Fin de l’importation des semences et augmentation du rendement
L’Algérie fait ses premiers pas vers la souveraineté alimentaire
Hayet Youba
L’Algérie pourrait se passer de l’importation des semences de certains produits agricoles de large consommation d’ici deux ans. Une très bonne nouvelle pour le pays qui attend la réalisation de résultats probants, depuis le lancement de sa réforme en 2020 et l’inscription d’objectifs clairs à atteindre dans son agenda, par le président de la République. Le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Mohamed Abdelhafid Henni, qui a fait cette déclaration à Sétif où il s’est déplacé, en ce début de semaine, a assuré que « la poursuite de la mise en œuvre des programmes du secteur agricole à ce rythme nous permettra, d’ici deux ans, de nous passer de l’importation des semences de certains produits de large consommation comme la pomme de terre et de réduire ainsi la facture d’importation ». Il a même affirmé que son département allait «suivre et accompagner les sociétés qui assurent une telle production». Une bonne nouvelle pour permettre à l’Algérie, un des rares pays à produire des semences de produits de large consommation, de renforcer et d’améliorer sa sécurité alimentaire. Un défi que l’Algérie doit relever, comme ne cesse de le répéter le chef de l’Etat. Lors de sa dernière entrevue périodique avec des représentants de la presse nationale, le Président Tebboune avait indiqué que «la solution radicale face à l’envolée des cours des produits alimentaires et à leur pénurie sur les marchés internationaux est de renforcer la production nationale». Il avait rappelé, dans ce cadre, les incitations décidées par l’Etat au profit des producteurs, y compris le financement des projets à hauteur de 90%. Cette démarche découle de l’importance accordée par l’Etat à l’augmentation des niveaux de production locale qui constitue « la base de la sécurité alimentaire du pays », avait encore soutenu le président de la République. En fait, l’Algérie est face au défi d’augmenter sa production en céréales qui ne couvre qu’environ la moitié des besoins du pays, estimés à environ 9 millions de tonnes. En plus de répondre à la demande intérieure croissante, il s’agira aussi de réduire la facture d’importation. Pour réaliser cet objectif, le Président de la République insiste sur l’importance d’augmenter le rendement des terres agricoles dédiées à céréaliculture pour passer d’une moyenne de 20 quintaux/hectare actuellement à 40 quintaux/hectare. Cela nécessite l’utilisation des techniques agricoles adéquates en matière d’irrigation ainsi que l’intensification de la production des semences. C’est pour cette raison que l’annonce faite par le ministre de l’agriculture est très importante. En plus des semences, plusieurs facteurs doivent être réunis pour augmenter le rendement de la terre dont l’eau et l’électricité. Raison pour laquelle plusieurs secteurs doivent s’associer pour permettre d’atteindre cet objectif. Ce qui rend optimiste, c’est de constater que sur le terrain, cela se fait. Le ministère des startups, à titre d’exemple, a organisé, il y a une dizaine de jours, la 4ème édition du “Foodtech startup challenge”, un concours placé cette année sous le thème « L’innovation au service de la sécurité alimentaire ». Douze projets ont été primés lors de cette finale marquée également par la tenue de plusieurs panels traitant notamment de la contribution des startups à l’atteinte des objectifs de la sécurité alimentaire, de leur apport à l’augmentation du taux d’intégration et de la profitabilité de collaboration entre startups et groupes industriels. Outre le déploiement des différents secteurs et acteurs pour relever le défi de la sécurité alimentaire, il y a lieu de citer les efforts fournis par les fellahs. Prenons l’exemple de Ouargla où les responsables de la chambre d’agriculture font des prévisions à long terme, très prometteuses. « Pour cette année, nous avons 3 300 ha destinés aux céréales. Avec les investissements pour l’électrification, nous nous attendons à ce que le chiffre bondisse durant l’exercice prochain, à 6 000 ha destinés aux céréales», est-il assuré. Mieux « d’ici trois ans, nous prévoyons de passer de 6 000 à 15 000 ha », a-t-on ajouté. Et il ne s’agit là de l’exploitation que de 10 % des terres ! Il existe des espaces relevant de l’Office pour le développement de l’agriculture saharienne : à Gassi Touil, Hassi Lahdjar. Il y a des réserves d’eau et des terrains à perte de vue. Un ingénieur agronome de la région affirme « au début, la production ne dépassait pas 25 quintaux par hectare. Avec le temps, quand on a pu maîtriser l’itinéraire technique et le pilotage de l’eau d’irrigation, et avec la compétence, nous sommes optimistes quant à atteindre une moyenne de 60 quintaux par hectare » ! Une prouesse qui permettra de mettre l’Algérie définitivement sur le chemin de la souveraineté. Car il est bien connu qu’aucun pays ne peut prétendre être souverain et autonome si économiquement il est dépendant. La sujétion est double si le pays est incapable d’assurer sa sécurité alimentaire.
H.Y.