Longtemps présentée comme un arbitre régional, l’Algérie, décidée à jouer un rôle actif dans la résolution du conflit libyen, milite pour une solution inter-libyenne. Pour l’Algérie, l’enjeu principal est sécuritaire, car les nouveaux développements en Libye, notamment la présence de plus en plus visible de combattants étrangers et le possible déploiement de troupes turques, rendent la situation fragile et menaçante. Un conflit sur les hydrocarbures se prépare en Méditerranée.
L’Algérie n’a pas de parti pris et connaît tous les acteurs qu’elle a reçus. Sa neutralité est un atout. L’Algérie a plus de chances d’être écoutée en Libye que la France, la Turquie et la Russie qui ont des partis pris. De ce fait, l’Algérie peut dialoguer avec les différents protagonistes. Un atout important dans le règlement du conflit libyen. En effet, Alger demeure une capitale visitée par des émissaires de différentes nationalités dans le cadre de la crise libyenne. Le pays s’est placé en médiateur incontournable pour régler un conflit qui menace la stabilité régionale. Á cet effet, le ballet diplomatique enregistré à Alger ces dernières semaines, les rencontres du chef de l’Etat avec différents diplomates étrangers et représentants des parties en conflit en Libye montrent le retour de l’Algérie sur l’échiquier régional et international après tant d’années presque d’isolement. La diplomatie algérienne commence ainsi à capter l’attention de la communauté internationale. «Nous sommes convaincus que l’Algérie est capable de jouer un rôle dans le dialogue pour le règlement de la crise qui prévaut en Libye depuis 2011», affirme à ce propos Abdelhadi Lahouij, ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale au Gouvernement libyen de transition, lors d’une conférence sur «la crise en Libye et ses répercussions sur les pays du voisinage» tenue le 8 mars, au siège du parti Front El Moustakbal en présence de Abdelaziz Belaïd, président du parti, Saïd Mokaddem, Secrétaire général du conseil consultatif de l’Union du Maghreb arabe (UMA) et des cadres du parti. « Nous accueillons favorablement le rôle de l’Algérie et voulons qu’elle (l’Algérie) et la Tunisie également interviennent, étant des pays du voisinage », a-t-il déclaré, affirmant que la persistance de l’anarchie entraînera la prolifération des armes dans les pays du voisinage libyen. Souhaitant l’aboutissement de l’approche algérienne, le responsable libyen a dit que «nous ne voulons pas que les scénarios de l’accord de Skhirat, de Paris ou d’Abu Dhabi se reproduisent, car ayant échoué». Quant à Abdelhadi Lahouij, il a insisté sur l’impératif de collecter les armes et d’assurer une répartition équitable des richesses du pays pour aller vers un dialogue permettant de construire «une Libye démocratique unie et stable». «Nous ne pouvons aspirer à une Libye démocratique et unie avec la prolifération de 21 millions d’armes et la présence de 300 groupes armés», dont certains appartenant à des groupes terroristes, a-t-il poursuivi. «Nous prônons la paix et la coexistence, la gouvernance n’est pas notre problème», a souligné le même responsable, avant d’ajouter : «Nous devons travailler en perspective d’une Libye nouvelle qui préserve ses décisions nationales, une Libye unie et stable et nous n’accepterons aucune présence militaire étrangère» en référence à l’intention de la Turquie d’envoyer des troupes sur le territoire libyen en soutien au gouvernement de Fayez El-Sarraj siégeant à Tripoli, qui subit de multiples offensives des forces du Maréchal Haftar depuis novembre 2019. « La Libye appartiendra uniquement aux Libyens et veillera à consacrer l’unité et la stabilité », a-t-il soutenu, soulignant la volonté de son pays « d’entretenir ses relations avec les pays voisins de par leur avenir commun, et à tirer profit de leurs expériences de développement et celle de la concorde civile », allusion à l’expérience de la réconciliation nationale adoptée par l’Algérie. Le responsable libyen a mis en exergue le besoin de la Libye à l’Algérie, arguant : « Nous voulons des contributions inhérentes à l’expérience de concorde civile, tout comme nous invitons les entreprises algériennes à venir investir en Libye. »
A une question de la presse, il a annoncé des visites prochaines à Alger de hauts responsables libyens. Pour ce qui est de la démission de l’envoyé spécial de l’ONU en Libye, le même responsable a indiqué que « Ghassan Salamé a consenti des efforts, mais son diagnostic à l’égard de la crise libyenne était incorrect», adressant, en revanche, ses remerciements à l’envoyé onusien démissionnaire pour ses efforts en Libye.
Pour sa part, Abdelaziz Belaïd, président du parti Front El Moustakbal, a déclaré que «la Libye est une partie importante de la profondeur stratégique de l’Algérie, de même pour l’Algérie par rapport à la Libye», soulignant que l’Algérie est convaincue que «la situation prévalant en Libye doit être résolue dans le cadre d’un dialogue sincère entre les parties libyennes et sans intervention étrangère». Il a précisé que «la Libye qui a soutenu l’Algérie ne peut trouver de notre part que soutien», affirmant que son parti est en faveur des démarches visant à mettre un terme à la crise dans ce pays et refuse «toute tentative de division en Libye ou lui porté atteinte par le biais d’une guerre par procuration». Abdelaziz Belaïd a souligné que «le règlement de la crise intervient à travers un dialogue global dans lequel les parties libyennes surpassent les questions étroites».