Eclairage
Quand Poutine joue et gagne
Par Mohamed Abdoun
Au moment où l’Occident se perdait et se dispersait en atermoiements et en conjectures, le président russe, lui, demeurait droit dans ses bottes. Ne perdait pas un instant de vue son objectif final. Entre un Macron qui pensait imposer son propre tempo alors que Moscou avait tout réglé et prévu de longue date, et un Biden dramatisant les faits jusqu’à l’outrance, constat et conclusions sont très vite établis. L’accord de Minsk est mort de sa belle mort. Lâchement assassiné par un Occident qui, présumant de sa force et de ses compétence, avait voulu étendre l’OTAN jusqu’à menacer la sécurité et la profondeur stratégique de la Russie. C’était plus, bien plus, que ne pouvait en supporter Moscou. Bien au-delà du verbiage habituel des chefs d’Etats occidentaux, Poutine, qui n’est pas Eltsine, ni Gorbatchev non plus, n’a jamais fait secret de ses intentions. Ses mouvements de troupes massifs aux frontières avec l’Ukraine étaient parfaitement clairs. Les républiques autonomes du Donbass sont sécurisées. Les troupes russes y veillent personnellement. Quant au commandement militaire ukrainien, il vient d’être neutralisé en quelques heures à peine. Cette belle leçon de stratégie militaire et politique en appelle certainement d’autres. Un changement de régime à Kiev s’impose de facto. Le porte-parols du Kremlin, Dmitri Peskov, évoque à demi-mots cette éventualité. Zelensky a montré à tous quel piètre menteur il était. Poutine, seul maitre du jeu, se réserve le droit de déterminer la durée de cette opération spéciale déclenchée ce matin à l’aube. Moscou agit pour sa sécurité et pour la défense de sa profondeur stratégique. Incarnant une sorte de force tranquille sous la conduite du président Poutine, la Russie impose son tempo à tout l’occident, se sachant dans son bon droit, et assez forte militairement pour faire plier l’OTAN en cas de besoin. La rhétorique guerrière et mensongère de Washington ne saurait rien y changer. Moscou contrôle de facto les républiques du Donbass. Poutine le dit tout haut. Il n’est pas hypocrite, comme peuvent l’être la plupart des hommes politiques occidentaux. Au vrai, l’OTAN n’a plus de raison d’être depuis la chute du mur de Berlin et du bloc soviétique. La Russie ne peut accepter que l’OTAN la prenne en étau et grignote chaque jour un territoire supplémentaire, et en déployant des armes sophistiquées littéralement aux portes de Moscou. Une alliance conjoncturelle sino-russe a fini par se cristalliser. Une importante et profonde redistribution des cartes géostratégiques est en passe de s’opérer sous nos yeux. Moscou chasse la France de RCA (république centre-africaine) et du Mali, ce qui est absolument impensable il ya de cela à peine quelques mois. L’hégémonie américaine sur la planète et son impérialisme est en pleine agonie. Les Américains, qui se démènent au Pacifique comme pas possible, allant jusqu’à poignarder dans le dos « l’allié français », ne sont franchement pas (ou plus) les maitres du monde. Ce bras de fer ukrainien vient de nous en administrer la preuve formelle et irréfutable. Dès lors, il faudra s’attendre à un début de rupture entre Washington et Bruxelles. Les intérêts des uns et des autres en deviennent en effet antagonistes. C’est dire qu’à trop vouloir jouer avec le feu, d’aucuns ont fini par se brûler…
M.A.