Eclairage
Rendez-vous avec l’Histoire
Par Mohamed Abdoun
Les raisons et indices ne manquent pas, qui indiquent que la déclaration signée la veille par près d’un millier de personnalités de toute l’Amérique Latine, annonce en clair un tournant majeur et salvateur en faveur de la cause sahraouie. Au point de vue de la forme d’abord, on retrouve en tête des signataires Adolfo Pérez Esquivel, prix Nobel de la paix. A sa suite, viennent des dizaines de femmes, les célèbres mères argentines de la Place Mai. Cela, sans oublier le parti au pouvoir au Mexique, en sus de nombreux ténors politiques colombiens, chiliens, panaméens, brésilien, vénézuélien, uruguayen, bolivien… pour qui connait les liens historiques, carrément ombilicaux qui relient l’Espagne à l’ensemble de ces pays, il devient loisible de prédire sans le moindre risque de se tromper que cette déclaration va inéluctablement faire tomber le gouvernement de Pedro Sanchez, mais aussi et surtout infléchir durablement la politique de Madrid concernant son ancienne colonie sahraouie. De fait, aux yeux de l’ONU, et du droit internationale, la royaume ibérique demeure la puissance administrante du Sahara Occidental. Plus que la reprise du conflit armé entre le front Polisario et l’armée d’occupation marocaine en date du 13 novembre 2020, la trahison de Sanchez cristallise l’électrochoc idéal qui vient replacer les choses dans leur contexte, rappeler que le Maroc occupe illégalement un territoire qui n’est pas le sien, que l’Espagne a failli à ses obligations légales et morales via l’accord de Madrid, et qu’il donc plus que temps que l’ONU reprenne définitivement et fermement ce dossier en main. Sur le plan de la forme, donc, la victoire est totale. Eclatante même. Elle rappelle que le fait accompli marocain ne peut, ni ne doit durer, un seul jour de plus. Passons au fond de la déclaration. Pedro Sanchez y est accusé, en sa qualité de président du gouvernement espagnol, de « complice du Maroc dans la violation de l’intégrité territoriale du Sahara occidental ». la suite est tout autant intéressante, sinon plus : « Cela révèle le discours hypocrite et la politique de deux poids deux mesures de la diplomatie espagnole. Car, d’un part l’Espagne en tant que membre de l’Union européenne et de l’OTAN, condamne l’incursion militaire de la Russie en Ukraine, qu’elle qualifie d’agression qui viole l’intégrité territoriale de ce pays et, d’autre part, elle soutient l’annexion et l’occupation illégale du Sahara occidental en appuyant la proposition d’autonomie du Maroc sur le territoire appartenant au peuple sahraoui ». En effet, ajoute encore le document, sur le plan strictement légal, « La nouvelle position du gouvernement espagnol n’est pas basée sur une décision juridiquement fondée. Elle viole le droit international et la légalité qui ne reconnaissent aucune souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental ». et, si cela ne suffisait pas, le plus accablant pour Madrid et son gouvernement, c’est sa coucherie et sa pleutrerie devant les maitres chanteurs du régime marocain : « La lettre du président espagnol adressée au monarque marocain constitue une nouvelle capitulation face au chantage de cette monarchie et est l’équivalent de la position inacceptable de l’ancien président américain, Donald Trump, qui en décembre 2020, via son compte twitter, a reconnu unilatéralement, arbitrairement et sans aucun fondement, l’aspiration du Maroc à la souveraineté sur le territoire du Sahara occidental comme condition et monnaie d’échange en contrepartie de la “normalisation” des relations entre Israël et le Maroc ». en guise de conclusion, la déclaration rappelle que les temps ont en effet changé, mais pas dans le sens souhaité par Madrid et Rabat. C’est même le contraire qui est vrai : « Nous savons que la vision néocoloniale de l’État et du gouvernement espagnols est l’expression de sombres intérêts monarchiques médiévaux qui n’ont pas leur place au XXIe siècle, qui sont rejetés par tous les hommes et femmes libres de la planète, et en premier lieu par le peuple espagnol lui-même ». Oui, tous les peuples de la planète disent non à cette honteuse et innommable trahison. Celui d’Espagne va encore le prouver ce samedi à midi, avec force et brio. Nul ne peut s’interposer entre la marche inéluctable de l’Histoire et le droit des peuples à disposer librement et souverainement de leur destin…
M.A.