Contribution : COLLECTIVITES LOCALES, ESPACES DE GOUVERNANCE – VOLONTE POLITIQUE DES ELUS
(*) Dr Boudjemâa HAICHOUR
(*) Dr Boudjemâa HAICHOUR
La rentrée sociale coïncide avec la rencontre « Gouvernement/Walis » dont les travaux s’ouvriront ce Samedi 25 Septembre 2021 sous la présidence de Monsieur Abdelmadjid Tebboune Président de la République. A peine le gouvernement ait passé son examen avec succès devant les deux chambres du parlement et l’adoption de son plan d’action, qu’il s’empresse à mettre en œuvre le programme du Président, face aux attentes des citoyens.
Le Président Abdelmadjid Tebboune est considéré comme un haut commis de l’Etat qui a mis plus de cinquante années d’expérience dans la gestion des collectivités locales. Son expertise est une des références des plus précieuses et enrichissantes pour tirer les enseignements de ce qui est de la gouvernance locale. Aujourd’hui en tant que Président de la République, il plaidera de cette Algérie nouvelle qui amorce une mutation systémique en opérant une rupture doctrinale à même d’ériger une nouvelle politique de décentralisation et d’évaluation par les résultats.
LES SILLONS DE L’ALGERIE NOUVELLE OU LES MOISSONS DE L’ESPERANCE
En effet les espaces de gouvernance ne peuvent exister sans la volonté des élus locaux pour mettre en place une réelle collaboration avec la société civile et les habitants.
Ainsi lorsque la décentralisation sera rendue opérationnelle, la gouvernance locale moins fragilisée, la gestion du territoire et de ses ressources aboutiront à la construction d’un véritable vivre-ensemble. L’enjeu est donc de construire des dispositifs de gouvernance locale en prenant en considération l’expertise et les spécificités de chaque région du territoire.
Ceci pourrait faciliter la construction des relations citoyennes autour de projets partagés à l’échelle inter-territorialité. Les possibilités de travailler sur des enjeux communs en s’échangeant leurs expériences multiples, permettront des partenariats plus équilibrés et plus originaux entre territoires des différentes wilayas et même au niveau communal.
LES MEMES CHANCES DE LA PERIPHERIE ET DES CENTRES URBAINS
L’élaboration des projets dans un contexte de gouvernance locale est soumise à des opérations complexes qui varient selon les contextes écologiques, socio-économiques et politiques. Du fait de la poussée démographique, les terres agraires dont la majorité ne sont que des petites exploitations associées à une grande pauvreté rurale créant des zones d’ombre à la périphérie des centres urbains. Ce qui rend de plus en plus difficile la survie des populations rurales à partir de leurs revenus agricoles.
Le défrichement des terres marginales se fait par les migrations temporaires de la force de travail, par l’appauvrissement, par la dénutrition, par l’usure et par l’exode rural définitif. Ces populations sont devenues vulnérables et renforcent le « rurbanisme » des grandes villes. La dégradation des terres et des eaux peut menacer la survie à long terme des générations futures. Ceci interpelle dramatiquement notre sécurité alimentaire dont on ressent déjà les effets de cette dépendance structurelle agro-alimentaire vis-à-vis du marché céréalier mondial. Le changement climatique perturbe déjà notre mieux-être.
COMBAT DE LA DESERTIFICATION ET EMERGENCE D’UNE REVOLUTION VERTE
Le combat contre la désertification et la dégradation des terres se pose avec un engagement tel qu’avait réalisé les jeunes du service national du temps de feu Président Houari Boumediene laissant une référence du barrage vert d’une révolution verte. C’est à partir de ces immensités, terroir des communautés rurales ou nomades que progressent les aires pastorales et les terres de parcours pour l’élevage du cheptel.
Le désert occupe 85% de notre pays sur 2.381.714 km2 dont seul 3% de terres cultivables. Le Sahara dans notre Sud est l’un des plus grands déserts du monde avec 2millions de km2. La population résidente totale en Algérie est de 43,9 millions d’habitants au 1er Janvier 2020 avec 54% de la population de moins de 30 ans et une espérance de vie moyenne de 77ans.
