Livre blanc sur la politique marocaine au Sahara Occidental
CHAPITRE III / 5ère Partie
LE MAROC ENTRE LE DROIT INTERNATIONAL ET LES MANŒUVRES POLITIQUES
Ainsi les enjeux sont énormes et le Maroc a su par des manœuvres toutes douteuses et en tout cas non conforme, ni au droit international, ni au mandat d’administrateur du territoire -dont il se prétend et dont il n’est pas titulaire- qui doivent inclure la bonne gestion et en faveur de la population des ressources naturelles du pays.
Pourtant l’Algérie a toujours évité officiellement et même médiatiquement de jouer la surenchère pour condamner officiellement les agissements du Maroc, préférant le faire dans les instances internationales et loin de la médiatisation fracassante.
Ceci n’exclut pas naturellement le droit à l’information du Peuple Algérien dans les questions dans lesquelles l’Etat est engagé. Les déclarations des responsables algériens depuis les années soixante ont été objectives et n’ont jamais revêtu un caractère odieux ou même provocateur, comme le sont très souvent, les déclarations de responsables marocains à l’égard de l’Algérie.
A titre d’exemple ce communiqué publié à l’issue d’une entrevue du Ministre des Affaires Etrangères du Maroc avec Le Secrétaire Général des Nations Unies le 15.03.2016 : Communiqué suite à la rencontre du Ministre des Affaires Etrangères avec le Secrétaire Général des Nations Unies:
«Sur Très Hautes Instructions de Sa Majesté Roi Mohammed VI — que Dieu L’assiste- le Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération, Salah Eddine Mezouar, s’est rendu, le 14 mars 2016, à New York, afin de rencontrer le Secrétaire Général des Nations Unies, Ban Ki Moon.
A cette occasion, le Ministre a remis une lettre au Secrétaire Général détaillant les protestations offidu Gouvernement marocain au sujet de ses déclarations inacceptables et de ses agissements inadmissibles durant sa récente visite dans la région.
Au cours de cet entretien, M. Mezouar a fait part au Secrétaire Général de la dénonciation ferme et du rejet total par le Royaume du Maroc, son peuple et l’ensemble de ses forces vives, de ses propos inadmissibles et de ses actions condamnables au sujet de la question du Sahara marocain, lors de sa récente visite en Algérie.
Les autorités marocaines considèrent que de tels agissements sont incompatibles avec les responsabilités et la mission de Secrétaire général qui l’astreignent à un devoir d’objectivité et d’impartialité et au respect du référentiel établi par les organes de l’ONU.
Il a été rappelé en particulier à Ban Ki Moon que le terme «occupation» utilisé pour qualifier la présence du Maroc dans son Sahara est une ineptie juridique et une erreur politique grave. En effet, aucune résolution du Conseil de Sécurité n’a utilisé une telle terminologie.
L’emploi de cette référence constitue ainsi une insulte au peuple marocain et à une Nation qui a consenti de lourds sacrifices pour recouvrer progressivement son indépendance et défendre son intégrité territoriale.
De même, le recours au référendum évoqué pour résoudre ce différend régional a été balayé par l’histoire et écarté par le Conseil de Sécurité. Depuis 2004, le Conseil plaide exclusivement pour la recherche d’une solution politique négociée, sur la base «du réalisme et de l’esprit de compromis».
Les tentatives inacceptables de travestir le statut de la zone à l’est du dispositif de défense, ainsi que le traitement sélectif et l’attitude complaisante à l’égard de la situation humanitaire dans les camps de Tindouf ont été également évoquées.
Lors de la réunion, M. Mezouar a réitéré l’urgence pour le Secrétaire Général de ne pas verser dans les tentatives dévoilées et visant à s’attaquer à l’initiative marocaine d’autonomie qui garde toute sa prééminence dans les résolutions du conseil de sécurité. Il lui a été demandé de clarifier publiquement ses positions pour restaurer un climat de confiance et de respect mutuel.
Or, au lieu de respecter les engagements exprimés lors de cette réunion, le communiqué publié par le secrétariat général rajoute à l’offense initiale, un nouvel outrage au peuple marocain qui n’avait fait qu’exprimer spontanément son rejet face à tant de dérapages et d’irresponsabilités.
Le Royaume du Maroc s’indigne de voir le Secrétaire Général contester le droit légitime et démocratique d’un peuple et de ses forces vives, à exprimer librement ses opinions et ses réactions.
En quoi l’exercice d’un droit individuel et collectif consacré par la constitution marocaine constituerait-il une offense à la personne du secrétaire général, surtout lorsqu’il s’agit d’une réaction fondée à des propos et des actes qui touchent profondément chaque citoyen marocain du nord au sud ?
