Un analyste indien explique le caractère belliqueux de Rabat : Phosphate et nerf de la guerre
Vijay Prashad est un historien, éditeur et journaliste indien. Il est un écrivain et rédacteur chef de la publication Globetrotter.
Dans un article très dense, il a tenté ne explication au conflit qui mine le nord-ouest de l’Afrique depuis la marche verte de Hassan II en 1975. De façon didactique et très simple, il y retrace un historique succinct de ce conflit, avant d’arriver à cette première tournée de Staffan de Mistura, envoyé spécial du SG de l’ONU dans le Sahara Occident.
Il rappelle au passage tous les envoyés spéciaux, dont le poids n’était pas moindre, à l’exemple de James Baker, ancien secrétaire d’Etat US et Horst Köhler, ancien président allemand. S’ils ont tous fini par jeter l’éponge, ils ne s’en sont pas moins rangés du côté du Polisario, se rendant compte que le blocage vient du Maroc, que celui-ci refuse tout règlement légal de ce conflit, conformément au droit international, et aux résolutions onusiennes abondant dans ce sens.
Vijay Prashad, dans son analyse, rappelle le deal du siècle, venu (accord d’Abraam) compliquer la donne, sans que le Maroc n’obtienne rien de concret en échange de sa trahison.
Or, le nœud du problème doit résider dans les dividendes sonnants et trébuchants que tire Rabat de son occupation illégale du Sahara Occidental. Les réserves de phosphate sur lesquels il est illégalement assis, sont en effet les plus importantes du monde.
Cela sans oublier le fait que les côtes sahraouies comptent parmi les plus poissonneuses du monde. Au reste, rappelle-t-il encore, la cour de justice européenne a conclu au mois de septembre passé à l’illégalité de l’extension au Sahara Occidental de ses accords conclus avec l’UE, allant même jusqu’à considérer que le Polisario est le seul interlocuteur et représentant légitime du peuple sahraoui.
« Fin novembre 2021, le gouvernement marocain a annoncé qu’il avait gagné 6,45 milliards de dollars grâce à l’exportation de phosphate du royaume et du territoire occupé du Sahara occidental. Si vous additionnez les réserves de phosphate dans toute cette région, il s’élève à 72 pour cent des réserves totales de phosphate dans le monde (le deuxième pourcentage le plus élevé de ces réserves se trouvent en Chine, qui en possède environ 6 %). Phosphate, le long avec de l’azote, fait de l’engrais de synthèse, élément clé de l’alimentation moderne production. Alors que l’azote est récupérable de l’air, les phosphates, présents dans le sol, sont une réserve finie. Cela donne au Maroc une mainmise sur l’alimentation mondiale production. Il ne fait aucun doute que l’occupation du Sahara occidental n’est pas simplement sur la fierté nationale, mais il s’agit en grande partie de la présence d’un vaste nombre de ressources, notamment les phosphates, que l’on peut trouver dans territoire ».
Pas besoin de chercher midi à 14 heures, ou des explications autrement plus alambiquées. Le Conseil de sécurité de l’ONU a en effet conclu que « si de nouvelles activités d’exploration et d’exploitation devaient être opérées au mépris des intérêts et des souhaits du peuple du Sahara occidental, ils violeraient les principes du droit international loi applicable aux activités liées aux ressources minérales dans les pays non autonomes (comme l’est en effet le Sahara Occidental aux yeux de l’ONU et du droit international) ».
Il faut ajouter à cela le fait que le Maroc a énormément misé sur les énergies renouvelables, lui qui a accueilli l’avant dernier COP. Or, là encore, c’est au Sahara Occidental, illégalement occupé, qu’il est en train d’installer ses centrales photoélectriques.
L’enjeu est tellement important que la société productrice, propriété du roi Mohamed VI, est prête à se départir de son régime d’apartheid afin de soigner son image aux yeux du monde. Une vaste campagne médiatico-politique est même prévue à Dakhla, ville occupée sahraouie, où Mohamed VI doit se rendre dans les prochains jours, apprend-on en exclusivité. L’ex roi des pauvres, dont la vénalité excède tout entendement, ne court désormais plus qu’après l’argent, et l’appât du gain.
Triste fin pour un monarque dont l’histoire retiendra sa trahison (officielle et publique) de la Palestine, lui qui se fait appeler pompeusement « commandeur des croyants » et qui occupe le poste de président de la commission Al Qods ».
Kamel Zaidi