Le Maroc soumet ses alliés à une intimidation asphyxiante
Par Mah Iahdih Nan, ambassadeur de la RASD en Colombie
Le Ministère des Affaires étrangères marocain subit un processus grave et aigu de désespoir et d’amertume qui se reflète dans ses communiqués, déclarations, actes et rappels d’ambassadeurs de façon désordonnée et incohérente. Toutes ses actions sont exécutées au hasard, sans le souci de la bienséance, du contexte ou du timing et même sans respecter les traditions diplomatiques les plus élémentaires. Tous les pas effectués par la diplomatie marocaine ces derniers mois ont été le fruit de la précipitation, l’immaturité, le désespoir et l’angoisse.
Quand nous faisons un effort énorme et supérieur à nos possibilités pour fabriquer une réalité parallèle et à tout égard fantomatique, le résultat ne peut être autre que l’échec. Le Maroc a acheté avec de l’argent plus de 20 consulats fantômes (des immeubles vides avec des drapeaux payés avec la misère et la sueur des marocains) de divers États défaillants pour les installer dans la partie occupée du Sahara occidental. Il a acheté le gel de la reconnaissance de la RASD de certains pays ayant de sérieux problèmes socio-économiques et démocratiques. Il a réussi à ce qu’un président suranné et sortant lui reconnaisse sa souveraineté artificielle et non valable sur le Sahara, dans un jeu préparé et fabriqué par le sionisme le plus récalcitrant, où le Maroc n’a gagné que le déshonneur et le mépris des peuples arabes. Tout ce nuage de « victoires » irréelles a soumis le Makhzen dans une fausse bulle qui l’a mené à mélanger et confondre la réalité avec la fiction.
Mais éventuellement le moment arrive où l’on s’écrase contre le mur de la réalité la plus crue, où tout s’effrite et se complique. C’est ce qui est arrivé au Makhzen et notamment à son Ministre M. Nasser Bourita, ce pourquoi personne ne doit s’étonner de sa dérive tourmentée des derniers mois, qui l’a amené à multiplier ses chantages, coercitions et menaces dans tous les sens. Auparavant, le stratagème du Makhzen se résumait par un plan cyclique et répétitif par le biais duquel de temps en temps se présentait l’une des affaires épineuses que le Maroc utilise comme des armes de pression pour obtenir des récompenses. Maintenant la procédure a changé et depuis la fin de l’an dernier, peut-être en raison de la crise aigüe qu’il subit, il a commencé à sortir la mitrailleuse et à tirer sur plusieurs cibles en même tempsen faisant plusieurs victimes.
Ce changement de stratégie a placé hors-jeu et soumis tous ses partenaires et voisins à un stress excessif qui, avant, s’efforçaient pour cacher ou regarder de travers devant les impositions et demandes cycliques et, maintenant, sont à court d’arguments pour justifier ou répondre positivement à ses chantages. Le point d’inflexion dans cette nouvelle dynamique des relations entre les pays européens et le Maroc est marqué le jour où il a choisi la victime erronée. A la fin de l’an dernier le Maroc, animé par le jeu de Trump, a essayé de faire monter les enchères de ses intimidations afin de récupérer des prix plus juteux et a choisi l’Allemagne pour marquer la politique européenne concernant la légalité internationale et le dossier du Sahara occidental. Les calculs ont échoué en négligeant des questions élémentaires de culture, comme le fait que l’Allemagne n’est pas de tradition latine ou arabe, où l’on peut bricoler ou négocier en fonction des circonstances. Ils ne comptaient pas sur le respect scrupuleux et minutieux des allemands par la légalité et la justice internationales. Tel que le publiait cette semaine un média en citant un membre de la Commission européenne, à qui un diplomate marocain a avoué : « Maintenant nous ciblons l’Allemagne, qui est celui qui décide ces questions, l’Espagne et la France ne sont pas déterminantes dans ces matières ». Le pari marocain d’exercer des pressions sur l’UE pour une reconnaissance internationale de sa souveraineté sur le Sahara occidental lui a explosé au visage et a fait ricochet. Même les États-Unis sont en train de chercher les formes de se détacher de la décision surannée, tricheuse et de dernière minute de Trump sans froisser l’allié israélien. Le reste de la communauté internationale, de tous les côtés, a souligné que le Sahara occidental est un territoire non autonome sujet à la décolonisation promulguée par les instances internationales.
Dans ses communiqués incohérents et provocateurs, M. Bourita offense ses interlocuteurs allemands et espagnols, les accuse de mensonges selon lesquels ils seraient les ennemis de l’intégrité territoriale marocaine, mais de quelle intégrité parle M. Bourita ? Celle de la propagande marocaine ? Ou celle de la légalité internationale? Car elles sont totalement différentes, tel que le disent les registres et décisions des Nations Unies (Sahara occidental : territoire non autonome) ainsi que toutes les décisions de la justice internationale.
M. Bourita confond le fait d’être du côté du droit, des normes, de l’ordre et des lois internationales qui marquent l’harmonie et la cohabitation de tous les peuples du monde, avec son intégrité territoriale imaginaire et fictive qui ne tient pas debout. Dans ses communiqués, Bourita parle des enfants des camps dans des conditions inhumaines, ce qui est totalement faux et diffamatoire : les camps de réfugiés sahraouis sont peut-être le seul endroit d’Afrique où la scolarité des enfants entre 6 et 16 ans est totalement obligatoire et c’est très probablement le seul endroit d’Afrique où les enfants disposent d’au moins une couverture sanitaire gratuite. Le néfaste Bourita oublie que le Maroc est le pays au monde où plus d’enfants sont obligés d’émigrer sans la protection d’un adulte, il est calculé que près de 20.000 mineurs marocains entrent en Europe chaque année, chiffre comparable uniquement à la totalité des mineurs des pays d’Amérique centrale qui entrent chaque année aux États-Unis ; l’indigne Bourita ne fait pas non plus allusion à la situation de la prostitution d’enfants au Maroc, uniquement dépassée par certains pays d’Asie du sud-est ; de même, le méprisable Bourita ne cite pas dans ses communiqués que près de 13% des enfants au Maroc ne sont pas scolarisés.
En raison du chaos provoqué par les communiqués insultants et offensifs, chargés de mensonges, de menaces et de démagogie, deux choses sont moyennement claires à ce stade : le Maroc traverse une crise profonde dans tous les secteurs de la vie du pays et il essaye de chasser des fantômes en inculpant sans le moindre recul tout ce qui traverse son chemin. Dans sa croisade contre ceux qui lui offrent de l’aide, il utilise tout type d’artillerie : les contradictoires et dénigrants communiqués officiels, les soi-disant partis politiques (au Maroc il n’y a pas de partis politiques mais un jouet d’occasion aux mains du Makhzen) et l’infâme, amadouée et assujettie presse du Palais.
M.N.