Comment peut-on à ce niveau de responsabilité réduire l’Organisation dos Nations Unies à l’affect personnel du secrétaire général ?
En conséquence et face à cette dérive dangereuse, le Gouvernement du Royaume du Maroc a décidé les mesures immédiates suivantes :
Une réduction significative, dans les jours qui viennent, d’une grande partie de la composante civile et plus particulièrement le segment politique de la M1NURSO ;
L’annulation de la contribution volontaire qu’accorde le Maroc au fonctionnement de la MINURSO ;
L’examen des modalités de retrait des contingents marocains engagés dans les Opérations de Maintien de la Paix.
Le Royaume du Maroc se réserve le droit légitime de recourir à d’autres mesures, qu’il pourrait être amené à prendre, pour défendre, dans le strict respect de la Charte des Nations Unies, ses intérêts supérieurs, sa souveraineté et son intégrité territoriale ».
Bien au contraire des responsables algériens en cours d’exercice ou placés dans certaines institutions internationales ne sont pas ménagés et de façon virulente chaque fois que dans leurs fonctions et dans ces institutions ils abordent les questions dans lesquelles le Maroc est impliqué de façon frappante, pour la simple raison qu’ils sont algériens.
L’on pourrait croire que de tous ces développements se dessine en filigrane un conflit d’intérêts entre deux antagonistes seulement qui essayent chacun de son côté de consolider une position qui ferait de lui un leader dans la région et donc il s’agirait, comme l’affirment certains (très intéressés et qui ne veulent que consolider des influences qu’ils ont déjà mais qu’ils voudraient voir poussées très loin en termes de zone d’influence ou de «chasse gardée) :L’Algérie et le Maroc. Il s’agit là d’une simple réaction néocoloniale qui est admise d’un côté et rejetée sans équivoque de l’autre.
Revisiter l’histoire, comme a essayé de le faire ce livre, même partiellement et en survol, démontre de la façon la plus claire et la plus évidente, que le Maroc a une tendance maladive à l’expansionnisme même s’il doit commettre des actes contre-nature comme endosser l’habit ou plutôt la carapace coloniale, lui qui a connu les colonisations et les a subites.
Il l’a fait sans équivoque puisque, pour s’étendre, il n’a pas hésité et délibérément à devenir colonisateur et bafouer des principes intangibles que toute la Société Internationale admet et qu’elle a intégré dans les grands principes fondamentaux qui dirigent son action et parmi ces principes le «droit des Peuples à disposer d’eux-mêmes», et donc mettre fin à des situations dont l’Humanité a honte : la colonisation. Elle l’a fait également pour l’esclavage.
Le Maroc a, sans vergogne, décidé d’envahir le territoire d’un peuple que la Société Internationale devait conduire à bon port c’est-à-dire à son émancipation. Le Maroc avait ce devoir, il ne s’en est pas acquitté, bien au contraire.
Arguant d’une lecture partielle de l’avis de la Cour Internationale reconnaissant des «liens juridiques» sans plus.
Mais comme l’acte était prémédité, et nécessitait une certaine couverture juridique, l’acte d’envahir ne pouvait en aucun cas être compris comme «une récupération de bien spolié».
Même si c’était le cas, le Maroc n’était pas qualifié pour se faire justice lui-même. L’ONU dépositaire de la souveraineté sur les «territoires non autonomes» était seule en droit pour «rendre justice au Maroc», s’il fallait qu’on lui rende justice!!
Malheureusement, le Maroc a continué dans la voie de l’illégalité en se comportant non «en administrateur en droit» mais en propriétaire d’un bien dont ni la possession ni la propriété ne lui étaient dévolues par des voies légales, la seule voie légale étant celle de l’ONU qui avait la charge de considérer l’avis consultatif de la Cour Internationale de Justice et agir en conséquence.
Jouant sur une interprétation erronée de l’avis de la Cour, le Maroc a non seulement envahi, le territoire du Sahara Occidental mais a procédé à sa partition avec la Mauritanie qui devint complice d’un forfait commis contre les organes de l’Onu.
Quand la Mauritanie s’est retirée, en assurant qu’elle n’avait aucune revendication sur le territoire du Sahara occidental, le mal était fait et le Maroc se trouva en position de conquérant et devant un «pays ouvert à toutes les déprédations et abandonné au pillage», pillage qui dure depuis des décennies.
Ainsi commence une série sans fin d’actes répréhensibles que la Société Internationale a condamnés, certes, mais sans prendre les mesures de droit que lui impose le comportement du Maroc qui agit ainsi impunément au vu et au su des institutions internationales toutes compétences confondues.
