Souhil Meddah expert financier : “définir l’orientation du modèle de croissance”
Le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune a rassuré dimanche quant au niveau des réserves de changes s’élevant actuellement à 44 milliards USD contre 53 milliards USD fin 2019. Quelles conséquences de cette baisse ?
L’évolution du niveau des réserves de change a toujours été interceptée et interprétée comme un indicateur de performance économique, or que leur rôle actuel est d’être une soupape de compensation face au déficit de la balance des paiements d’une part. Et d’autre part, c’est l’un des moyens qui consolident la parité du dinar dans sa partie officielle et relativement artificielle, vu que la règle de l’offre et de la demande sur la monnaie locale par rapport aux autres monnaies extérieures ne s’applique pas en fonction d’échanges évolutifs, mais au contraire, il s’endosse sur des valeurs statiques qui ne bougent pas de façon significative
Il s’agit aussi, d’un constat et d’une évaluation comptable, vis-à-vis du solde restant, qui peut nous permettre dans les pires des cas, une période de sécurité exprimée en mois, sur 18 ou 12 mois, dans les pires des cas.
D’un autre côté, le niveau de la couverture des réserves de changes par rapport à la valeur moyenne pondérée des importations, ne signifie pas que la couverture sera effective, mais c’est tout simplement, une projection pour mesurer l’impact le plus extrême, dans le cas où les revenus n’arrivent plus ou ne produisent plus de devises étrangères.
le chef d Etat insiste sur le principe de non recours à l’endettement extérieur en vue de consolider la souveraineté de l’Algérie. Quelle sera la meilleure alternative dans la conjoncture actuelle ?
Il est clair, qu’une décision politique est souveraine et elle considère la souveraineté nationale comme un acquis que ne se négocie pas. Mais les pronostics financiers, ne s’arrentent pas aux faits ou aux décisions, les pronostics doivent aussi s’étaler sur les diverses hypothèses. Il faut entre autre définir l’orientation du modèle de croissance, le projet de relance ou de développement, la nature du besoin, la forme sous laquelle, elle la dette peut se prescrire.
Il peut s’agir d’une dette structurelle attachée à un projet ou à un ensemble de projets d’investissement en réalisation, des infrastructures qui accueilleront une demande extérieure, qui peuvent exporter leurs produits ou services, des structures nécessaires pour garantir une arrière base de développement régional, qui servira dans le long terme, la balance de paiement, en fournissant des services futurs. Ou, à contrario il peut aussi s’agir dans un cadre beaucoup plus contraignant, d’une dette destinée à couvrir une crise liquidité ou d’une situation de non-paiement.
Mais dans ce cas, il existe deux possibilités, la première qui prend acte du niveau de nos Droits de tirage Spéciaux (DTS), peut nous permettre de bénéficier relativement d’une petite rallonge de financement, le cas échéant. Mais le plus important, c’est de compter sur l’apport des IDE dans le compartiment financement et endettement de la balance des paiements, qui reste la seule issue viable, à condition que le niveau d’apport en IDE ne chute pas d’une année a une autre, par rapport aux engagements de transfert des revenus sur actifs et sur dividendes.
Les formes participatives concessionnelles d’investissement, peuvent aussi contribuer aux besoins de financement, a conditions qu’elles soient toutes destinées aux investissements qui générèrent plus de 70% de leurs chiffres d’affaires en exportation, ou qui limitent les importations à hauteur d’une valeur égale ou proche des 90% sur le cout des investissement, sur une période moyenne de 7 ans.
La pandémie sévit toujours. Comment voyez-vous la reprise économique en Algérie ?
Durant les derniers mois, nous assistons à quelques reprises sous plusieurs formes, soit en K, c’est-à-dire des activités qui reprennent contre d’autres qui chutent, ou en W, avec des reprises, suivies des chutes avant de reprendre. Mais dans tous les cas de figures, nous assistons à des activités qui progressent vite ou qui naissent dans quelques régions, comme la logistique et transport sur ventes en ligne et livraisons à domicile, d’autres activités qui changent.
Mais les effets de la pandémie, ne peuvent pas s’absorber, sans l’intervention de l’Etat, en misant sur une politique budgétaire orientée vers les équipements, pour garantir une montée relative vers le plein emploi, afin de reprendre le niveau de la période d’avant pandémie.
La politique monétaire, peut intervenir en deux phases. La premier ou fournissant plus de financement, même avec le financement non conventionnel, qui peut être absorbé après sur le marché secondaire par les banques de second rang, suivant les pratiques de l’open market. Ensuite, la Banque d’Algérie, doit miser sur un taux directeur réduit, proche du zéro, un taux généralisée, sur la plateforme de refinancement, afin de permettre un financement a moindre couts pour tous les agents économiques, loin des pratiques sélectives du taux bonifié.
Entretien réalisé par Yacine Bouali