Des politiques espagnols dénoncent ses propos et exigent une enquête: L’« insensible » Sanchez face à l’horreur de Melilla
L’horreur à Melilla. L’amas de corps entre cadavres, blessés et prisonniers, renseigne sur le désastre, d’une ampleur jamais atteinte, qui s’est passé, vendredi dernier dans cette ville. Les images sont insoutenables et littéralement apocalyptiques. Mais si les circonstances de la catastrophe font encore l’objet de controverses, les déclarations du premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, elles, sont claires et ont provoqué une grande indignation dans le monde politique espagnol. Ce dernier a décrit ce drame comme un « assaut (…) violent et organisé de la part de mafias qui se livrent au trafic d’êtres humains, contre une ville qui est un territoire espagnol (…) Par conséquent, il s’est agi d’une attaque contre l’intégrité territoriale de notre pays ». Il a même exprimé sa solidarité et sa reconnaissance aux services de sécurité espagnols et marocains pour avoir protégé les frontières. Sanchez parle d’« assaut», d’« attaque» et remercie les forces de sécurité mais contre qui ? Contre des migrants africains qui ont tenté de pénétrer par la force dans cette enclave espagnole, située en territoire marocain ? Même s’ils étaient 2000, ces derniers ne pouvaient constituer un danger justifiant la mort de 37 d’entre-eux ! Il s’agit là du bilan le plus meurtrier jamais enregistré lors des nombreuses tentatives de migrants subsahariens de pénétrer à Melilla et dans l’autre enclave espagnole de Ceuta, qui constituent les seules frontières de l’UE avec le continent africain. Face à ce drame qui ne semble nullement affecter le premier ministre espagnol, certains politiciens espagnols n’ont pas manqué de montrer leur indignation. Ils ont affirmé que les propos de Sanchez étaient dépourvus de tout humanisme. Ils se sont même demandé s’il aurait tenu les mêmes paroles face à des victimes européennes. La maire de Barcelone, Ada Colau a affiché sa « gêne » après les déclarations du premier ministre et s’est dite « surprise de l’insensibilité et du manque de sympathie » du Premier ministre espagnol envers les victimes de Mellila. Elle a exigé l’ouverture d’une enquête sur les morts pour situer les responsabilités. Et elle ne sera la seule. Yolanda Diaz, la deuxième vice-présidente du gouvernement espagol, a appelé, elle aussi, à la clarification des faits et notamment au respect des droits de l’homme. Diaz s’est dite « très choquée par les photos à la frontière de Melilla, mes condoléances aux proches qui ont perdu la vie injustement, il est nécessaire de clarifier ce qui s’est passé. Je parierai toujours sur l’immigration et sur une politique respectueuse des droits humains. Personne ne devrait mourir comme ça. » De son côté, Pablo Echenique, porte-parole du groupe parlementaire Unidas Podemos, s’est demandé, « Et si les 37 victimes décédées à Melilla étaient des Européens blonds ? Il y aurait des réunions d’urgence au plus haut niveau, des émissions de télévision spéciales sur leur vie et les histoires de leurs familles, et une rupture complète des relations avec l’État dans lequel l’action de la police a causé ces événements. Mais, ils ne sont ni blonds ni européens. » Il y a eu aussi, la réaction du président (maire) de Melilla, Eduardo de Castro. Ce dernier a qualifié de « disproportionnée » l’action des forces marocaines dans le saut massif vers la clôture. « C’est scandaleux. Cette réponse du Maroc est disproportionnée », a-t-il affirmé dans un entretien à Canal 24h à propos des images diffusées par les médias sur lesquelles on voit des migrants entassés au sol, dont beaucoup sont blessés. De Castro a également déploré « le drame humanitaire ». Ínigo Errejón, le cofondateur et stratège de Podémos. a qualifié d’« horribles » les images qui arrivent de la frontière marocaine. « Et c’est horrible que le gouvernement félicite la police marocaine. Est-ce cela qui a été acheté avec l’abandon du peuple sahraoui ? », s’est-il interrogé sur les réseaux sociaux. La Commission espagnole d’aide aux réfugiés (CEAR) a assuré que les événements « dramatiques » survenus démontrent « une fois de plus l’utilisation aveugle de la violence pour gérer les migrations et contrôler les frontières, et ainsi empêcher les personnes pouvant prétendre à une protection internationale d’atteindre le territoire espagnol », a déclaré la directrice générale du CEAR, Estrella Galán. Au Maroc, il y a eu aussi dénonciation de la part des militants des droits de l’homme qui ont appelé à l’ouverture d’enquêtes dans les deux pays surtout que les vidéos partagées en ligne par l’Association marocaine des droits de l’homme semblaient montrer des dizaines de personnes entassées dans une zone à côté de la barrière frontalière dont certaines étaient en sang face aux forces anti-émeutes marocaines. Les migrants ont été traités de manière violente et inhumaine et ils ont été abandonnés sans secours pendant des heures, ce qui a augmenté le nombre de décès, ont affirmé les associations des droits de l’Homme marocaines qui ont partagé aussi une autre vidéo montrant un agent de sécurité marocain utilisant une matraque pour s’en prendre à une personne qui était …couchée !! Selon le journal espagnol El Pais qui rapportait la déclaration d’un migrant « les forces marocaines avaient jeté des pierres et lancé des gaz lacrymogènes directement sur ceux qui tentaient de traverser. Normalement, ils lancent en l’air, mais cette fois, ils visaient directement les gens. Ces derniers étaient déjà très faibles et affamés et ils tombaient au moindre contact ».
Hayet Youba