Mustapha Zebdi, président de l’APOCE : « il faut revoir tout notre système de régulation des prix »
Alors que le porte-monnaie du citoyen algérien avait déjà du mal à joindre les deux bouts durant les mois écoulés, Ramadhan est venu et les prix de tous les produits, nécessaires ou non, de consommation courante ou non, ont connu des hausses très importantes qui ont fini par lui donner le coup de grâce. A défaut d’une communication officielle suffisante, encore moins d’une prise en charge réelle des problèmes de commercialisation à travers l’ensemble du territoire national, l’algérien se nourrit de rumeurs et des ‘on-dit’. Quant à la plupart des commerçants, peut-être assurés d’une impunité réelle ou supposée, ils augmentent les prix des produits qu’ils vendent sans aucune retenue ni crainte.
Pour connaitre quelques causes de ces hausses inconsidérées des prix des produits de consommation courante, La Patrie News a contacté M. Mustpha Zebdi, président de l’Association de Protection et d’Orientation du Consommateur et son Environnement (APOCE), qui a bien voulu nous entretenir de cette situation et présenter quelques solutions pour arriver à une stabilité des prix qui tiendrait compte du pouvoir d’achat des ménages algériens.
Questionné sur les causes de l’instabilité des prix des produits de consommation courante ou non en Algérie, M. Zebdi estime qu’il : « faudrait revoir tout notre système de régulation car il s’est avéré pas très efficace, affiner les textes et les règlementations et trouver d’autres mécanismes pour la stabilité des prix et pour assurer la disponibilité des produits ». Concernant la pénurie de l’huile de table, le président de l’APOCE affirme que : « l’huile de table n’est pas disponible sur le marché vu que la demande et l’achat sont plus importants que la production. Les informations qui sont en notre possession disent que les raffineries ont doublé leur production, certes, mais, de l’autre côté, le consommateur a aussi doublé ou triplé ses achats d’huile de table et ce, par peur de pénurie. Ainsi, tout le surplus produit est aussitôt acheté par les ménages, et c’est pour cela que cette tension demeurera jusqu’à ce que les ménages se contentent d’acquérir leurs besoins uniquement ».
Abordant la rareté du lait en sachet, M. Zebdi rappelle : « qu’un facteur important et déterminant est venu s’ajouter à tous ceux qui existaient auparavant, ce facteur a trait au nombre de point de vente qui est devenu très, très réduit. Alors qu’auparavant, il y avait plusieurs points de vente dans une commune mais, actuellement, il n’en reste que très peu à cause du gain minime généré par la vente du lait en sachet, ce qui fait que les commerçants refusent de vendre le lait. Le distributeur se contente d’approvisionner un ou deux points de vente, ce qui cause un afflux important de clients à ces niveaux ».
Pour la pomme de terre, notre interlocuteur rappelle qu’il y a un manque de production dû à plusieurs facteurs, dont le manque de semence, le cout élevé des intrants, des engrais, de main-d’œuvre, etc… Ce sont donc tous ces facteurs qui ont dissuadé les agriculteurs d’investir dans le créneau de la pomme de terre et a induit un manque de production qui a empêché de couvrir les besoins, notamment en arrière-saison ». Pour les prix qui ont atteint 130 DA le kilogramme, le président de l’APOCE indique que ce sont les hausses des prix des semences, des intrants ou de la main-d’œuvre et : « il ne faut plus s’attendre à une pomme de terre au-dessous de 60 DA le kilo », a-t-il précisé.
Pour ce qui est des prix des autres produits, notamment ceux importés, M. Zebdi relève que : « les prix de nombreux produits ont connu des hausses importantes sur le marché mondial, ainsi que le cout du transport, et ils se sont répercutés sur ceux pratiqués en Algérie ».
La vente de la baguette de pain normal à plus de 10 DA (prix officiel 8,50 DA) constitue une infraction de la part des boulangeries qui la pratiquent : « le prix réglementé du pain ordinaire est de 8,50 DA, le surplus de 1,50 DA est toléré pour plusieurs raisons, mais, au-delà de 10 DA la baguette de pain, c’est une infraction pour laquelle le boulanger devrait faire l’objet d’un PV. Les citoyens qui se voient proposer du pain ordinaire à plus de 10 DA doivent signaler cela à l’APOCE et nous saisissons les instances concernées pour intervenir. En outre, le boulanger doit toujours avoir du pain ordinaire sur ses étals et ne pas en produire une toute petite quantité pour obliger les clients à acheter du pain ‘amélioré’ à des prix exorbitants. Si le boulanger ne produit que du pain amélioré, la règlementation l’oblige à le vendre au prix du pain ordinaire », a encore déclaré notre interlocuteur.
Enfin, M. Mustapha Zebdi rappelle que l’APOCE a toujours préconisé des solutions à ces problèmes et qu’elle les a transmises à qui de droit, certaines ont été prises en compte, d’autres non.
Tahar Mansour