SOCERCA : La disparition silencieuse d’un fleuron industriel de la céramique à Amizour
Longtemps considérée comme l’un des piliers de l’industrie du carrelage en Algérie, l’usine SOCERCA (Société de Céramique d’Amizour) incarnait l’excellence nationale dans la fabrication du grès cérame. Implantée dans la commune d’Amizour, wilaya de Béjaïa, cette entreprise publique faisait partie des usines stratégiques du pays. Sa fermeture représente une perte immense pour l’économie locale et pour l’industrie nationale de la céramique.
Une fierté industrielle régionale
À son apogée, SOCERCA comptait parmi les plus grands producteurs de carreaux de céramique en Algérie. Dotée d’un savoir-faire reconnu, elle fournissait le marché national en produits de haute qualité, résistants, esthétiques et conformes aux standards internationaux.
L’usine jouait un rôle clé dans la satisfaction des besoins en matériaux de construction, particulièrement dans les grands projets d’infrastructures.
Outre ses performances techniques, SOCERCA contribuait activement au développement économique de la région de Béjaïa. Elle offrait des centaines d’emplois directs et indirects, et participait à la dynamique industrielle de la vallée de la Soummam. Elle formait également de nombreux techniciens et ouvriers spécialisés, devenant ainsi un centre de compétences incontournable dans le secteur.
Un arrêt brutal, une perte irremplaçable
La disparition de SOCERCA s’est faite dans une relative indifférence, sans débat public ni hommage à la hauteur de son apport. En proie à des difficultés financières, à une concurrence féroce et à des choix stratégiques discutables, l’entreprise n’a pas survécu aux mutations du marché.
La fermeture de l’usine a non seulement privé la région d’une source importante d’emplois, mais elle a également brisé un écosystème économique qui gravitaient autour de l’activité industrielle de la céramique.
Les commerces locaux, les sous-traitants, les transporteurs et même les institutions de formation ont ressenti l’impact de cette disparition.
Une tentative de sauvetage qui n’a pas suffi
Il est important de rappeler que dès la fin de l’année 2010, l’usine SOCERCA faisait face à un endettement cumulé dépassant les 400 millions de dinars.
Une situation financière alarmante qui ne cessera de se détériorer au fil des années, accentuée par une concurrence de plus en plus rude du secteur privé.
Consciente de l’enjeu stratégique que représentait cette unité industrielle, l’État avait tenté une opération de sauvetage en injectant, la même année, une enveloppe de 62 millions de dinars, dans le but de réhabiliter l’outil de production et de relancer l’activité.
Mais cette initiative, en l’absence d’une véritable mise à niveau technique et structurelle, n’a malheureusement pas permis d’inverser la tendance. La spirale du déclin s’est poursuivie, menant inexorablement à l’arrêt définitif de l’usine.
Un symbole à ne pas oublier
Le cas de SOCERCA interpelle sur la nécessité de repenser la politique industrielle nationale. Faut-il laisser disparaître des entreprises historiquement stratégiques, au risque de dépendre de l’importation dans un domaine où le pays avait développé une expertise ?
La mémoire de SOCERCA mérite d’être conservée, non seulement comme témoignage d’un savoir-faire industriel, mais aussi comme le rappel d’une ambition économique aujourd’hui effacée.
Enfin, il serait légitime, dans le cadre de la relance industrielle voulue par les pouvoirs publics, de s’inspirer de l’expérience de cette société. Peut-être même de penser à une renaissance, sous une autre forme, d’un projet industriel local centré sur les matériaux de construction, pour perpétuer l’héritage de SOCERCA.
Yahia Maouchi