Un taux d’intégration de 30%, un modèle électrique et l’exportation exigés
Les constructeurs de véhicules ont leur cahier de charge
Hayet Youba
Le décret exécutif n° 22-384 fixe les conditions et les modalités d’exercice de l’activité de construction de véhicules. Il est ainsi établi que l’exercice de l’activité de construction de véhicules de tourisme et véhicules utilitaires légers est ouvert aux constructeurs propriétaires de marques de véhicules, agissant seul ou en partenariat, par la création d’une société de droit algérien. Le postulant doit répondre à un certain nombre de critères dont l’obligation d’atteindre, à compter de l’obtention de l’agrément un taux d’intégration de 10% au terme de la 2ème année, 20% à la 3ème année et 30% au terme de la 5ème année. Il devra ainsi réaliser un investissement industriel de construction de véhicules conforme aux spécifications techniques des investissements réalisés par le constructeur propriétaire de la marque. D’ailleurs, il est tenu dès le lancement de l’activité de s’approvisionner en ensembles, sous-ensembles et accessoires non encore intégrés localement qu’auprès du constructeur propriétaire de marque ou de ses fournisseurs homologués.
Chaine d’emboutissage, de soudure et de peinture, une condition
Il est tenu d’installer une chaîne d’emboutissage, de soudure et de peinture au terme de la troisième année à compter de la date d’obtention de l’agrément, ou recourir, le cas échéant, à la sous-traitance locale. Au bout de la 3ème année, il devra construire des véhicules à partir de carrosseries fabriquées localement incluant dans sa gamme de véhicules produits localement, au moins, un modèle de véhicule utilitaire léger. Le constructeur doit se conformer et ne pas produire des véhicules de tourisme équipés de moteur diesel mais prévoir, plutôt un modèle de véhicule électrique, à partir de la 5ème année. Il devra poursuivre son engagement pour une démarche industrielle opérationnelle visant à développer une intégration locale au niveau de son usine et/ou en faisant appel à la sous-traitance locale. Il sera ainsi tenu de mobiliser ses sous-traitants et ses équipementiers étrangers à s’implanter en Algérie pour la réalisation des investissements de production d’ensembles, sous-ensembles et accessoires de véhicules tout en s’engageant à ne pas substituer les ensembles, sous-ensembles et accessoires ayant fait l’objet d’intégration locale par d’autres équipements importés. Le constructeur de véhicules de tourisme et véhicules utilitaires légers devra aussi réaliser des opérations d’exportation de véhicules au terme de la 5ème année d’exercice et s’engager à assurer la disponibilité des pièces de rechange et accessoires au niveau de son réseau de distribution. Même en cas de cessation de l’activité, la disponibilité de la pièce de rechange et accessoires d’origine ou homologuée devra être garantie sur une durée minimale de 5 ans. Outre ces engagements, il faut ajouter une garantie du véhicule livré contre les défauts de construction et les vices apparents et/ou cachés doit être respectée tout autant qu’un engagement pour des campagnes de rappel, en cas de défauts de conception et de sécurité décelés sur un modèle ou un lot de véhicules. Le constructeur est tenu de disposer d’une unité de recherche, de développement et d’innovation dédiée, notamment à l’amélioration des process de production, au savoir-faire et au transfert technologique.
Une autorisation d’exercer comme préalable
Concernant la démarche à suivre pour obtenir l’agrément, l’investisseur postulant devra obtenir en premier une autorisation préalable, à l’effet de lui permettre d’accomplir les démarches pour la réalisation de son investissement. Il est clairement précisé dans le décret que l’autorisation obtenue ne constitue en aucun cas une autorisation d’exercice de l’activité. Pour obtenir l’autorisation préalable, il faut d’abord être éligible en présentant plusieurs documents dont une étude technico-économique du projet avec des prévisions chiffrées sur trois exercices d’exploitation. Il faut aussi préciser les niveaux des investissements, ceux de la production projetés ainsi que la liste des principaux ensembles, sous-ensembles et accessoires à importer par étape et ceux à fabriquer localement. Le partenariat avec un étranger doit également être clairement présenté à savoir sa forme juridique, sa durée et la répartition des actions sociales entre les parties prenantes du projet. Le taux d’intégration projeté, selon les étapes doit aussi être précisé. Plusieurs autres exigences sont à honorer aussi par exemple la réalisation des infrastructures et équipements de base de l’usine ; le plan de formation technique projeté pour la qualification du personnel ou encore le plan de formation de l’encadrement local, en matière de management industriel et de gestion des chaînes de production. Une fois toutes les conditions satisfaites, le postulant constructeur peut obtenir une autorisation préalable de 12 mois.
Des infrastructures adaptées
Mais en cas de constatation par les services du ministère chargé de l’industrie qu’aucun investissement n’est réalisé dans les vingt-quatre mois, il est procédé à l’annulation de l’autorisation préalable. Des voies de recours existent bien évidemment. Le postulant devra ensuite demander son agrément. Il devra déposer un nouveau dossier et recevra avant toute validation, des visites d’inspection afin de vérifier les infrastructures et les équipements existants. Toute réserve éventuelle formulée devra être levée dans les trente jours. L’agrément est établi en dix exemplaires originaux destinés à plusieurs institutions de l’Etat dont le premier ministère, celui de l’intérieur, du commerce, des finances, des mines ou encore des transports, de l’emploi et de l’environnement. Une fois l’agrément obtenu, il aura la possibilité d’importer « des ensembles, sous-ensembles et accessoires, en collection ou séparément sous le régime du droit commun » après l’établissement annuellement d’une fiche fixant la liste exhaustive de ses besoins par modèle de véhicule à produire. Il est aussi précisé que le constructeur de véhicules va bénéficier du régime fiscal préférentiel mais « sous réserve d’atteindre le taux d’intégration minimal de 10% fixé à l’article 5 du présent décret . Pour évaluer le taux d’intégration, une commission est désignée et cette dernière peut faire appel aux compétences de l’extérieur pour l’aider. Dans le cas de non atteinte des taux d’intégration prévus, il sera accordé au constructeur un délai supplémentaire de douze mois avec une réduction de 25% du programme pluriannuel d’approvisionnement, diminué de ses stocks importés restants, non assemblés. Si au terme du délai supplémentaire, le constructeur n’atteint pas le taux d’intégration projeté, son programme d’approvisionnement sera gelé jusqu’à la réalisation dudit taux d’intégration.
H.Y.
Lien vers le décret : https://www.joradp.dz/FTP/JO-FRANCAIS/2022/F2022076.pdf