Il est désormais établi que la participation aux échanges commerciaux internationaux impose le respect scrupuleux des normes auxquelles sont soumis les produits et les services. Celui qui fait la norme fait le marché.
Affirmant lors de l’inauguration de la 28e édition de la Foire de la production nationale, que « 2020 sera une année différente pour les opérateurs économiques à la condition de s’engager à élargir leurs activités, à redynamiser l’économie nationale et à créer des postes d’emploi, le Président Abdelmadjid Tebboune a souligné l’impératif d’encourager l’exportation du « produit national ». Tandis que Kamel Rezig, ministre du Commerce, a exhorté les « industriels et les opérateurs économiques sont tenus, à l’avenir, d’affecter une part, entre 20 à 30% du volume de leur production, à l’exportation vers les marchés extérieurs, notamment arabes et africains » soulignant que « son département s’attelle actuellement à «formuler des concepts régissant les activités d’exportation avec l’élaboration d’un plan national pour ce domaine, et ce, en collaboration avec les opérateurs économiques».
Certes, l’Algérie dispose des infrastructures nécessaires, d’une diversification industrielle et agricole qui lui permettront de placer ses produits sur les marchés étrangers mais il n’en demeure pas que le développement des exportations hors hydrocarbures demeure tributaire de la qualité du produit national appelé à se conformer aux normes internationales. Nonobstant les mesures incitatives mises en place par les pouvoirs publics pour encourager les exportations hors hydrocarbures, insuffisantes soient-elles, ces produits répondent-ils aux standards internationaux ? La production nationale respecte-telle les standards internationaux, un préalable indispensable à toute opération d’exportation ? Le refoulement de certaines marchandises exportées prouve, dans une certaine mesure, le contraire. Les raisons sont multiples. Cet incident qui nuit considérablement à l’image de l’Algérie sur les marchés étranger a poussé les pouvoirs publics à prendre de nouvelles dispositions afin que nos produits répondent aux normes exigées par les pays d’importation (UE, Russie, Canada, etc.).
Des normes que la majorité des opérateurs économiques, tous secteurs confondus, sont loin de maitriser. Or pour exporter ses produits sur le marché international, tout producteur exportateur doit se conformer aux normes et réglementations établies dans le but d’assurer la qualité des produits, de protéger l’environnement et la santé humaine. Celles-ci varient en fonction des types de produits ainsi que des pays importateurs et exportateurs. Certaines de ces exigences reposent sur les normes alimentaires internationales, alors que d’autres ont été élaborées au niveau national. Depuis les scandales sur la sécurité des aliments (ex. vache folle) et au regard des récents risques liés au terrorisme à l’échelle internationale, plusieurs gouvernements ont augmenté le niveau de contrôle à toutes les étapes de la filière de production, de transformation et de distribution des aliments dans le but de protéger les consommateurs contre d’éventuelles contaminations biologiques.
La mise en place de systèmes de traçabilité permet de limiter sinon éliminer ces risques de contamination. En effet, ces systèmes sont utilisés pour identifier de manière précise le produit, connaître son origine et son parcours dans la chaîne alimentaire. Ils facilitent également le rappel du produit en cas de contamination. De plus, ces systèmes aident à déterminer l’origine d’un problème relatif à l’hygiène alimentaire, aident à satisfaire aux exigences de réglementations des pays importateurs et aident à satisfaire les attentes des consommateurs en matière d’innocuité et de qualité des produits. Le non-respect des exigences peut entraîner la mise en quarantaine et le plus souvent le refus des produits par les pays importateurs. Les réglementations les plus connues ont trait au calibre, à la catégorie, au poids et à l’étiquette d’emballage.
Malheureusement, « nous n’avons pas une véritable culture normative en Algérie en tant qu’activité d’intérêt général » affirme Djamel Hales, directeur général de l’Institut algérien de normalisation (IANOR). Pourtant « toute entreprise aspirant à correctement cerner les enjeux qui l’entourent, à développer les actions nécessaires face aux risques et opportunités, à mobiliser ses collaborateurs, à satisfaire clients et parties intéressées et, de ce fait, à s’améliorer et être pérenne, a tant de choses à gagner en mettant en place un système de management de la qualité (SMQ) » souligne Mourad Baraka, directeur général de Vinçotte International Algérie. Tandis que Noureddine Boudissa, directeur général d’Algerac, organisme algérien d’accréditation, révèle que « les opérateurs économiques nationaux n’arrivent pas à saisir les enjeux économiques d’une accréditation » qui sont « d’ordre économique et commercial. Ils peuvent être même des enjeux sociaux vu que les domaines sont liés notamment pour ceux aspirant à conquérir le marché extérieur » avant de préciser que « même au niveau national, les donneurs d’ordre exigent dans leurs appels d’offres l’accréditation d’Algerac ».
L’intelligence commerciale
Si l’intelligence économique apparaît comme une matière de haute technicité, qui requiert une démarche permanente et continue au sein de l’entreprise, elle n’est cependant pas le domaine réservé des grandes industries. Ainsi, la politique publique menée actuellement par le nouveau Gouvernement algérien en matière d’exportation hors hydrocarbures, promeut avant tout la sensibilisation de tous les acteurs économiques afin que de simples mesures de précaution élémentaires soient adoptées au sein de chaque entreprise et ce, quels que soient sa taille et ses secteurs d’activités de produits ou de services, pour la réussite de cette stratégie. Et du fait que commerce international est régi par des normes, dont celles de la certification et de la normalisation de tout produit qu’un exportateur envisage de proposer sur des marchés à l’étranger, les opérateurs-exportateurs se doivent d’être au diapason des référentiels normatifs nationaux et internationales. En effet, la normalisation est l’instrument moderne privilégié de protection et de promotion de la production nationale.
C’est aussi le visa obligé à l’exportation. Les pays qui ont réussi à s’insérer dans le processus économique de mondialisation sont ceux qui ont investi dans les normes et développé « une protection intelligente » de leur économie. D’autant plus qu’au niveau des échanges, l’accréditation est désormais reconnue à l’international comme l’un des modes de preuve les plus fiables pour démontrer que les produits échangés respectent les normes de qualité et les exigences sanitaires et phytosanitaires. A ce propos, Noureddine Boudissa, directeur général d’Algerac, relève que « l’accréditation est un moyen de favoriser le commerce international pour des raisons stratégiques, politique et économique » soulignant que « l’accréditation, qui doit être obligatoire, est un facteur déterminant dans la garantie du label qualité exigé par les clients et ce, à travers des organismes en charge de l’évaluation de la conformité ». Paradoxalement, La certification permet sinon de gagner des parts de marché, du moins de ne pas perdre des contrats et rester proche de ses clients, qui verront cette certification comme un gage de confiance. D’autant que l’une des batailles les plus rudes que doit livrer le ministère du Commerce dans ce quinquennat 2020-2024 est l’exportation d’un maximum de produits fabriqués localement vers les marchés africain et arabe. Une zone dominée notamment par le concept de marché « halal ». Un marché estimé mondialement à plusieurs milliards de dollars. De quoi donner l’eau à la bouche !