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Sahara Occidental: Le Conseil de Sécurité renouvellera le mandat de la MINURSO
Finalement, l’ONU, qui gère le conflit sahraoui au lieu d’œuvrer à le résoudre, vient de prolonger de facto ce d’une année supplémentaire en en faisant autant avec le mandat de la MINURSO, jusqu’au 31 octobre 2023. C’est ce que nous venons d’apprendre en exclusivité de sources recoupées et généralement bien informée. Hormis le restant des Etats membres, permanents ou pas, seuls la Russie et le Kenya se sont abstenus de voter. Le conseil de sécurité de l’ONU en a décidé ainsi. Pas de résolution contraignante à l’endroit du Maroc donc qui, pourtant a gravement fauté en empêchant Staffan de Mistura, envoyé personnel du SG de l’ONU pour le Sahara Occidental, de se rendre dans les territoires occupés. Rien non plus concernant les morts algériens, sahraouis et mauritaniens, causés par le terrorisme d’Etat du Maroc. Pas question pour le Polisario de baisser les armes dans ces condition, ni pour l’Algérie de revenir à la formule des tables rondes, totalement stérile et contre-productive. Plusieurs mises à jour du projet de résolution de cette année renouvelant le mandat de la MINURSO ont été faites dans le but apparent de fournir à de Mistura, qui a été nommé en octobre 2021, l’espace et la flexibilité nécessaires pour faire avancer le processus politique. Comme indiqué dans le dernier rapport du Secrétaire général sur le Sahara occidental, en date du 3 octobre, le Maroc est favorable à la reprise des tables rondes que le prédécesseur de de Mistura, Horst Köhler, avait initiées en 2018 et 2019, impliquant le Maroc, le Front Polisario, l’Algérie et la Mauritanie. Le Maroc a déclaré que ce processus devrait être basé sur sa proposition d’autonomie pour le Sahara Occidental. (Le plan d’autonomie du Maroc, qu’il a soumis à l’ONU en 2007, appelle à l’intégration du territoire au Maroc, le peuple sahraoui gérant ses affaires intérieures tout en étant représenté à l’extérieur par le Maroc.) À l’inverse, l’Algérie s’est opposée au format de la table ronde, qu’elle considère comme potentiellement recadrant la situation comme un «conflit régional», au lieu d’un conflit entre le Maroc et le Front Polisario, l’Algérie et la Mauritanie étant considérées comme des «voisins inquiets». Le projet de résolution introduit un nouveau libellé soulignant l’importance que « toutes les parties concernées développent leurs positions afin de faire avancer une solution ». Il semble que le terme « toutes concernées » ait été inséré dans un langage plus ambigu pour tenir compte des différents points de vue des acteurs concernant qui sont considérés comme les parties au conflit, tout en donnant à de Mistura l’espace nécessaire pour déterminer comment faire avancer le processus politique. Le projet de texte exprime en outre son soutien à « s’appuyer sur les progrès et le cadre de l’ancien Envoyé personnel », et encourage vivement le Maroc, le Front Polisario, l’Algérie et la Mauritanie à s’engager avec l’Envoyé personnel. On voit bien qu’on en est encore et toujours au stade du verbiage stérile alors que le drame du peuple sahraoui tend à s’installer dans la durée depuis 47 longues et interminables années. Entre autres mises à jour, les États-Unis ont ajouté un nouveau libellé dans le projet de cette année appelant à la reprise du réapprovisionnement sûr et régulier des sites des équipes de la MINURSO. Il s’agit d’une question soulevée dans le rapport du Secrétaire général, car le Front Polisario a imposé des restrictions de mouvement à la MINURSO depuis la rupture du cessez-le-feu en novembre 2020, ce qui a considérablement limité la capacité de la mission à réapprovisionner ses sites d’équipe à l’est de la berme. Selon le rapport, ces restrictions ont eu des effets négatifs sur l’état de fonctionnement et le cycle de vie des équipements, ainsi que sur le moral et la santé du personnel de la MINURSO sur les sites et, si elles ne sont pas supprimées, elles risquent de rendre ces sites insoutenables. On s’inquiète donc pour la vie des éléments de la MINURSO, mais pas pour celle des Sahraouis. Ou, en tous cas, pas assez. Le Kenya et la Russie ont estimé que le projet de texte était déséquilibré – une position qu’ils ont exprimée lors des précédents renouvellements de mandat de la MINURSO – et ils ont proposé plusieurs révisions. L’une de leurs principales préoccupations était de faire en sorte que le projet de résolution distingue plus clairement le Maroc et le Front Polisario des pays voisins concernés, l’Algérie et la Mauritanie. Le Kenya et la Russie ont également apparemment réitéré leurs préoccupations concernant la référence de la résolution à des approches « réalistes » d’un règlement politique, entre autres questions. C’est une question qu’ils ont soulevée lors des négociations sur le mandat de l’année dernière, car ils considèrent que le terme est ambigu : il est souvent également utilisé par les pays exprimant leur soutien à la proposition d’autonomie du Maroc. Plus largement, il semble qu’ils aient maintenu leurs inquiétudes quant à la dilution des références dans les résolutions de la MINURSO au référendum et à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental. Au cours des consultations à huis clos de la semaine dernière sur le Sahara occidental, le Kenya a apparemment souligné que l’objectif initial de la MINURSO lors de sa création en 1991 par la résolution 690était de mettre en œuvre un référendum pour l’autodétermination du peuple du Sahara occidental, mais que son mandat s’en est ensuite écarté. Il est donc temps d’y revenir, sous peine de voir les armes refuser de se taire, et ce conflit jusque-là de basse intensité monter petit-à-petit en cadence et en puissance. Surtout en l’absence d’extension de la question des droits de l’Homme au mandat de la Minurso.
Kamel Zaidi