Pass vaccinal, cherté des prix, enseignants contractuels : les Marocains en colère contre le makhzen
Au Maroc, la grogne populaire gagne du terrain. Il ne se passe pas une semaine sans que des manifestations ne soient organisées un peu partout dans le pays. Leurs vidéos, quant à elles, sont publiées, presque tous les jours, sur les réseaux sociaux.
Les raisons de la colère des Marocains sont multiples. A commencer par l’instauration d’un pass vaccinal pour accéder à plusieurs endroits, à l’instar des cafés et des restaurants, qui a énervé jusqu’à dans la sphère politique. Sur ce point, le makhzen a opéré un virage à 180° revenant ainsi sur une décision exprimée publiquement par Mohammed VI assurant le caractère « facultatif » de la vaccination contre le coronavirus.
Ce n’est plus le cas en toute évidence. Et pour cause, le Maroc traverse une situation économique difficile. Malgré sa tentative de rouvrir ses frontières aux touristes vaccinés, ces derniers semblent, bel et bien, le bouder. Du coup, il faut leur donner plus de garanties quitte à prendre des décisions impopulaires.
Face à la presse, le porte-parole du gouvernement marocain, Mustapha Baitas, a ouvertement évoqué « la préservation de l’économie ». « Nous avons imposé le pass vaccinal pour ne pas aller vers un nouveau confinement », a-t-il déclaré hier jeudi.
Malgré ses explications, le gouvernement marocain est sous le feu des critiques des politiques, des sujets et de la presse- faute de pouvoir s’en prendre directement au palais royal. C’est le cas de Nabila Mounib, députée et présidente du Parti socialiste unifié (PSU), qui ne décolère pas, depuis qu’elle a été interdite d’accès au siège du parlement du fait qu’elle ne soit pas vaccinée.
Lors d’une conférence de presse qu’elle a organisée jeudi, celle qui rêvait de devenir la première femme, à qui échoit la primature, a vertement taclé Aziz Akhannouch, Premier ministre et ami personnel du roi marocain.
Les anti-vaccins ne sont pas les seuls à investir l’espace médiatique et les rues des villes du voisin de l’ouest, les enseignants contractuels le font depuis des mois. Bien que leur mouvement n’ait pas faibli, le makhzen ne veut toujours pas satisfaire leurs revendications. Au contraire, ils sont souvent brutalisés par la police, notamment à Rabat et Casablanca.
La même brutalité a caractérisé, à ce titre, les rassemblements hostiles au pass vaccinal. Dans un communiqué, le Syndicat national de la presse marocaine (SNPM) a dénoncé des violences policières contre des journalistes ayant tenté de couvrir les protestations des anti-vaccins.
Le SNPM a appelé, dans ce contexte, le ministère marocain de l’Intérieur à ouvrir une enquête pour déterminer les responsabilités. Il a également appelé le gouvernement à prendre plus de dispositions qui permettent aux journalistes d’exercer leur métier en toute quiétude. Son appel ne risque pas d’être entendu de sitôt.
Ailleurs dans le royaume de Mohammed VI, la situation n’inspire guère confiance à ses sujets. Cette fois, en raison des prix des produits de première nécessité qui ne cessent de flamber. Dans la rue comme sur les réseaux sociaux, c’est le mécontentement général.
Au lieu d’y remédier, le gouvernement d’Akhannouch explique les hausses par une conjoncture internationale défavorable. C’est en tout cas ce qu’ont tenté de faire avaler aux Marocains le porte-parole du gouvernement et Faouzi Lekjaâ, le ministre délégué chargé du Budget. Le même qui a tenté vainement de délocaliser le match Djibouti / Algérie à Marrakech…
Yanis Younsi