Une vision de l’agriculture de demain en marche-Vers une Renaissance Agricole à l’Heure des Défis et de la Coopération.
« l’Algérie fait de la sécurité alimentaire un enjeu stratégique dans un monde où l’alimentation devient une arme puissante » le Président Abdelmadjid Tebboune
Par Abdelkader Reguig
L’agriculture algérienne, pilier fondamental de l’économie et de la souveraineté nationale, se trouve à un carrefour décisif. Face à une constellation de défis mondiaux et locaux, une vision audacieuse émerge : celle d’une « agriculture intensive écologique », portée par le numérique et ancrée dans la durabilité. Cette transformation, essentielle pour nourrir la nation et préserver ses ressources, s’inscrit dans un contexte de coopération internationale renforcée, notamment avec l’Italie.
« Les Défis Colossaux d’une Agriculture sous Pression »
Les agriculteurs algériens, comme leurs homologues mondiaux, naviguent en eaux troubles :
1. « L’Épuisement des Ressources Vitales » : L’eau, ressource stratégique dont l’agriculture consomme 70% globalement, est sous tension extrême (sécheresses, gestion). L’énergie fossile, cruciale pour les machines, grève les coûts et la durabilité. Solutions émergentes :Récupération des eaux pluviales, réutilisation des eaux usées, énergies renouvelables (solaire, éolien, bioénergie) intégrées aux exploitations.
2. « La Dégradation et Sous-Évaluation des Terres »: L’érosion (vent, eau), la perte de fertilité et la baisse de matière organique menacent le capital foncier. Solutions émergentes :Cultures de couverture, rotation des cultures, travail réduit ou sans labour, techniques de conservation (courbes de niveau, terrasses).
3. « Le Fossé avec le Public »: Une déconnexion croissante, surtout chez les jeunes générations, entraîne une méconnaissance des enjeux agricoles et une pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Solutions émergentes : Éducation agricole, visites de fermes, programmes jeunesse, valorisation des métiers.
4. « L’Urbanisation Galopante »: L’étalement urbain grignote les terres arables (seulement 12% des terres mondiales sont cultivables) et accentue la concurrence pour l’eau. Solutions émergentes : Politiques de préservation des terres agricoles, agriculture urbaine, jardins communautaires, diversification des économies rurales.
5. « L’Érosion des Sols » :Un phénomène naturel amplifié par les pratiques inadaptées, entraînant une perte irréversible de couche arable fertile. Solutions émergentes :Techniques de conservation renforcées (bandes enherbées, couverts végétaux permanents).
6. « La Pénurie Criante de Main-d’Œuvre »: Une population agricole vieillissante, l’exode rural et des politiques migratoires restrictives privent le secteur de bras essentiels. Défi majeur nécessitant des solutions structurelles.
7. « L’Explosion des Coûts des Intrants » :La flambée des prix des engrais (+60% entre 2024-2025) étrangle les marges des agriculteurs et limite les investissements dans l’innovation et la durabilité.
« L’Agriculture de Demain : Intensive, Écologique et Numérique »
Face à ces défis, une voie se dessine : « l’agriculture intensive écologique ». Ce concept, en apparence paradoxal, combine productivité élevée et régénération environnementale. Le numérique en est le catalyseur indispensable :
« Agriculture de Précision »: Capteurs, drones, GPS et analyse de données permettent d’optimiser chaque goutte d’eau, chaque gramme d’engrais ou de semence, sur la base des besoins précis de chaque parcelle, dépassant les limites du « bon sens paysan » seul.
« InnovationsTechniques » :
Hydroponie, aquaponie et agriculture verticale offrent des solutions pour produire plus avec moins d’espace et d’eau, notamment en périphérie urbaine.
« Modèles Durables »: L’ « agriculture biologique » et surtout la « permaculture » (privilégiant les ressources renouvelables, les interactions biodiversifiées, zéro engrais chimique, zéro déchet) gagnent du terrain comme modèles d’efficacité écologique.
« Smart Farming. et Énergies Vertes »: L’intégration de technologies intelligentes et d’énergies renouvelables permet une allocation optimale des ressources et réduit l’empreinte carbone, visant même une agriculture « captrice de carbone »
« L’Algérie et l’Italie : Un Partenariat Stratégique pour l’Agriculture de Demain »
Cette nécessaire transformation s’inscrit dans un mouvement géopolitique plus large. L’Italie, partenaire historique de l’Algérie notamment dans l’énergie, place désormais l’agriculture au cœur de sa coopération avec le pays et le continent africain, via le « Plan Mattei ».
Lors du récent « Sipsa Filaha & Agrofood » (26-29 mai 2025 à Alger), où l’Italie était invitée d’honneur, cette ambition s’est concrétisée. Luigi D’Eramo, sous-secrétaire d’État italien à l’Agriculture, a affirmé la volonté de construire avec l’Algérie « une agriculture forte et durable, dans une vision partagée de développement et d’innovation ».
Cette coopération dépasse le simple échange commercial :
« Transfert de Technologie »: Apport d’expertise italienne en agriculture de précision, gestion de l’eau, transformation agroalimentaire.
« Formation et Recherche »: Développement de compétences locales et recherche appliquée pour des solutions adaptées au contexte algérien (climat, ressources).
« Développement de Filières Durables »:Construction conjointe de filières résilientes, respectueuses de l’environnement et répondant aux besoins des marchés locaux et internationaux.
« Sécurité Alimentaire »: Renforcement mutuel de la souveraineté alimentaire dans un contexte de défis climatiques et géopolitiques.
Conclusion : Une Renaissance Nécessaire
L’agriculture algérienne ne peut plus se contenter du statu quo. Les défis – épuisement des ressources, dégradation des sols, pression urbaine, coûts, main-d’œuvre – sont immenses mais pas insurmontables. La clé réside dans l’adoption résolue d’un nouveau paradigme : « intensifier la production tout en régénérant l’environnement grâce au levier numérique et à des pratiques comme l’agriculture de précision et la permaculture. »
Le partenariat stratégique avec l’Italie, dans le cadre du Plan Mattei, offre une opportunité précieuse d’accélérer cette transition en capitalisant sur l’innovation, le transfert de savoir-faire et la construction de filières durables. L’objectif est clair : bâtir une agriculture algérienne résiliente, productive, écologique et ancrée dans son territoire, capable de nourrir la nation et de contribuer à sa prospérité pour les décennies à venir. La vision de l’agriculture de demain, à la fois intensive et écologique, est désormais en marche.
Abdelkader Reguig
Président de l’Ordre des Ingénieurs Experts Arabes (ORAREXE) Genève Suisse
E-MAIL: orarexe @gmail.com