Exploitation et extraction des terres rares : La Chine joue à fond la carte gagnante de l’Afrique
L’avenir du monde sera africain, ou ne sera pas. En débloquant près de 97 millions de dollars pour renforcer sa présence dans le secteur des terres rares en Afrique, la Chine confirme son appétit pour les ressources stratégiques du continent, mais aussi son côté visionnaire, lui permettant d’anticiper les évènements, afin d’en tirer profit. Cette opération, centrée sur le projet Ngualla en Tanzanie, illustre la volonté de Pékin de consolider son avance dans une industrie clé pour les technologies de demain. Le groupe chinois Shenghe Resources a franchi une étape déterminante en annonçant l’acquisition de Peak Rare Earths, société australienne détentrice du projet Ngualla en Tanzanie. Cette opération, valorisée à plus de 96 millions de dollars, doit encore recevoir l’aval des actionnaires et des autorités réglementaires, mais elle traduit la stratégie offensive de la Chine pour sécuriser l’accès à des gisements majeurs hors de ses frontières. Avec une capacité annoncée de 37 200 tonnes de concentré de terres rares par an sur plus de vingt ans, Ngualla se positionne comme l’un des projets les plus avancés du continent africain. La dynamique chinoise sur le marché africain des terres rares s’inscrit dans un contexte de rivalité accrue avec les États-Unis et l’Union européenne, tous deux désireux de diversifier leurs sources d’approvisionnement. Si la Chine domine déjà 69 % de la production mondiale, elle multiplie les investissements pour contrôler des sites stratégiques en Afrique, où des gisements d’importance sont identifiés en Tanzanie, en Afrique du Sud, en Namibie, en Angola et en Ouganda. Cette compétition internationale s’accompagne d’initiatives occidentales, comme l’intégration de projets africains dans la stratégie d’approvisionnement européenne, afin de réduire la dépendance aux exportations chinoises. Face à cette offensive, les États africains cherchent à tirer profit de la conjoncture pour obtenir des retombées concrètes. La question de la valeur ajoutée locale, de la création d’emplois et de la souveraineté minière reste au cœur des préoccupations. Les gouvernements africains sont ainsi incités à négocier des conditions favorables, afin que l’exploitation de ces ressources serve aussi le développement industriel et social du continent. Dans ce contexte, la compétition entre grandes puissances pourrait être un levier pour renforcer la position des producteurs africains sur l’échiquier mondial. L’engagement financier de la Chine en Afrique dans le secteur des terres rares marque une phase d’intensification des rivalités économiques et géopolitiques autour des ressources critiques. L’Afrique, forte de ses gisements, se retrouve au centre de toutes les attentions, avec la possibilité d’influer sur la structuration future de la chaîne de valeur mondiale des terres rares. Reste à savoir comment les acteurs locaux sauront transformer cette dynamique en moteur de développement durable et d’indépendance économique. il va sans dire qu’il appartient au continent africain, notre continent, de négocier adroitement ce virage historique sur les plans géostratégique, technologique et économique.
Wassim Benrabah