Pr. Réda Djidjik à la Patrie news : « La création de la faculté de pharmacie est une excellente décision »
Le Professeur Réda Djidjik, chef de service immunologie du CHU Béni-Messous a été nommé doyen de la Faculté de pharmacie, inaugurée jeudi 11 novembre par le ministre de l’Enseignement supérieur et la Recherche scientifique, Abdelbaki Benziane. Dans cette interview, il expose les objectifs assignés à cet établissement. Il fait le point aussi sur l’épidémie au Covid-19. Il alerte sur les risques de la quatrième vague, potentiellement violente, si la proportion des antivax demeure importantes.
La Patrie news : Vous êtes doyen de la faculté de pharmacie, inaugurée il y a quelques jours. Que va-t-il changer exactement dans la formation des futurs docteurs en pharmacie ?
Professeur Réda Djidjik : Transformer le département de pharmacie en une faculté est une excellente décision. Je tiens à remercier toutes les personnes qui sont intervenues pour avoir cet acquis. Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a cru en ce projet, porté par tous les enseignants de pharmacie à Alger.
A vrai dire, c’est une renaissance de cet enseignement, qui remonte à 1857. Cette année-là a été créée l’école de pharmacie, laquelle a formé, avec l’école de médecine en 1909 à l’université d’Alger, la faculté mixte des sciences médicales. Interrompues en 1962 à cause de l’attentat qui a ravagé la structure et détruit totalement sa bibliothèque, les études en pharmacie ont repris en 1963. L’école a été dissoute, au début des années 70 au gré des réformes qui ont abouti à la création d’instituts de sciences médicales. Ces derniers ont été regroupés, ensuite, en un Institut national des sciences médicales. En 2000, la pharmacie a été intégrée, en tant que département, à la faculté de médecine.
Il fallait militer pendant 21 ans pour vivre une renaissance de cette faculté de pharmacie. Ce nouveau statut lui confère une autonomie budgétaire et pédagogique. C’est très important. Cela nous permet de renforcer le cursus classique de docteur en pharmacie et créer de nouveaux parcours de formation. La faculté sera ouverte aux jeunes algériens, qui seront formés aux métiers du médicament et aux sciences connexes. Par ailleurs, ces dernières années ont connu un essor de l’industrie pharmaceutique. Un département ministériel lui a été dédié. Il est tout-à-fait logique de créer une faculté de pharmacie, qui sera adossée à cette industrie et qui formera la ressource humaine dont elle a besoin.
Actuellement, l’industrie pharmaceutique emploie des pharmaciens généralistes, car la spécialité n’existe pas dans le cursus universitaire. Sera-t-elle développée ?
Le pharmacien est un métier réglementé. Il est le garant du bon usage du médicament. Dans l’industrie pharmaceutique, on trouve tous les métiers du pharmacien (principes actifs, formulation, règlementation…). Il s’agit de compléter la formation du pharmacien en lui donnant les aptitudes requises. Nous allons établir un référentiel des métiers de cette industrie et déterminer les priorités de la formation à toutes ses phases.
Dix-sept spécialités sont ouvertes en résidanat. Est-il envisageable de proposer davantage ?
Le résidanat inclus 5 spécialités biologiques et 12 en pharmacie. Il faut certes consolider la proactivité de ces disciplines et probablement ouvrir de nouveaux parcours de formation. Je pense à des licences professionnelles pour des auxiliaires en pharmacies d’officine (préparateurs, vendeurs…) et certains masters spécialisés dans la biothérapie, les biosimilaires et les bio-médicaments.
Avez-vous fixé une échéance à la concrétisation de ces objectifs ?
Je serai franc avec vous : nous ne pourrons pas tout faire, rapidement, bien que nous ayons un potentiel au niveau de la faculté de pharmacie : 280 enseignants, 3000 étudiants en graduation et 500 en post-graduation. A la rentrée universitaire 2022-2023, nous comptons ouvrir un département de pharmacie industrielle.
Vous êtes chef de service immunologie. Pouvez-vous nous faire le point sur la situation sanitaire ?
Vous me donnez l’occasion de transmettre un message : nous observons une accalmie dans l’épidémie à la covid-19, mais partout dans le monde, des milliers de contaminations sont enregistrées chaque jour. Les pays, qui ont un taux de vaccination important s’en sortent bien, c’est-à-dire sans saturation du système de santé, moins d’hospitalisation et moins de mortalité. Là où la couverture vaccinale est plus faible, la situation est plus problématique. Le vaccin protège contre les formes graves, qui conduisent à une détresse respiratoire et à une hospitalisation. Je le dis, car nous avons un taux de vaccination très bas. Les citoyens refusent de se faire vacciner, alors que les doses sont disponibles en grandes quantités. Si par malheur, une nouvelle vague arrive en Algérie –les indicateurs sont là-, nous serons confrontés à une catastrophe sanitaire pareille à celle du mois de juillet, c’est-à-dire manque d’oxygène, manque de places dans les hôpitaux et beaucoup de décès. Il indispensable de se faire vacciner, si on veut éviter une quatrième vague.
Est-ce que les indicateurs de la quatrième vague sont visibles ?
Oui. Semaine après semaine, le nombre de patients hospitalisés augmente, même si le nombre des contaminations par 24 heures semble bon. On ne sait pas à quel moment, il y aura explosion de cas.
Propos recueillis par Soulef Biskri