Edito
Les points sur les « i »
Par Mohamed Abdoun
L’entretien accordé ce vendredi par le président Tebboune au Figaro se lit d’une traite. Se déguste aussi à la petite cuiller. On y retrouve toute la force de caractère d’un homme d’Etat, un vrai, qui incarne, et endosse aussi, la force retrouvée d’une Algérie qui entend bien peser sur le cours de l’histoire, en tant que puissance régionale, et face aux profondes mutations géopolitiques en train de se dérouler sous nos yeux. Forte de ses atouts humains, naturels et économiques, l’Algérie ne subira pas passivement ces changements en cours. « Je peux simplement vous dire que je vais aller en Russie prochainement. Je n’approuve ni ne condamne l’opération russe en Ukraine. L’Algérie est un pays non aligné, et je tiens au respect de cette philosophie. Personne ne pourra jamais satelliser l’Algérie. Notre pays est né pour être libre. Par ailleurs, il serait bon que l’ONU ne condamne pas uniquement les annexions qui ont lieu en Europe. Qu’en est-il de l’annexion du Golan par Israël ou du Sahara occidental par le Maroc ? » cet extrait de l’une des réponses présidentielles données aux questions du Figaro résume à lui seul cette philosophie qui anime l’Algérie nouvelle. Une Algérie enfin décomplexée de son passé colonial, qui dépolitise une partie de cette histoire commune ave la France, afin de mettre définitivement les points sur les « i », de tourner enfin la page, mais sans jamais la déchirer. L’Algérie nouvelle, motif de fierté pour tous les patriotes, rompt définitivement avec la tacite diplomatie des hypocrites non-dits. Elle ose mettre le doigt sur les plaies purulentes qui infectent notre planète. Elle dit à la France et à l’ONU leurs quatre vérités en face. Oui, si on avait écouté l’Algérie, l’Etat libyen ne se serait pas écroulé, provoquant au passage la crise sécuritaire qui gangrène toute la bande sahélo-saharienne. C’est aussi la France, après l’assassinat de Kadhafi, qui a empêché l’application au Mali de l’accord d’Alger. Sa partie septentrionale est aux mains de bandes criminelles armées, qui profitent de cette instabilité chronique aux fins de servir un agenda conformes aux desiderata de certains services secrets bien connus, marocains en tête. L’expérience algérienne en matière de lutte contre le terrorisme, chèrement payée, lui permet aussi de dire que cette crise est beaucoup plus socioéconomique que sécuritaire. Ce n’est pas tout. On ne condamne pas la Russie pour une annexion, au demeurant validée démocratiquement par la voie référendaire d’un peuple brimé et opprimé par les néonazis ukrainiens, non on ne condamne pas Moscou quand on continue de fermer les yeux sur les annexions et l’apartheid pleinement assumé par le Maroc au Sahara Occidental, et l’entité sioniste au Golan syrien à Al Qods et en Cisjordanie. Jusque-là quasi-inaudible, la voix de l’Algérie se fait entendre enfin. Pour le bien de tous. La sincérité et les engagements du président, qui avait osé attaquer frontalement la toute puissance des oligarques, ce qui lui avait valu son éviction de la primature, en fait une sorte de précurseur du hirak authentique. Après les chantiers politiques, menés tous à bien, les défis économiques se posent et s’imposent désormais à nous. Même s’il est trop tôt pour en parler présentement, un second mandat semble s’imposer de facto.
M.A.