au plan alimentaire, énergétique, financier et militaire sont en quête de toucher plus d’un Milliard et demi de personnes dans le monde. C’est une situation qui est au centre des enjeux stratégiques entre les puissants de cette terre pour redessiner un autre Yalta dont les tenants et les aboutissants se reflètent sur le front agricole et gazier.
Le blocage des ports ukrainiens par la flotte russe de la Mer Noire c’est-à-dire paralysant les exportations de céréales et d’engrais pouvant atteindre plus de 70millions de tonnes de blé si la guerre entre les belligérants ne trouve pas d’issue politique. Alors que Moscou accuse les occidentaux d’être à l’origine de cette pénurie. Nous sommes en plein d’un remodelage des relations internationales qui vont régenter ce nouveau partage.
C’est donc dans cette vision que chaque pays essaie de trouver sa place dans ce concert des Nations. C’est de ce monde complexe et évolutif que les pays sont appelés à s’adapter eux différents changements géopolitiques et évaluent les menaces qui peuvent influencer l’avenir de nos générations en matière de ressources énergétique et céréalières.
Les énergies conventionnelles ont jusqu’à aujourd’hui assuré la pérennité et la stabilité de l’économie nationale avec plus de 95 % de ses recettes extérieures et 60 % du budget de l’État. Sauf qu’elles n’en demeurent pas éternelles et leur utilisation devient une importante source de préoccupation environnementale. Ces ressources énergétiques sont limitées et non renouvelables, la raison qui nous pousse à réfléchir et à anticiper le risque d’épuisement et de pénurie exclusivement en ce moment à cause de la croissance démesurée de la demande énergétique que connait le marché international.
De ce fait, les énergies renouvelables se positionnent dans le devant de la scène des meilleurs choix du moment présent pour pallier aux inconvénients de l’utilisation des énergies fossiles, et la dépendance aux énergies non renouvelables qui engendrent beaucoup de pollution et menacent l’écosystème avec le dégagement de gaz à effet de serre et toutes sortes de déchets toxiques pour l’environnement.
Pour l’Algérie le moment est venu de s’orienter vers les énergies propres. Cela est inscrit même dans le cadre de son plan de relance économique, confirmé dans une allocution lue au nom du Président TEBBOUNE par le Premier ministre, M. Aïmene Benabderrahmane, à l’occasion des festivités de célébration du 66e anniversaire de la création de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) et du 51e anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures, qui se sont déroulées à Hassi Messaoud. « Il a indiqué que la place de choix à laquelle l’Algérie aspire dans le processus de transition énergétique dans les prochaines années repose également sur notre capacité à adhérer aux plus efficientes solutions climatiques, à savoir l’hydrogène à utilisation zéro pollution ».
Le Sahara algérien selon les experts représente l’endroit stratégique pour la production de l’hydrogène solaire et offre l’opportunité idéale de se libérer des énergies conventionnelles, longtemps source majeure de revenu en devises pour le pays. Malgré cela, plusieurs questions logiques s’imposent, sa production est-elle sans risques ? Son intermittence ne représente-elle pas une contrainte pour les industries partenaires ? l’Algérie dispose-t-elle de la technologie et le savoir-faire nécessaire ?
L’HYDROGENE VERT UN POTENTIEL ECONOMIQUE PRECIEUX POUR UNE ALGERIE MODERNE
L’Algérie est un vaste pays qui regorge beaucoup de richesses naturelles, favorable pour une transition énergétique optimale, notamment en ce qui concerne les énergies propres générées à base de gisement solaire et éolien. L’hydrogène vert, avec sa notoriété et son expertise dans le domaine de l’industrie des hydrocarbures, dispose d’infrastructures de pointe déjà opérationnelles et de ressources humaines qualifiées prêtes pour un transfert de savoir-faire et capable de piloter le changement. Relever les défis qui s’imposent à la gouvernance du pays restent le point nodal déterminé à diversifier les exportations en dehors des hydrocarbures et permettre une relance économique loin de la rente pétrolière. Elle se projette vers les horizons des pays modernes producteurs et exportateurs de richesses.
Dans ce cadre, l’Algérie à travers son programme de développement des énergies renouvelables, renforcé par son partenariat énergétique Algéro-Allemand, convoite un investissement stratégique dans les technologies de pointe liées aux énergies bas carbone dans l’horizon 2022-2050.
LE SUD ALGERIEN L’ELDORADO H2 NON EXPLOITE
Dans un sud immense, doté d’un des plus beaux et riches déserts au monde, il se trouve une industrie pétrolière et gazière des plus développées, avec un réseau d’acheminement totalement digitalisé de plus de 15000 km reliant l’Afrique à l’Europe, pouvant propulser l’Algérie dans la compétition des pays potentiels dans la production de l’hydrogène vert, une ressource énergétique renouvelable, propre et économique en comparaisant aux ressources fossiles polluantes et épuisables.
Dans cette optique, les objectifs et les politiques en matière d’énergies renouvelables tracés par l’Etat peuvent encourager les investissements et diversifier nos exportations en dehors des hydrocarbures, d’autant plus qu’on possède déjà les infrastructures nécessaires et les moyens de transport adéquats ainsi que la ressource humaine apte pour le transfert du savoir-faire.
