Apaisement dans les relations algéro-françaises : les positions historiques de Tebboune
Après plus de quatre mois de tensions inédites, les relations algéro-françaises semblent se stabiliser de nouveau après un bras de fer remarquable remporté par Abdelmadjid Tebboune et la diplomatie algérienne.
L’ambassadeur Mohamed Antar Daoud a donc rejoint ce jeudi son poste à Paris rappelé en octobre dernier suite aux graves propos tenus par Emmanuel Macron a l’égard de l’Algérie.
Lors d’une rencontre tenue à l’Elysée avec de jeunes franco-algériens, le chef de l’Etat français avait accusé le système algérien de s’être bâti sur « une rente mémorielle » avant de déclarer que la « Nation algérienne n’existait pas avant la colonisation française ».
Cette sortie publique, rapportée par le journal Le Monde, avait alors provoqué une grande colère en Algérie où décision avait été prise de rappeler l’ambassadeur d’Algérie à paris et la fermeture de l’espace aérien algérien pour l’aviation française se dirigeant vers le Mali.
Dans un entretien à Der Spiegel, le chef de l’Etat algérien s’est aussi longuement exprimé sur la question affirmant que « les propos tenus avaient profondément blessé les algériens ».
Sur le sujet, Abdelmadjid Tebboune se livre à des déclarations et des positions historiques qui redonnent fierté au pays. Il annonce avoir refusé de « répondre aux appels téléphoniques de Macron « il ne s’agit pas de moi, mais d’un problème national, dit-il, aucun algérien n’acceptera que je contacte ceux qui nous ont insulté (…) on ne touche pas à l’histoire d’un peuple et on n’insulte pas les algériens ».
Abdelmadjid Tebboune enfonce ensuite le clou : à présent : « si les français veulent aller au Mali ou au Niger, ils devront faire neuf heures de vol au lieu de quatre », assène-t-il pour signifier qu’ils n’auront plus accès à l’espace aérien algérien qui permettait à l’aviation française de se joindre aux troupes françaises engagées dans l’opération Barkhane au Nord Mali.
Cette décision fait très mal aux français qui accusent alors Macron de se « laisser traiter comme un enfant qu’on punit ».
En novembre dernier, Abdelmadjid Tebboune ajoute un coup fort, il refuse l’invitation de Macron à se rendre à Paris pour prendre part à une conférence sur la Libye. Le chef de la diplomatie algérienne déclarait à ce moment qu’il représenterait le pays qui accompagne de longue date les « frères libyens dans leur processus vers la paix ».
Les positions de la diplomatie algérienne redonnent aussi au pays une grandeur qui semblait perdue.
Lors du sommet de Kigali, Ramtane Lamamra se suffit d’un salut courtois avec son homologue français qui lui n’a cessé d’appeler à l’apaisement et à une reprise du dialogue avec l’Algérie « un partenaire stratégique et incontournable dans la région ».
La fermeté des dirigeants algériens fait craindre le pire aux autorités françaises qui multiplient entre Novembre et Décembre des déclarations appelant à l’apaisement. Côté algérien, on observe alors sans commentaires.
L’Élysée s’excuse publiquement et officiellement par la voie d’un conseiller de Macron qui déclare (en Novembre dernier) que le président français « regrette les tensions nées des propos rapportés par Le Monde ».
Du bout des lèvres, le chef de la diplomatie française qualifie « d’inacceptables » les excuses présentées. Début décembre : Le Drian effectue une visite inattendue à Alger où il rencontre successivement le chef de l’Etat et le ministre des affaires étrangères.
Ses propos laissent entendre que malgré l’avancée effectuée, la situation est encore loin de s’apaiser comme il le souhaite. Il évoque la mise en place d’échanges pour la reprise d’un dialogue politique. Mohamed Antar Daoud ne rejoint son poste qu’un mois plus tard. L’Algérie va à son rythme et observe sans se presser…
Amel Zindeddine