Contribution/ Merci Djamel Belmadi
Par (*) Allaoua Bendif
Djamel Belmadi a courageusement pris le bateau des Verts en pleine tempête, au bord du naufrage d’autant plus fatal que le football national est en quasi faillite organisationnelle, matérielle et morale.
Il a mis fin au lobbying venimeux des résidus de la Issaba. Il a brillamment remporté la CAN en Egypte, terre traditionnelle des intrigues contre le football africain.
Il a établi une série d’invincibilité unique dans l’Histoire du foot continental.
Pour tout cela, Djamel Belmadi a été fait Ministre du bonheur national par le peuple : il le mérite et le restera pour très longtemps dans le cœur de tous les Algériens.
Pour autant, est-il exempt de toute erreur?
Ne s’est-il trompé en rien?
N’est-il perfectible en rien?
Personnellement je ne le crois pas.
Le croire ce n’est pas l’aider: c’est l’aveugler sur certains de ses points faibles car nul n’est parfait. Nous sommes tous perfectibles.
Le principal point faible de Djamel Belmadi c’est sa psychologie.
Les aspects les plus visibles en sont:
– sa nervosité, quelque fois extrême, sur le banc de touche. C’est un signe de fragilité. Un entraîneur énervé perd ses moyens. Sa lucidité est amoindrie.
Il est connu que les émotions fortes inhibent le cortex cérébral qui constitue la base physiologique de notre capacité de réflexion, de nos moyens intellectuels d’analyse et de recherche lucides de solutions.
Par ailleurs, cette nervosité déteint négativement sur les joueurs et les fragilise. Un entraîneur est un leader, c’est la boussole de l’équipe, c’est sa protection et c’est son cerveau. Quand il s’énerve, il perd ses moyens et fragilise ses joueurs et son équipe.
Ce point faible de Belmadi a également abîmé ses relations avec la presse. Nous savons tous la piètre qualité de la plupart de beaucoup de soi-disant journalistes sportifs et cela a participé à l’appauvrissement global de notre football car une presse sportive forte est un partenaire en développement et un vecteur de santé pour pour notre sport national en général.
Cependant, l’entraineur des Verts a une fonction de représentation exemplaire de l’élite du football, de la FAF et même de l’Etat national : il incarne l’image publique des Verts et de l’Algérie. Les diatribes qu’il a eu avec la presse ont impacté son image…et ont atteint son charisme. Plus de patience, plus de distanciation, plus de réserve si ce n’est plus de pédagogie lui sont nécessaires dans la gestion de ses relations publiques et lui donneront plus de charisme et plus de paix pour approfondir les différentes approches de son travail et de sa mission.
– Son émotivité: Djamel Belmadi est un émotif, un affectif. il est profondément humain.
Dans certaines conditions c’est un atout. Dans d’autres c’est un point faible. Quand il a fallu remobiliser les Verts en déroute après le triste passage de Madjer, ce fût un formidable atout.
Quand il a fallu effectuer le renouvellement générationnel pour redonner du potentiel aux Verts, sa proximité émotionnelle et affective avec ses cadres vieillissants est devenue un obstacle aveuglant.
L’équipe nationale a commencé à marquer le pas depuis novembre 2021 et son match nul contre le Burkina en aller et retour…depuis, c’est objectivement la courbe descendante: en optant rapidement pour le changement générationnel, le risque de casser la série victorieuse existait, celui de perdre la CAN aussi, ainsi que celui de rater la qualification en Coupe du Monde…mais on aurait enclenché un nouveau cycle et gagné six mois de travail …les éliminatoires de la prochaine CAN sont dans deux mois et n’avons ni renouvelé l’équipe, ni conservé la CAN, ni conserver notre série d’invincibilité ni commencé ce chantier important de la reconstruction générationnelle de l’EN.
– Djamel Belmadi a beaucoup critiqué le corps arbitral africain, ce qui est compréhensible mais ce faisant, il a directement encouragé ses joueurs à rouspéter inutilement et de façon irritante, à récolter des cartons évitables et à tendre les relations entre les Verts et les principaux arbitres de notre continent.
Enfin cette émotivité et cette trop grande proximité avec ses joueurs de base a incontestablement impacté son Autorité sur eux. Mahrez est transparent depuis dix matches. Ses prestations et sa combativité avec City n’ont plus rien à voir avec son excessive retenue en équipe nationale algérienne de football.
-l’isolement volontaire à la tête de l’EN l’a desservi: il lui est impossible de tout faire par lui-même. Il aurait dû étoffer son staff car l’EN d’Algérie est devenue une institution nationale et continentale, grâce à lui sans aucun doute possible mais une chose est d’arriver au sommet, une autre est de s’y maintenir!
Les Clans et autres lobbies ont finit par envenimer et polluer de façon significative l’environnement de la FAF et celui de l’EN.
Au final, le vieillissement de l’effectif, l’absence de renouvellement générationnel anticipé.
La magouille des «faiseurs de présidents de FAF», les Clans d’analphabètes du foot mais néanmoins journalistes et les «expertillons» de cirque des télé poubelles ont eu raison de lui.
S’il décide rester avec les Verts, il faudra tenir compte de tout cela.
S’il décide de partir, ce qui ne sera pas la fin du monde car c’est l’Algérie qui nous oblige tous et non le contraire. Son successeur doit aussi éviter ces points de faiblesse.
(*) Allaoua Bendif
Fils de Chahid
Docteur en psychologie Clinique
Enseignant universitaire à la retraite.
Auteur de : « Violences Algériennes», Koukou Editions. Octobre 2019