Les gazoducs qui exportent le gaz naturel peuvent êtres exploités dans le transport du plus léger des éléments chimiques qui est le H2, considéré comme une source d’énergie propre, inodore, incolore et non toxique, non métallique et insipide. Convoitée par le monde entier, cette ressource qu’on trouve généralement dans l’eau, les hydrocarbures ou dans d’autres molécules plus complexes, ne peut remplacer le pétrole mais permet de générer de l’énergie propre et sans émission des gaz à effet de serre. Depuis longtemps l’environnement est pollué et provoquant la dégradation du système écologique mondial. Selon les attentes de l’AIE, l’efficacité énergétique jouerait le plus grand rôle pour limiter l’augmentation de la température planétaire à 2 °C d’ici à 2050. Ce qui représente une réduction de près de 40 % des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur énergétique et une réduction de 30 % pour les énergies renouvelables.
Tous les ingrédients favorables sont là. La volonté politique, les richesses naturelles et les plateformes industrielles confortent l’Algérie qui parviendra à relever le défi des énergies renouvelables et réaliser une croissance verte, assurant ainsi un avenir énergétique stable et sans danger pour l’environnement.
HYDROGÈNE VERT AU CŒUR DES DÉFIS DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE
À l’horizon 2050, afin d’atteindre les objectifs tracés et dans le cadre d’une transition énergétique et écologique optimales, le remplacement graduel du gaz naturel par des gaz renouvelables et bas carbone tel que le biométhane, le méthane de synthèse et l’hydrogène décarboné sera une option a ne pas négliger. Ainsi cela permettrait à l’Algérie de s’affranchir de l’hégémonie des énergies fossiles en parallèle d’autres énergies renouvelables propres qui créeront un mix énergétique bas carbone.
Cependant, si le développement de l’hydrogène vert bénéficie du soutien des pouvoirs publics, le chemin reste encore long et parsemé de difficultés d’ordres techniques et compétitifs déterminant son coût, tel que le déploiement des électrolyseurs, l’électricité, l’eau douce, le stockage et le transport. L’AIE (2019) considère l’hydrogène renouvelable comme étant trois fois plus coûteux (5,5 euro/kgH2) que celui issu des énergies fossiles (1,5 euro/kgH2).
L’implication de l’acteur historique du secteur des hydrocarbures algériens et la collaboration des start-ups spécialisées dans le domaine des nouvelles technologies énergétiques est nécessaire pour conduire au mieux cette transition, en combinant « expertise et innovation » et devenir d’ici 2050 un pays fournisseur d’hydrogène.
L’HYDROGENE VERT REFERENT STRATEGIQUE DANS LA NEGOCIATION
DIPLOMATIQUE ET LES IMPLICATIONS GEOPOLITIQUES
La course vers la production de l’hydrogène a donné naissance à de nouvelles rivalités technologiques et géoéconomiques entre les divers pays déjà en possession soit, de la technologie spécifique ou bien du savoir-faire et des infrastructures adéquates. Cela inclut les Etats pétroliers tel que l’Algérie qui doit revoir sa stratégie et de s’assurer à être parmi les exportateurs majeurs des énergies durables. Quand la demande du marché international le décidera, cela éviterait ainsi le scénario de crise politique et économique liée à la perte ou la chute des revenus générés par la vente du pétrole et du gaz.
Quant aux pays identifiés comme futurs importateurs, ils sont déjà engagés dans une politique visant à consolider leurs liens avec leurs futurs fournisseurs à travers des conventions bilatérales et de renforcement de relations diplomatiques et commerciales afin de sécuriser leurs futurs échanges stratégiques. Pour sa part L’Agence Internationale pour les Energies Renouvelables IRENA affirme que l’hydrogène vert pourrait perturber le commerce mondial et les relations énergétiques bilatérales en entraînant un repositionnement des États, avec l’émergence de nouveaux exportateurs et utilisateurs d’hydrogène.
Enfin, l’Algérie est devant un carrefour stratégique où l’avenir de son économie et la stabilité de sa politique nationale sont mis en jeu. Tout dépendra de l’engagement de ses acteurs économiques et le choix de ses partenaires. Ainsi le degré d’implication de l’Etat notamment dans la couverture légale par les textes de lois et l’assouplissement des démarches administratives liées aux investissements dans la filière énergétique propre. D’où la réflexion pour une anticipation prenant en compte les changements systémiques qui sont en train d’ébranler l’establishment de ce nouveau monde remodelé.
(*) Ikram eddine HAICHOUR
Licence en Management à HEC Alger ex-INC
Cadre ressource Humaine
MBA en Mangement et Direction des Entreprises.
Bibliographie :
www.s-ge.com
www.ecomnewsmed.com
www.bsi-economics.org
www.iea.org
La 3ème édition de la journée Allégro-Allemande d’énergie « Hydrogène vert, potentiel et perspectives de coopération »
www.un.org
www.algerie-eco.com
www.aps.dz