L’Algérie enregistre un taux d’urbanisation de 72% et un parc de logements de dix millions pour un TOL de 4,4. Les 1541 PDAU couvrent l’ensemble de nos communes sauf 2%. Quant au taux de raccordement aux services de base soit 100% pour l’AEP de 91% pour l’assainissement, 99% pour l’électricité et 65% pour le gaz dans les 58 Wilayas et 1541 communes.
Avec ses 1600km de côtes, l’Algérie est ouverte à la Méditerranée. Le tourisme balnéaire, de montagne, du Sahara, de culte, thermale peut accueillir de nombreux touristes avec les hôtels de niveau international qui ont été réalisés ces dernières années. Les élections locales des APC et APW vont connaître des élus de toutes sensibilités.
LOIN DES INJONCTIONS UNE GESTION SAINE DE LA GOUVERNANCE URBAINE
En matière de gouvernance urbaine c’est-à-dire la gestion des grandes villes et communes, on constate que les plans de développement sont assez souvent les résultats des injonctions entre les institutions de l’Etat et des élus, pour des raisons de contrôle politique et des contradictions entre les textes qui légifèrent et les réalités du terrain. Ces pratiques urbaines sont à l’origine de contestations sociales et parfois politiques.
La réflexion porte non seulement sur les modes les plus efficaces et efficients du management de la société, mais surtout l’exercice du pouvoir et de la légitimité de ceux qui sont associés au processus de décision. Nous remarquons véritablement une crise de citoyenneté générée par une certaine fragmentation des groupes sociaux dans la spatialité de la ville.
LA SPATIALITE DE LA VILLE ET L’EXERCICE DU POUVOIR LOCAL
« Les discours politiques apparaissent peu convaincants et les citoyens se sentent peu écoutés et peu associés aux décisions qui les concernent ». Les villes sont devenues des lieux de concentration de la population et des richesses. L’autorité du Wali est plus importante que celle du ministre ou même de l’autorité présidentielle.
L’une des préoccupations et les enjeux de gouvernance urbaine pour les pouvoirs publics est de parvenir à la reconstruction de la cohésion sociale. L’enjeu est social mais aussi économique. L’adaptation des modes de régulation de l’action publique aux mutations actuelles est un des grands chantiers à venir.
UNE APPROCHE INTEGREE SELON LA FORMULE GOUVERNER C’EST PREVOIR
En évoquant ce combat en tant que défi lancé à l’espace et au temps, on mettra en avant la nécessité d’une vision du futur et d’une approche globale et intégrée. Les incendies qui ont ravagé le couvert végétal de nos forêts et leur importance pour l’écosystème, donnent à penser qu’il n’y a pas de préoccupation de regénération ou de replantation de notre patrimoine forestier qui s’est dégradé fortement. Les dispositifs de gouvernance locale doivent impliquer les responsables à plus d’anticipation pour prévenir car « Gouverner c’est prévoir ». Une bonne gouvernance locale doit contribuer à réduire et éliminer les inégalités.
C’est aux médiateurs territoriaux aussi qu’il incombe de mobiliser et motiver les participants et apprendre à connaître les hiérarchies sociales, les inégalités entre les groupes et les vulnérabilités comme le travail effectué dans les zones d’ombre. Selon le Rapport national sur la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes-Algérie 2021 pour l’Agenda 2030, en termes de pauvreté monétaire, la proportion vivant au-dessous du seuil national de pauvreté s’est établi à 5,5% de l’ensemble de la population soit deux millions de personnes environ.
Il convient de signaler que ce taux de pauvreté a été considérablement réduit passant de 22.6% en 1995 à 5.5% en 2011. Le revenu par habitant s’élève à 4.306 dollars US en 2019. Il faut dire que le prix du baril de pétrole est passé de 109$ en 2013 à 64$ en 2019 atteignant son plus bas niveau de 41$ en 2016 qui a affecté la croissance économique qui est passée de 3,8% à 0,8% au cours de la même période.
