Edito
Leçon de démocratie ou de… savoir-vivre !
Par Mohamed Abdoun
En ces temps durs et incertains, il est chimérique de prétendre posséder l’art et la manière à la fois. Or, un bon diplomate ne saurait s’en délester sans risquer impairs et faux pas. Elizabeth Aubin, ambassadrice US en Algérie arbore des dehors sympathiques et bon enfant. Elle multiplie les contacts et les sorties sur le terrain. Ce faisant, elle explore, sonde, et fait de la diplomatie, autant que du renseignement. Car, ténue est la frontière entre ces deux fonctions. Et bien malin est celui qui saurait établir d’infranchissables frontières entre les deux. Ici réside l’art, doublé d’une indicible manière. Mon art à moi réside dans ce court préambule destiné à introduire le sujet du jour, celui de la condamnation d’El Kadi Ihcene, patron de Radio M. L’ambassade US en parle indirectement, et avec doigté. L’art et la manière y sont convoqués en même temps. « La liberté d’expression est un droit fondamental reconnu par l’ONU. L’administration Biden a et continuera d’indiquer clairement que la liberté de la presse et la liberté d’expression sont des priorités américaines dans le monde entier, y compris en Algérie », lit-on dans ce Tweet. Personne ne saurait être contre. Encore moins cette image renouvelée que reflète l’Algérie nouvelle face à la planète entière. Aux Américains aussi bien sûr. A l’ombre d’un Etat de droit digne de ce nom, les lois sont faites pour être appliquées et respectées. Le journaliste y est justiciable au même titre que les autres citoyens. Seul garde-fou à respecter scrupuleusement : aucun journaliste ne devrait être condamné ou inquiété par la justice à cause de son travail et/ou de ses écrits. C’est bien le cas chez nous. L’affaire Radio M relève de financements étrangers avérés, dont mon ami professeur Ahmed Bensaada a longuement parlé. Ce genre de « vases communicants » est loin de se borner à une simple histoire de finances et de possibles enrichissements illicites. Tant s’en faut. L’Algérie est visée à cause de la justesse et du courage de ses positions, sur la Palestine, le Sahara Occidental, la nécessité de réforme cet ordre mondial déliquescent et injuste, hérité-imposé à la hâte au lendemain de la seconde guerre mondiale. Cet argent, ma foi, sert, ou peut servir, à financer cette redoutable guerre de quatrième génération dedans laquelle il n’est même pas nécessaire de tirer une seule balle. Sans art, ni manière, et avec mes gros sabots habituels, je me permets de rappeler que les Américains sont les plus mal placés pour parler de démocratie et de liberté d’expression. Sinon, qu’ils commencent par relâcher leur mortelle étreinte exercée sur le journaliste Julian Assange, condamné à mort par anticipation, pour avoir osé rendre publiques les horribles crimes US commis en Irak et en Afghanistan. Quand il s’agit des Américains, il n’y a plus de démocratie ni de liberté de la presse qui tiennent. D’effrayants logiciels développés par l’entité sioniste permettant de mettre au pas un pays de taille moyenne, comme le Maroc, pour la bagatelle de 10 millions de dollars. Cette entité les développe et en expérimente les dernières innovations, grandeur nature, sur le peuple palestinien. Rabat a usé et abusé du logiciel Pegasus sur des milliers d’Algériens et de Sahraouis. Jamais, Washington ne s’en est émue. Et pour cause : il se raconte que les Américains auraient développé secrètement un logiciel ultra-performant permettant de surveiller et de traquer l’ensemble des musulmans vivant sur son territoire. Il ne s’agit rien moins que d’une forme d’apartheid ségrégationniste. Il se dit aussi que la CIA et le FBI, qui ont pas mal de sang innocent sur les mains et de crasses sur les consciences, auraient développé un Etat profond qui contrôle tout, absolument tout, mais en toute discrétion. L’ère du Terminator ou de Matrix a peut-être déjà commencé. Big Brother is back ! En attendant, qu’il soit permis à l’Algérie nouvelle de faire appliquer et respecter ses lois intra-muros. En toute souveraineté. A mon humble sens, ce n’est guère trop demander…
M.A.