Ne pouvant pas ignorer le POLISARIO et sa lutte pour l’indépendance de son pays, le Maroc s’en accommode tant bien que mal et décide une nouvelle partition en accordant au POLISARIO une petite partie du territoire et construit un mur «pour protéger sa conquête».
N’y-a-il pas là une similitude avec les barrages électrifiés des frontières EST et OUEST en Algérie pendant la guerre de libération nationale ? bien sur l’exemple est donné par la France, un colonisateur qui souffle la «solution» à un autre colonisateur nouveau venu qu’est le Maroc!!!
À partir de là, le Maroc va mettre sur pied toute une stratégie pour conserver sa conquête et mettre le monde devant le fait accompli.
Prenant conscience des véritables desseins qui animent le monde contemporain, qui ne sont aucunement innocents et qui ne diffèrent en rien de ceux qui dominaient au Moyen-âge, le Maroc va essayer d’inscrire le Sahara Occidental dans la mouvance de l’économie et de la stratégie internationale qui s’articulent autour des entreprises et des stratégies de défense (qui sont en réalité des stratégies d’agression).
Ainsi est ressuscitée la doctrine du «monde libre» qui rejoint la doctrine de la colonisation du Moyen Age dont le symbole est «sus au profit et «sus à l’ennemi».
Ainsi le Maroc trouve l’ancrage de sa doctrine impériale…pour cela il a réussi, par divers moyens pas toujours orthodoxes, à inscrire le Sahara Occidental dans la mouvance des intérêts économiques et stratégiques en se mettant carrément au service de ces appétits, ce qui se traduit par des positions équivoques qui réalisent les objectifs marocains pour être présent au Sahara Occidental, en étant le gardien docile des intérêts et des convoitises qu’il a créées pour se maintenir envers et même si pour cela il doit adopter, selon les circonstances, un profil bas ou un ton souvent effronté et même provocateur.
Comme il est connu que les entreprises installées au Sahara Occidental sont protégées par leurs Etats, ces derniers ont un double langage : celui de s’en tenir, pour la plupart, aux résolutions internationales en reconnaissent ainsi le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et celui de faire du Maroc un paravent pour réaliser leurs desseins!!
Et ainsi, par l’intermédiaire du Maroc ils protègent leurs intérêts et continuent à dilapider les richesses du pays. Il n’y a qu’à lire certaines lettres du Maroc au Conseil de Sécurité et les réponses de certains politiciens et responsables européens et notamment français pour s’en convaincre.
Ces comportements coloniaux et néocolonialistes ne s’effacent pas facilement des mentalités et elles peuvent ressurgir sous d’autres formes surtout si des intérêts économiques ou géostratégiques sont en jeu.
C’est ce qui explique que certains problèmes pourtant simples se compliquent au fil des jours et notamment quand des interférences sont créées par des acteurs influents qui apparemment ne sont pas concernés. Mais en fait ils sont concernés dès le moment où leurs intérêts sont en jeu.
L’instinct colonial se met immédiatement en branle et l’on fait immédiatement la différence entre les positions officielles et do principe et les agissements et comportements qui, en coulisse, se déroulent dans le sens des appétits coloniaux non apaisés par l’évolution du monde et les changements opérés depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale.
Il y a, dans ce domaine des attitudes que la morale, avant le droit, reprouve.
C’est entre autres, la haine et le ressentiment qu’on éprouve après une défaite. Le colonialisme a été bel et bien vaincu en Afrique par différents moyens mais il a été défait…cela ne peut laisser les vaincus indifférents.
C’est pourquoi ils feront tout pour maintenir une présence quelle qu’elle soit dans «leur domaine», ou au moins y maintenir une certaine influence.
C’est le cas particulièrement de la France, de l’Espagne et de la Grande Bretagne. Ce qui se passe depuis des décennies en Afrique sub-saharienne est là !
Le cas de l’Algérie est très révélateur dans la politique française tout particulièrement et le Maroc va servir de support à tout un travail d’encerclement autour des frontières de l’Algérie, qui doit payer sa victoire en 1962.
L’Algérie, parce qu’elle a fait cavalier seul, dans sa lutte de libération nationale avec la défection des voisins, défection qui date de 1924/26, quand l’Algérie proposait une lutte commune et quand on arguât d’une différence de statut (l’Algérie était une colonie, alors que la Tunisie et le Maroc étaient des Etats sous protectorat).
Cet argument prit le dessus et l’Algérie mena sa lutte avec les moyens de bord, alors que les voisins prirent la tendance plus conciliante.
En Algérie c’était la guerre à outrance et chez nos voisins le travail était plus diplomatique et devait aboutir à la fin des protectorats avec les développements qu’on sait. Mais l’appétit de l’expansion n’a jamais quitté la pensée des tenants du pouvoir au Maroc.
