Contribution/ Le déni du Crime colonial procède du Suprématisme occidentalo-centriste et de ses constructions mentales et sociales passées et actuelles.
(*) Par Allaoua Bendif
Le déni du Crime colonial procède du Suprématisme occidentalo-centriste et de ses constructions mentales et sociales passées et actuelles.
Le Colonialisme n’est pas un accident de l’Histoire, c’est un cheminement logique de l’impérialisme suprématiste et expansionniste Occidental dont les projections existent encore dans plusieurs déclinaisons stratégiques (dont la fameuse Alliance civilisationnelle Judéo-chrétienne (contre qui? Contre quoi?).
Cette posture occidentale suprématiste est le noyau actif de la non-reconnaissance des Crimes coloniaux, du colonialisme comme Crime contre l’Humanité. Elle est portée à son maximum dans le schéma de domination, d’oppression et de spoliation qu’impose Israël, poste avancé de l’Occident au Moyen Orient, aux Palestiniens.
Très accessoirement, la France coloniale a essayé d’instiller ce suprématisme dans certains mythes régionaux chez nous, voire certaines recherches, étonnantes de filiation diverses, avec le monde occidental et ses modes d’être.
Cela implique de lire les déclarations et donc la posture mémorielle de certaines parties françaises comme n’étant en rien fortuites et qu’elles ne sont encore et toujours que des postures et des convictions clairement et violemment négatrices
des Droits Humains, procédant d’une idéologie occidentale clairement suprématiste. Examinons ce que déclarait Victor Hugo, poète humaniste, auteur du roman de portée universelle « Les misérables » (et député de la droite française, ne l’oublions pas) à propos de l’invasion de l’Algérie par l’armée coloniale de son pays, à l’époque :
« … il faut bien s’imaginer qu’un peuple puissant et civilisé comme le NOTRE exerce par le seul fait de la supériorité de ses lumières, une influence presque invincible sur de petites peuplades à peu près barbares ; et que, pour forcer celles-ci à s’incorporer à lui, il lui suffit de pouvoir établir des rapports durables avec elles. »
En 1840 le général Thomas Bugeaud fût nommé gouverneur de la Colonie en Algérie, pour donner plus de force à l’occupation et à la domination française qui se heurtait à une résistance inattendue après la reddition du Dey d’Alger.
La conquête prend alors une autre tournure avec massacres, déportations massives des populations, rapt des femmes et des enfants utilisés comme otages, vol des récoltes et du bétail, destruction des vergers, etc.
Ces innombrables crimes permettent aux généraux de l’armée d’Afrique de se faire connaitre et de bénéficier d’importantes promotions et de faire les carrières militaires ayant fait inscrire leur nom, aujourd’hui encore, au fronton des institutions de la République française.
Examinons encore ce que ce grand poète, écrivait dans une correspondance d’encouragement et de félicitations adressée à ce général sanguinaire, auteur et donneur d’ordre d’innombrables crimes contre l’humanité : « Je crois que NOTRE conquête de l’Algérie est chose heureuse et grande, c’est la civilisation qui marche sur la Barbarie. C’est un peuple éclairé qui va trouver un peuple dans la nuit ». (Cité in Allaoua Bendif, « Violences algériennes », tome2, p. 134… à paraître incessamment).
Ce grand esprit universel qu’a été Victor Hugo ignore donc apparemment tout de qui est Ibn Khaldoun, de sa pensée, de son œuvre et de son rayonnement intellectuel universel.
A-t-il entendu parler de Scipion l’Africain ? Savait-il qui était St Augustin et d’où était-il ?
Que connaissait-il du rayonnement des Hammadites, chez lesquels les étudiants de Venise venaient à Béjaia, se perfectionner en Mathématiques et à leur tête le mathématicien Léonardo Fibonaci?
Un autre grand esprit français (mais également député de droite exprime, lui aussi une autre non moins indigne position, très peu soucieuse de Droits humains et qui démontre que le Colonialisme était assumé, encouragé et glorifié par tous.
Alexis de Tocqueville, philosophe, précurseur de la sociologie et homme politique français, chantre de l’Egalité, de la démocratie, des Libertés, des droits fondamentaux et du libéralisme, écrivait, en 1848:
« J’ai souvent entendu en France des hommes que je respecte, mais que je n’approuve pas, trouver mauvais qu’on brûlât les moissons, qu’on vidât les silos et enfin qu’on s’emparât des hommes sans armes, des femmes et des enfants. Ce sont là, suivant moi, des nécessités fâcheuses, mais auxquelles tout peuple qui voudra faire la guerre aux Arabes sera obligé de se soumettre»
Il ajoute : « Je crois que le droit de la guerre nous autorise à ravager le pays et que nous devons le faire soit en détruisant les moissons à l’époque de la récolte, soit dans tous les temps, en faisant de ces incursions rapides qu’on nomme razzias et qui ont pour objet de s’emparer des hommes et des troupeaux».
Friedrich Engels, proche de Karl Marx, théoricien révolutionnaire du communisme, a déclaré, en son temps que « la conquête de l’Algérie (par la France coloniale ndlr) est un fait important et heureux pour les progrès de la civilisation (…) , elle a déjà obligé les beys de Tunis et de Tripoli et même l’empereur du Maroc à prendre la route de la civilisation. Le bourgeois modernes avec sa civilisation, son industrie, son ordre, ses « lumières relatives » est préférable au seigneur féodal, au voleur maraudeur et à la société barbare à laquelle ils appartiennent » (opus cité).
Le docteur René Ricoux, chef des travaux de la statistique démographique et médicale du gouvernement général de la Colonie, déclara, vers 1872, que « le déclin démographiques des populations arabes et berbères était tel que ces races inférieures et surtout races dégénérées, devaient tendre à disparaitre d’une manière régulière et rapide ». (opus cité)
Cette note officielle, authentifiée d’un médecin, responsable colonial de la statistique démographique montre très clairement, par ailleurs, les desseins génocidaires de la France en Algérie conquise et occupée par la guerre et soumise par les massacres collectifs, par la famine, par la déportation, par les enfûmades collectives et par tant d’autres crimes non reconnus à ce jour.
Voila pourquoi, la grave problématique de la criminalisation du Colonialisme n’est en rien une exacerbation passionnelle des relations entre la France et l’Algérie, ni une historiette du destin du ramassis colonial et de ses traitres harkis, mais une nécessité légale et historique.
Elle est la réalité dure d’un racisme suprématiste encore très actif de l’Occident vis à vis du reste de l’Humanité qu’il appartient à la lucidité et à l’Empathie Humaine universelle de combattre, pacifiquement mais activement, avant qu’il ne mène la Planète et l’Humanité toute entière, vers le pire, tant ce modèle Occidental est dispendieux, dé-réaliste et agressif sur l’Homme et sur l’Ecosystème.
L’Algérie aura fière allure et fera office de sain précurseur de poser cette important problématique sous son éclairage véritable et dans sa réalité concrète afin de sortir de cette construction tartufesque qui voudrait en faire une petit souci de rapports passionnels avec l’ancien colonisateur et en le rendant à sa matrice « hard », insupportable et indigne : le rapport suprématiste et occidentalo-centriste entre le « Monde occidental » et le reste du de l’Humanité.
La criminalisation du colonialisme français est une nécessité historique pour toute l’Afrique. L’Algérie doit montrer le chemin, c’est sa mission et son devoir.
(*) Allaoua Bendif
Fils de Chahid
Docteur en psychologie Clinique
Enseignant universitaire à la retraite.
Auteur de : « Violences Algériennes », Koukou Editions. Octobre 2019