Non, le célèbre journal britannique de droite The Daily ne tombera jamais entre les mais de la famille Ben Zayed, régnant sur les Emirats Arabes Unis.
Ce journal de droite, comme toute la presse papier dans le monde, subit une crise financière aigüe, ce qui le fragilise, et aiguise les appétais des « prédateurs financiers ». Une OPA (offre publique d’achat) a ainsi été lancée en direction de ce journal par les Emirats. Londres a réagi à cette offensive avec rapidité et efficacité. Le vice-président des Emirats arabes unis (EAU) ne pourra donc pas prendre le contrôle du Daily Telegraph, ce grand quotidien britannique de droite.
Le gouvernement britannique a annoncé qu’il allait déposer un amendement législatif pour interdire toute acquisition d’un journal ou d’un magazine par un « Etat étranger », y compris les « agents de gouvernements étrangers qui opèrent à titre privé ».
Cette définition particulièrement précise vise le cheikh Mansour Ben Zayed, de la famille régnante d’Abou Dabi, et vice-président des EAU, qui a lancé une offre sur le quotidien en novembre 2023.
« L’acquisition d’une entreprise de presse britannique par des Etats étrangers risque d’éroder la confiance [des lecteurs], explique Stephen Parkinson, sous-secrétaire d’Etat à la culture et aux médias du Royaume-Uni. Tous les Etats étrangers ont leurs propres intérêts, ce qui est tout à fait compréhensible, et ceux-ci ne sont pas nécessairement compatibles avec les intérêts britanniques. »
La décision met un terme à des mois de controverse autour de la vente du Daily Telegraph, qui est au paysage médiatique britannique ce que Le Figaro (également de droite) est à la France. La famille Barclay, qui le possédait depuis 2004, frôle la faillite et a fait défaut sur une partie de ses dettes.
A l’été 2023, sa banque créditrice, Lloyds Banking Group, a décidé de saisir le journal, ainsi que l’hebdomadaire The Spectator, lui aussi très influent dans les milieux conservateurs, et les a mis en vente. En décembre 2023, la banque a accepté une offre faite conjointement par IMI, un fonds privé mais possédé par le cheikh Mansour (par ailleurs propriétaire de l’équipe de football Manchester City), et RedBird, un fonds de capital-investissement américain dirigé par l’ancien patron de CNN, Jeff Zucker. IMI possède 75 % de la joint-venture.
Cette vente-achat, empêchée in extrémis, donne les pleines mesures des limites de la démocratie débridée adossée à un libéralisme froid et inhumain.
Wassim Benrabah