LA CRISE SANITAIRE DU COVID-19 A IMPACTE TOUTES LES ECONOMIES
A ceci s’ajoute la crise sanitaire du Covid-19 qui a déstabilisé toutes les économies du monde au cours de ces deux dernières années. La croissance du PIB a également fléchi à moins 1,1% à la fin de 2019. Le pays a enregistré un déficit du courant de la balance de paiement de moins 25 Milliards de dollars fin 2019. Ce qui poussé le gouvernement à procéder des ajustements budgétaires dans les dépenses de l’Etat à ce jour.
Ces quelques chiffres pris de ce rapport national a imposé une austérité tout en préservant le rôle social de l’Etat en direction de la population la plus démunie. Il est prévue une nouvelle politique de proximité pour l’intégration de l’approche participative dans les programmes de développement local.
L’EAU AU CENTRE DES PREOCCUPATIONS MAJEURES DES MENAGES
Les pouvoirs publics doivent être plus communicatifs en prenant par exemple nos potentialités hydriques annuelles de l’Algérie qui sont de l’ordre de 23,2 Milliards mètres cubes, 10,2Mds m3 en écoulement de surface et 13 Mds m3 en eau souterraine, auxquels s’ajoute 0,76 Mds de m3 en eau dessalée (capacité installée).
Alors que le taux de raccordement national des ménages aux réseaux d’alimentation en eau potable a atteint 100% en milieu urbain. Le citoyen n’arrive pas à comprendre cette crise de l’eau. Les canalisations sont-elles usées ou alors c’est un problème de gestion ? Comment pouvoir endiguer la baisse de nos ressources, causée, par la chute du baril et contenir les dépenses pour assurer un degré satisfaisant de la qualité du service public et maintenir une trajectoire de croissance qui préserve un niveau d’activité économique durable tout en préservant les acquis sociaux-économiques de la population ?
VERS DES REFORMES FISCALES ET LUTTE CONTRE L’EVASION
Les pouvoirs publics sont devant un dilemme où l’amélioration du rendement fiscal à travers un élargissement de l’assiette fiscale chez certaines entreprises qui font l’évasion fiscale une aubaine d’une richesse mal acquise. La réforme de l’administration douanière doit assurer des missions de protection de l’économie nationale notamment contre le blanchiment de l’argent sale et de toute contrebande. L’endettement lorsqu’il est excessif peut entraver les efforts de développement.
UNE JUSTICE EQUITABLE QUI VEILLERA A LA MORALISATION PUBLIQUE
Le Président Tebboune dira que cette rencontre est une opportunité d’évaluation, de redressement et de prospective. Car la réalisation d’un développement territorial équilibré figure parmi les principaux défis de cette rencontre. En effet la gestion des crises que nous avons vécus ces derniers moments telles les incendies, le stress hydrique et la Covid-19, nécessiterait la mise en place de nouvelles méthodes de prévention, de coordination et de prévention.
Ce qui demandera une refonte des modes de gestion des services publics locaux du quartier à la commune. Mais si le pouvoir est conçu par d’autres comme source de tous les privilèges, ce dernier se déclinera sans nul doute en népotisme, clientélisme et affairisme. Avec la recomposition du monde actuel, la pédagogie de la démocratie se réalise quand l’Etat de droit et la démocratie seront à l’évidence complémentaires.
Comment pouvoir moderniser le fonctionnement des institutions de gouvernance locale quand le législateur n’a pas mis au débat le statut de la fonction de wali en tant que représentant du Gouvernement. Si on serait ramenés encore à amender les codes l’APC et de la Wilaya, il faut délimiter les prérogatives lorsque l’intention est d’œuvrer pour donner plus de pouvoir, de moyens et de responsabilités aux collectivités territoriales.
C’est cette relation entre élus et le représentant de l’administration qu’il faut davantage clarifiée. Cette approche participative pourrait valoriser la gouvernance locale. Les citoyens se remettent à leurs élus et l’Etat sortira indemne de cette situation de responsabilité locale. L’Etat domine le pouvoir exécutif mais aussi les dispositions réglementaires.
