Guerre des grottes : L’autre crime impuni de la France en Algérie
On ne cessera jamais de le dire : Les formes de torture adoptées par l’administration coloniale française contre les Algériens représentent une «tache noire», motif de déshonneur sur le front de ce pays qui se vante de la démocratie et doivent être classées à la tête des «crimes contre l’humanité» n’ayant pas de semblable dans l’histoire contemporaine.
«Même les tortures pratiquées par les Nazis lors de la deuxième guerre mondiale n’ont pas été de la même intensité et atrocité. Les soldats de la France coloniale ont exercé les pires méthodes de torture contre les prisonniers pour les obliger à parler ou par divertissement, selon les témoignages historiques Des actes inimaginables et sans précédent», affirment unanimement des historiens.
L’historien Français, Christophe Lafaye, lui, nous renvoie à une page sombre de la colonisation pendant la Guerre de libération nationale durant laquelle l’armée française a eu recours aux gaz toxiques contre les moudjahidine et les civils, dont des femmes et des enfants, enfermés dans des grottes.
La « guerre des grottes » s’est déroulée dans les réseaux souterrains de zones montagneuses d’Algérie, à partir de 1956.
L’historien a, dans ce contexte, réitéré son appel à la nécessité d’ « ouvrir les archives» pour faire la lumière sur cette guerre qu’a menée la France coloniale «dans le silence» contre les Algériens durant la Guerre de libération.
Invité du Forum El Moudjahid, le spécialiste de l’histoire contemporaine a estimé que les Algériens morts asphyxiés dans des grottes par des gaz toxiques sont «rarement identifiés», ce qui nécessite l’ouverture des archives pour l’identification de ces sites qui servaient de refuge pendant la Guerre de libération.
«Des milliers de sites contenant des corps portés disparus pourraient faire l’objet d’une investigation pour leur identification», a-t-il relevé d’où «la nécessité de retrouver les cartes permettant l’exploitation de ces sites», a-t-il ajouté.
A partir de 1956, l’armée française a mené en Algérie «une guerre souterraine» en utilisant des gaz toxiques dans ces grottes transformées notamment en des lieux de combats, d’infirmerie pour les Moudjahidine, mais aussi des refuges pour la population.
En avril dernier, des personnalités françaises dont des historiens, ont lancé un appel aux autorités de leur pays pour que les archives sur le recours aux armes chimiques par l’armée française dans des grottes en Algérie soient ouvertes et consultables.
De son côté, l’ancien membre du ministère de l’Armement et des Liaisons générales (MALG), Dahou Ould Kablia, a estimé qu’en dépit des efforts consentis jusque là, le travail de mémoire lui reste beaucoup de choses pour arriver à la vérité», ajoutant que «toutes les souffrances qu’a endurées le peuple sont encore vivantes dans nos chairs»
Pour l’historien Gilles Manceron aussi, cette « guerre des grottes » ravive le souvenir de ce que l’on avait appelé, dans les années 1840, « les enfumades ».
« Mais si beaucoup de gens sont morts, on ne sait pas leur nombre », a-t-il affirmé dans une déclaration à Radio France Internationale (RFI).
Spécialiste de la colonisation et de la guerre d’Algérie, l’historien est catégorique : Des unités spécialisées sont constituées pour pratiquer ce qui a été appelé « la guerre des grottes », c’est-à-dire l’asphyxie des personnes réfugiées dans des grottes qui étaient nombreuses dans plusieurs régions montagneuses de l’Algérie où la guérilla se développait.
Et souvent, à la fin, après leurs opérations, ils dynamitaient la sortie, pour que ça ne resserve à nouveau, et ce n’était pas possible – ou extrêmement dangereux – d’y pénétrer pour extirper des cadavres. C’est ainsi que beaucoup de gens sont morts. « Combien ? On ne sait pas », a-t-il ajouté.
En effet, « la guerre des grottes est un épisode méconnu de la guerre de 1954-1962. Le dossier fait partie des secrets cadenassés par l’armée française. Un aspect du conflit sous-documenté en raison d’un accès verrouillé aux archives », écrivait pour sa part le journal le Monde.
M.M.H