Fin de l’impunité parlementaire
À la veille du 2e anniversaire du soulèvement populaire inédit qui a forcé l’ex-homme fort Abdelaziz Bouteflika à briguer un cinquième mandat présidentiel et à quitter le pouvoir. Le président de la République Abdelmadjid Tebboune a par ailleurs décidé de «dissoudre l’Assemblée populaire nationale (APN) pour appeler à des élections», en disant souhaiter «ouvrir ses portes à la jeunesse».
En effet, Fidèle à ses engagements électoraux, le président Tebboune vient de réaliser une autre importante revendication populaire, dissoudre l’APN et faire tenir de nouvelles élections pour mettre en place, dans une compétition honnête et transparente, loin des pouvoirs de l’argent et des lobbys, une assemblée représentative des aspirations du peuple, et notamment dans la concrétisation de la nouvelle ère.
Cette rupture, dans le calme, la sérénité et la fermeté, a mis un terme au « mandat » d’une institution fortement viciée par les pratiques et dérives de l’ex oligarchie politico- financière prédatrice des ressources de la collectivité nationale.
L’immunité parlementaire ne sera plus synonyme d’une impunité et encore moins lorsqu’il s’agit d’actes délictueux commis avant et pendant la mandature. C’était malheureusement la conception adoptée par un certain nombre d’élus…qui s’entêtaient à faire croire que l’immunité parlementaire les mettait à l’abri de toute poursuite judiciaire.
Ceci dit, leur responsabilité politique, basée sur l’éthique et la confiance placée en eux par les électeurs ou l’institution qui les a nommés, les obligeait au moins à démissionner dans tous les cas de figure où leur honneur, leur intégrité morale ou leurs actes seraient mis en doute, à la suite d’une instruction judiciaire où ils sont nommément cités en tant qu’accusés, ou de la divulgation par la presse, d’éléments à charge suscitant le doute, et que le parlementaire serait incapable à réfuter publiquement avec des preuves probantes.
Cette culture politique va devoir avoir droit de cité dans notre pays. Cette notion de responsabilité politique trouve sa logique dans la différence opérée entre le parlementaire, et le fonctionnaire, qui fonde la distinction entre responsabilité politique et responsabilité administrative.
Désormais, avec la révision de la constitution, l’immunité parlementaire ne concernerait que les actes et les paroles liées à l’activité parlementaire proprement dite, le député ou le sénateur, ne bénéficiera plus de cette impunité « inadmissible » couverte par des réflexes corporatistes puisqu’il faut le vote majoritaire de ses pairs pour lui ôter l’immunité-bouclier, utilisé souvent pour couvrir les frasques.
Et, cette levée sera dorénavant opérée par la Cour constitutionnelle, une institution de juges « déconnectée » du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. Le parlementaire aura donc à répondre de tout délit ou malversation commis durant son mandat, étant justiciable comme tout autre citoyen.
Il faut aussi rappeler que la culture de la démission en cas de perte de confiance, ou de doute sur son intégrité morale, avait totalement occultée par les hommes politiques et n’avait pas trouvé de voie dans les mœurs politiques.
Ce qui avait ajouté de l’eau au moulin des récriminations des citoyens au sujet de la perte de crédibilité des « élus », en majorité issus de fraude massive, de par leurs actes, sans omettre la manière avec laquelle ils sont parvenus et dont les derniers procès révélaient les dessous des tractations pour monnayer l’accès aux listes de candidature d’un « grand » parti. Et cela se passait, selon des gorges chaudes, pour nombre de partis, même ceux qui avaient peu de chance de gagner des sièges.
Le changement est maintenant, il est irrémé- diable, à charge pour les « élus » empêtrés dans ces dérives de tirer leur révérence politique car cela est nécessaire et les évènements l’imposent. Cette rupture radicale avec plus de 23 ans de « parlementarisme », vicié par la fraude, la corruption et l’argent sale, va donner le véritable élan attendu par la population à la construction d’un Etat fort et démocratique.
Car, il faut le rappeler, le pays, à la faveur, entre autres, d’un « parlementarisme » débridé et populiste, a vu se développer, en l’espace de quelques années seulement , une oligarchie étendant ses tentacules partout dans le pays, versant dans un clientélisme acharné, corrupteur et corrompu, arrosant de gratifications, d’argent et de fonctions les relais, les affiliés, les satellites et même les sous-fifres.
Généralisant les passe-droits et gangrénant le corps social du pays par la corruption, le népotisme et la médiocrité, tout en versant dans une duplicité ignominieuse à propos de prétendus transferts sociaux, alourdissant le Trésor public.
La « méritocratie » tant vantée et tant acclamée par ces godillots « élus » qui applaudissaient les plus invraisemblables frasques du régime déchu, manipulant outrageusement les indicateurs économiques pour véhiculer une image reluisante des résultats économiques et sociaux, n’était, en réalité, qu’une inaptocratie doublée d’une kleptocratie sans scrupules dont la cupidité a dépassé toutes les limites.
En dehors de l’oligarchie politico-financière, point de salut, scandaient-ils matin et soir avec des chiffres pompeux et factices, l’Algérie basculerait soit dans le chaos, soit dans l’extrémisme ravageur des libertés individuelles et collectives. Il ne pouvait en être ainsi car les Algériens n’étaient pas dupes et avaient ras le bol de la corruption, de la rapine, du clientélisme, des passe-droits, du népotisme et de l’arbitraire.
Et, ce fut le cas, de nombreux parlementaires, décriés par la vox populi ou cités nommément dans des enquêtes judiciaires engagées contre des actes de malversations de deniers publics, de trafics d’influence, ou d’abus de biens sociaux quand il s’agit pas simplement d’actes de banditisme. Aucun d’eux n’avait fait une déclaration publique rejetant les accusations et justifiant son innocence, et personne ne s’était dit disposé à accepter à répondre à ces mises en cause devant la justice, en se délestant volontairement de l’immunité parlementaire.
Nous avons vu des élus sur qui pèsent des soupçons de népotisme, malversations ou même de corruption défiant tout le monde et restant à leurs postes. Peut-on renoncer aux privilèges et avantages procurés par une fonction « octroyée » ou « acquise » par grenouillage politique ou complaisance, sans oublier la bulle d’impunité ?