Contrairement aux élections présidentielles et législatives, les élections locales sont à la proximité du quotidien du citoyen. C’est un espace privilégié de préserver l’administration locale de toute dérive bureaucratique ou autre. L’écho de la politique d’un gouvernement serait plus audible à la base et permet des rapports de bon intelligence avec l’autorité centrale. Sa politique se décline au vu du panier de la ménagère.
C’est le rôle des autorités du ministère du commerce de procéder à des contrôles contre les abus de certains commerçants c’est-a-dire ces spéculateurs qui tentent dans les moments de fête d’augmenter les prix des produits agro-alimentaires et des affaires scolaires.
UNE GOUVERNANCE LOCALE LOIN DES SOUPÇONS DE TOUT GENRE
C’est de cet espace de la gouvernance locale que toutes les convoitises et tentations se profilent dans l’enrichissement et le profit de la rente où nombre d’élus se sont vus poursuivis devant la justice par suite de malversations ou détournements. D’où le choix de candidats qui seront portés à la gestion des APC et APW, considérées le centre d’où émanent des pratiques douteuses très proches du citoyen Lambda.
Tout se sait rien ne se cache. Les employés du fisc doivent également jouer leur rôle dans la détermination des grosses fortunes sans en payer les taxes et impôts y afférents.
L’ALGERIE UN ETAT DE DROIT RESPECTUEUX DU BON VOISINAGE
Quant aux soupçons révélés par des lettres anonymes, la justice doit faire ses investigations à travers les services de sécurité, pour sanctionner ceux qui se lancent dans des délations touchant à l’honneur d’un élu ou d’un responsable à quelque niveau que ce soit, afin d’éradiquer ce genre d’atteinte à l’intégrité des citoyens. Ainsi commencera l’application de cette vertu cardinale de notre justice qui veillera à la moralisation de la vie publique.
En cette rentrée sociale qui coïncide avec la rentrée des classes, tout se conjugue dans la réalité du quotidien depuis, le cartable de l’élève et les fournitures scolaires jusqu’aux cantines pour permettre aux élèves surtout dans les régions pauvres des zones d’ombre et même dans les centre des grandes villes d’avoir un repas chaud. Les communes sont là pour vérifier les conditions d’accueil et le transport des enfants à l’école.
Le ministre de l’intérieur a donné des chiffres qui réconfortent les parents d’élèves. C’est cette nouvelle Algérie qui œuvre pour le mieux-être en dépit des contraintes objectives auxquels sont confrontés les responsables à tous les niveaux. Le spectre de la peur a mis en garde ces derniers qui réfléchissent plusieurs fois avant de s’engager dans une action. Le Président Tebboune a rappelé lors de son allocution d’ouverture que l’Etat veille à la protection de ses commis de l’Etat au niveau centrale ou au niveau local, pourvu qu’ils soient loin de tout soupçon.
L’ANP DE PAIX DIGNE DES GRANDES PUISSANCES REGIONALES
Notre pays est fier d’appartenir à ces Nations qui ont payé le lourd tribut de liberté. Fier d’avoir une ANP digne des grandes puissances régionales. Les services de sécurité avec les progrès des TIC et de l’Intelligence Artificielle sont l’œil et les oreilles d’un Etat respectueux du bon voisinage que l’histoire nous rassemble en tant que peuples de ce grand Maghreb de civilisations et de solidarité avec les peuples qui luttent pour leur auto-détermination.
Propulser la nouvelle Algérie dans le concert des communes modernes et hospitalières, c’est ce que le Président Tebboune entend faire et rassembler toutes les volontés dans l’esprit de la réalisation de son programme qu’il a promis de réaliser.
C’est dans cette perspective que ces assises Gouvernement/Walis vont pouvoir déboucher sur des recommandations dont l’objectif est de renforcer la cohésion sociale d’un vivre-ensemble de solidarité, d’entraide et de travail.
Dr Boudjemâa HAICHOUR
Chercheur Universitaire
Parlementaire- Elu local- Ancien Ministre
Ancien membre du Conseil supérieur de la Magistrature