Dès la publication de la fameuse carte du «Grand Maroc» par Allal el Fasi en 1956, la machine infernale s’est mise en marche contre des pays qui ont chèrement payé leur indépendance et l’Algérie en particulier.
Une allusion a été faite plus haut quant au refus marocain et tunisien d’unifier la lutte contre le colonialisme en 1924/26.
Pourtant aucun pays parmi les pays maghrébins n’a autant demandé de toutes ses forces la réalisation de l’unité maghrébine. µ
L’Algérie a fait de cette aspiration une constante depuis la naissance de son mouvement d’émancipation au début du siècle dernier et elle ne s’en est pas départie…
Certes l’Algérie, bénéficia d’une aide salutaire de ses voisins dès leurs indépendances acquises. Elle ne l’a jamais nié et elle loue à chaque occasion cet élan fraternel de ses voisins et exprime toujours sa gratitude à tous les gouvernements et les peuples qui l’ont aidée.
Mais si la Tunisie s’est comportée dignement avec l’Algérie depuis la guerre de libération et n’a jamais failli, pour le Maroc se fut une toute autre chose!!! Il y a cette idée fixe d’expansionnisme et de «reconstitution d’un empire éphémère».
L’Algérie n’en a jamais fait cas et ne s’est jamais immiscée dans des problèmes qu’elle considérait comme essentiellement marocains et qui ne la concernaient que quand il s’agissait de son intégrité territoriale.
Que cette idée d’union maghrébine ait pu trouver un début de concrétisation c’est un fait indéniable, mais les volontés chez les partenaires de l’Algérie n’ont jamais été dénuées de calculs politiques ou de plans préétablis ailleurs et particulièrement en France.
L’Algérie, dans cette approche n’a jamais préconisé l’union dans un but d’hégémonie ou d’exportation d’un modèle de développement économique ou politique.
Les déclarations des responsables algériens depuis l’indépendance en font foi. Mais l’Algérie se base sur des similitudes qui existent entre les peuples de la région pour essayer de créer avec l’accord et l’apport de tous, d’un groupement régional fort qui pourrait déjouer toutes les tentatives de l’ex colonisateur de reprendre pieds dans nos pays.
Que le Sahara Occidental ait été inclus dans cette construction cela allait de soi, puisque la Mauritanie y a été admise.
Mais la France, tous régimes confondus et toutes tendances politiques et particulièrement socialiste depuis le Président Mitterrand (qui se considère comme le grand vaincu de la Guerre d’Algérie, (il était ministre de l’intérieur en 1954 et il déclara «la France est en Algérie chez elle et elle y restera!» l’histoire l’a démenti), a tissé autour de l’Algérie tout un dispositif d’encerclement qui lui a permis d’assurer une présence effective et agissante sur le terrain autour des frontières algériennes, présence qui est maintenant honnie par les peuples africains.
Faut-il consulter une carte de cette présence militaire et économique pour s’en convaincre ? C’est tout naturellement que le Maroc y trouve son compte surtout depuis qu’il a fait du Sahara Occidental le point central de sa politique dans le monde, fort, ainsi, du soutien français et américain.
Pourtant l’Algérie n’a pas cessé de rappeler aux marocains leurs engagements quant au problème sahraoui. Dès 1966, quand la quatrième commission de l’ONU a décidé de suivre ce problème dans le cadre de l’application de la résolution 1514 de 1960, depuis cette date l’Algérie s’est engagé à soutenir le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Le Maroc lui-même avait souscrit à cette résolution non sans faire part de sa certitude que le Peuple Sahraoui choisirait de réintégrer la «mère patrie».
L’Algérie ne s’en était pas offusquée dès le moment où la consultation populaire serait équitable. Quand les desseins de l’Espagne, puissance coloniale du moment commençaient à se dessiner, un sommet Algéro-marocain fut réuni à Tlemcen en 1970 et le communiqué commun, publié à l’issue de ce sommet, réitérait l’engagement marocain de suivre le processus de l’autodétermination jusque au bout.
Jusqu’en 1974 et à toutes les réunions ou sommets bilatéraux ou tripartites, et même lors de rencontres dans le cadre de l’OUA ou de la ligue des Etats arabes, il a été rappelé au Maroc ses engagements de permettre la mise en place des procédures de la libre consultation populaire des sahraouis.
Ainsi à Nouadhibou, à Rabat et à Alger, le roi du Maroc, est resté sur ces mêmes positions même si à chaque fois il assurait, à qui voulait l’entendre, qu’il avait confiance que le Peuple sahraoui rejoindrait «la mère patrie», ce que l’Algérie ne lui a jamais contesté a la seule condition que la consultation soit libre et que le peuple sahraoui soit en mesure d’exprimer librement son choix.
A suivre …