Conflit Russie / OTAN : le Maroc co-belligérant ?
Alors que la majorité des États africains se sont gardé de toute immixtion dans cette crise, le Maroc semble s’être totalement aligné au clan occidental et aurait décidé d’offrir des chars au régime de Kiev :
https://www.menadefense.net/afnord/le-maroc-offre-ses-chars-a-lukraine/
Certains médias rapportent en outre que des centaines de mercenaires marocains prennent part aux champs de bataille aux côtés des Ukrainiens.
https://strategika51.org/2022/04/27/les-marocains-de-mariupol/
La prétendue neutralité du royaume chérifien dans le conflit ukrainien n’aura certes pas fait long feu. Il n’y a là toutefois rien d’étonnant pour un État qui s’est rangé, pour ne pas dire vassalisé, dès les premières heures de son “indépendance”(*) au camp impérialiste (soutien à l’intervention française au Mali, par exemple : https://www.google.com/amp/s/amp.rfi.fr/fr/afrique/20130126-mali-le-maroc-affirme-son-soutien-politique-intervention-francaise), ni par conséquent rien d’étrange en ce qui concerne son hostilité à l’encontre de la république islamique d’Iran, pourtant située dans un autre continent, à des milliers de kilomètres de ses frontières.
(*)Les guillemets ne doivent pas être interprétés ici comme un signe minoratif ou dépréciatif ; ils ne traduisent rien moins que la réalité de la situation politique du pays, à qui il fut accordé non pas une indépendance totale mais l’interdépendance en vertu des accords de la Celle-Saint-Cloud :
https://www.monde-diplomatique.fr/1956/04/WESTPHAL/21739
Or, cet alignement n’a, semble-t-il, rapporté que peu de fruits au peuple marocain, dont un grand nombre vit sous le seuil de pauvreté (https://eljadidascoop.com/la-banque-mondiale-dresse-un-rapport-choquant-sur-la-pauvrete-au-maroc/), pas plus que les dividendes escomptés de l’occupation du Sahara Occidental.
Notez, à ce propos, le deux poids deux mesures, les condamnations à géométrie variable des occidentaux qui, loin de blâmer cette invasion, l’ont encouragée et fermé les yeux (voire sans doute participé) sur les bombardements au napalm et phosphore blanc contre les populations Saharaouies (https://www.revue-ballast.fr/sahara-occidental-la-derniere-colonie-du-continent-africain-portfolio/), alors qu’ils se sont empressés de condamner l’intervention russe en Ukraine, combien même celle-ci visait à sauver les populations russophones après, excusez du peu, plus de 8 ans de bombardements par les troupes kieviennes. Mais les vies russes ont, semble-t-il, peu de valeur à leurs yeux. Au passage, celle des Ukrainiens ne vaut pas mieux puisque c’est eux qu’on sacrifie à l’autel de l’hégémonie impérialiste.
Le makhzen croit par ailleurs (se) jouer de ce soutien pour se présenter comme acteur incontournable de la sécurité énergétique européenne. Dans son fantasme expansionniste, il pense ainsi, une fois les rênes énergétiques entre ses mains, être certain de pouvoir exercer des pressions et chantages (immigration), voire des agressions (îles Persil) comme il l’a toujours fait lorsqu’il s’est senti enhardi par je ne sais quelle mirage de puissance.
L’on pourra attribuer tout qualificatif au royaume marocain sauf celui de fiable. S’il a trahi en maintes occasions ses “frères” Palestiniens (en 1967 et aujourd’hui encore en normalisant et concluant une alliance militaire avec l’entité sioniste) que pourront bien attendre les Européens d’un tel allié ?
Quant à son action dans le continent, les Africains pourront apprécier son rôle, notamment dans le Sahel, à la lumière de ces quelques articles :
http://niarela.net/nord-mali/le-maroc-est-lorigine-du-mujao-selon-larmee-francaise
https://algeria-watch.org/?p=42252
Pour ce qui est de l’occupation du Sahara Occidental, celle-ci participe également de la déstabilisation régionale, d’autant que le peuple Sahraoui ne cédera jamais sur ses droits légitimes, et face à l’inaction de la “communauté internationale”, il durcira inéluctablement la lutte pour les faire valoir par la force.
C’est pourquoi la solution d’un Sahara Occidental indépendant est la seule option pérenne permettant le développement et la prospérité des populations de la région dans un environnement de paix durable.
Mais au juste, à qui appartient le Sahara Occidental ? est-il marocain ?
Sur cette question, laissons la parole ou plus précisément la plume au roi du Maroc, Mohamed III ben Abdallah, qui affirmait sans équivoque, dans sa lettre datée du 28 mai 1767, que les territoires correspondants au Sahara Occidental actuel n’étaient pas sous son autorité et par conséquent ne faisaient pas partie de son royaume. Cette lettre faisait suite aux préoccupations du roi d’Espagne, Charles III quant à la sécurité des pêcheurs espagnols au large du Sahara Occidental. Voici la réponse du roi du Maroc :
“… ces arabes (les Sahraouis) n’ont pas de lieu sûr ; ils changent de lieu quand ils veulent. Jamais, ils n’ont été assujettis, ni subordonnés à aucun gouvernement. C’est la raison pour laquelle ce n’est pas normal que je donne mon consentement, étant donné qu’il peut être préjudiciable aux habitants des îles Canaries… La côte, depuis Santa Cruz (Cap Ghir) vers le sud n’étant pas de ma juridiction, je ne peux pas la franchir, ni être responsable de ce qui peut y arriver…”
Ce document est consigné en annexe 33B, page 266 des mémoires et plaidoiries de la cour Internationale de Justice relatifs au problème du Sahara Occidental (voir également en annexe 33A la lettre du même roi au même destinataire) :
Or cette fiction du “grand Maroc” (en réalité empire fondé par des tribus mauritaniennes, si ce n’est saharaouies), a entraîné le makhzen dans une voie sans issue et contreproductive qui le mènera à son implosion, car fondée sur une imposture et une injustice flagrante qui le placent, comme son alignement sur le camp impérialistes, du mauvais côté de l’Histoire.