Entretien
Najem Sidi, militant associatif sahraoui : « Pour le Maroc, c’est le début de la panique, et de la chute libre »
Jeune, dynamique, à cheval sur ses principes et sa cause national, Najem Sidi est sur tous les fronts. Depuis la France où il est « exilé » en attendant la libération de sa patrie, il nous raconte son combat dans cet entretien. il esy question de la réponse reçue de la part des services du président Macron concernant la décolonisation du Sahara Occidental. Ce n’est franchement pas rien. non plus le grand évènement qui sera organisé durant ce mois de septembre au 15e arrondissement de Paris. Des surprises de taille y piaffent d’impatience.
Propos recueillis par Mohamed Abdoun
La Patrie News : Parlons tout d’abord de l’actualité brûlante du moment. Selon vous, à quelle logique répond le rappel pour consultation de l’ambassadeur marocain basé en Tunisie ? Cet incident diplomatique, n’étant pas le seul du genre, peut-on y déceler des signes de panique et de perte de contrôle de la part de Rabat concernant la question de décolonisation du Sahara Occidental ?
En effet, le Maroc a annoncé vendredi dernier le rappel de son ambassadeur à Tunis pour protester contre l’accueil, dans la capitale tunisienne, du président de la république sahraouie, Brahim Ghali.Ce dernier a participé à la 8e Conférence Internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD)organisé samedi et dimanche à Tunis. Ce qui a provoqué unehuée du Maroc qui visait à déstabiliser la région.
Depuis son adhésion à l’Union africaine (UA) en 2017, le Maroc n’a cessé de nuire à l’unité des pays et des peuples de l’UA. Il souffre, de plus en plus, d’un isolement régional croissant face au fait que la République sahraouie est une réalité indéniable. Le Maroc a participé, aux côtés de la République sahraouie, à tous les sommets, conférences et activités de l’UA. Aussi, il a signé l’Acte constitutif de l’UA publié dans son journal officiel n° 6539 bis.
Le Roi du Maroc, lors de son dernier discours, a considéré le dossier du Sahara Occidental comme le prisme à travers lequel, il considère son environnement international et aussi l’aune qui mesure la sincérité de ses amitiés et partenariats. C’est le début de la panique, de la chute libre et un pas de plus visant à bafouer les principes du droit international.
On se souvient, lorsque la Tunisie, membre non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU, avait défrayé la chronique en s’abstenant le 30 octobre 2021 de voter le texte d’une résolution sur le Sahara Occidental. En s’alignant sur la position de la Russie, le vote de la Tunisie a été perçu par de nombreux observateurs comme prenant parti de son voisin algérien au détriment du Maroc et avait sorti de sa zone grise. Ce qui explique, aujourd’hui, la nervosité de l’occupant marocain et le début d’une nouvelle escalade contre la Tunisie. Celle-là pourrait sortir de sa neutralité positive vers la reconnaissance active de la République sahraouie.
Vous avez pour tradition immuable de saisir par écrit les chefs d’Etat successifs français sur le Sahara Occidental. Celle du président Macron vient de vous parvenir, crois-je savoir. Quel en est le contenu, et que dit-elle d’intéressant ?
Nous avons écrit plusieurs lettres aux chefs d’Etat français. A chaque fois, nous rappelons la situation qui prévaut au Sahara Occidental qui concerne le droità l’autodétermination, principe fondamental consigné dans la Charte des Nations Unies.
Nous avons eu toujours une réponse favorable à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable conformément aux résolutions du Conseil de Sécurité garantissant au peuple sahraoui son droit inaliénable à l’autodétermination.
Récemment, nous avons reçu une lettre du Président français, Emmanuel Macron, dans laquelle il nous exprime ses chaleureux remerciements et qu’il a bien été pris connaissance de nos observations et attentes concernant le Sahara Occidental.
Dans une précédente lettre adressée au Président français, nous avons rappelé, le douloureux conflit au Sahara Occidental. Le peuple sahraoui vit depuis plus de 45 ans d’exil, d’occupation et de vie dans des conditions extrêmement difficiles. En dépit de cela, il continue de croire dans la voie pacifique pour résoudre ce conflit, par la voie démocratique, à travers un référendum d’autodétermination conformément aux résolutions pertinentes des Nations unies.
Nous avons exhorté la France, membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies et ayant partagé une longue page d’histoire avec le Maghreb, de ne pas se dérober à ses responsabilités devant un drame humain et politique dont la persistance est préjudiciable à la paix et à la coopération. La France serait bien placée pour prendre des initiatives visant à encourager l’avènement d’un règlement juste, pacifique et définitif conforme au droit international qui respecte la volonté du peuple sahraoui.
Je crois savoir par ailleurs que vous mijotez à Paris un programme d’activité très dense pour cette rentrée de septembre. Pouvez-vous nous en dire plus?
A l’occasion de la journée internationale des victimes de la disparition forcée, le Comité CARASO participe, en collaboration avec de nombreuses associations, à une campagne « Agir contre le déni de Justice » début septembre à Paris.Au programme, plusieurs expositions avec témoignages, projections de films et documentaires, tables rondes, conférences et rassemblements.
Par ailleurs, comme tous les ans en septembre, nous tenons un stand au forum des associations, en coordination avec la Mairie du 15e, pour permettre aux parisiens et autres de se renseigner sur l’activité politique, culturelle de notre Comité. Une occasion à ne pas rater pour connaître le peuple du Sahara Occidental, son histoire, sa culture, son territoire et ses ressources.
Nous avons aussi un projet qui nous tient à cœur : mettre en place un centre digital pour réduire la fracture numérique aux campements des réfugiés sahraouis.
Enfin, une écrivaine française, un écrivain sahraoui et une militante sahraouie des droits de l’Homme seront nos invités d’honneur. Des livres sur le conflit du Sahara Occidental seront exposés. Vos lecteurs auront sûrement d’autres surprises en visitant notre stand.
N.B : Najem Sidi est Président et Co-fondateur du Comité Action et Réflexion pour l’Avenir du Sahara Occidental (CARASO). Le Comité CARASO, créé le 12/12/2012 à Paris, a pour but principal de servir la cause Sahraouie sur la scène européenne et particulièrement en France. Cet universitaire engagé pour la cause sahraouie, a écrit plusieurs articles sur le conflit du Sahara Occidental. Parmi ces derniers articles : « La France, berceau des droits de l’homme, ne peut se détourner du peuple sahraoui » (lemonde.fr)
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