Face à la pression internationale : Rabat libère l’historien Maâti Monjib
Les détenus d’opinion, qui ont légions au royaume de Mohamed VI sont systématiquement jetés en prison sur la base de dossiers sordides fabriqués de toutes pièces par le chef des services de sécurité et de renseignements marocains Abdellatif Hammouchi.
Dernier exemple en date : le cas atypique de l’historien et défenseur des droits de l’Homme Maâti Monjib, en grève de la faim depuis 19 jours. Celui-ci est sorti de prison mardi après trois mois de détention, le juge d’instruction ayant décidé de le remettre en liberté provisoire.
“Les accusations contre moi sont fabriquées par la police politique (…) maintenant que je jouis de la liberté provisoire, je vais militer pour la libération des autres détenus” d’opinion, a déclaré, combattif, M. Monjib à sa sortie de prison.
Ce militant, connu pour ses critiques ouvertes du pouvoir, dénonçait son arrestation “abusive” depuis son interpellation dans le cadre d’une enquête préliminaire pour “blanchiment de capitaux”. Parallèlement, il a ensuite été condamné à un an de prison le 27 janvier pour “fraude” et “atteinte à la sécurité de l’Etat” au terme d’un procès ouvert en 2015 et plusieurs fois reporté.
Ses avocats et son comité de soutien s’étaient indignés de ce jugement, rendu en l’absence de l’accusé et sans convocation de sa défense. Cette libération met à nue la fragilité des accusations formulées contre ce militant, mais aussi et surtout l’instrumentation de la justice du royaume chérifien pour faire taire et emprisonner toutes les voix dissonantes qui osent encore s’y exprimer librement.
Le secrétaire général de l’ONG Reporters sans frontières, Christophe Deloire, a salué cette libération en appelant “à l’abandon de toutes les poursuites iniques lancées contre des journalistes au Maroc”. “Maâti Monjib est enfin libre! Son courage et la mobilisation internationale ont payé. Victoire! (Mais restons vigilants, car ce n’est pas fini)”, a de son côté tweeté Human Rights Watch. “Nous continuons à revendiquer l’abandon du traitement répressif inique policier contre lui et contre l’ensemble des personnes poursuivies pour délit d’opinion dans le pays”, a déclaré à l’AFP le militant marocain Fouad Abdelmoumni, devant la prison d’El Arjat.
Il y a près de deux semaines, M. Monjib avait fait déposer une plainte à Paris pour “harcèlement moral”, “mise en danger de la vie d’autrui” et “atteinte à la liberté individuelle par des personnes exerçant une fonction publique” – ce dernier point correspondant en droit pénal français à la détention arbitraire. L’historien “est l’une des voix critiques les plus emblématiques du régime marocain, dénonçant notamment la mainmise des services de sécurité (…), qui s’apparente à une vraie police politique”, avaient alors souligné ses avocats français.
Ali Oussi