La DG de la CNAS à la Patrie News, Mme Hind Nessah
« Les mesures du président ont préservé plus de 3 millions d’emplois »
Depuis sa mise en place, le système de sécurité sociale algérien a constitué un instrument principal de la politique sociale de l’Etat et sa situation financière permettait des prélèvements qui ont été utilisés en complément du budget social de l’Etat. Ce service public qui assure la protection des citoyens contre différents risques sociaux comme la maladie ou la vieillesse et qui leur permet de faire face à une diminution de leurs revenus ou à une augmentation de leurs dépenses de santé, a montré toute son efficacité, lors de la crise sanitaire mondiale liée à la covid-19. En effet, le régime solidaire, alimenté par les cotisations des employeurs et des salariés, a joué un rôle important, aussi bien dans le traitement de la pandémie que dans l’accompagnement du confinement et dans l’après-covid.
Hayet Youba
Lors d’une discussion ouverte sur la Caisse Nationale des Assurances Sociales des Travailleurs Salariés (CNAS), Mme Hind NESSAH, franche et souriante, a bien voulu répondre aux questions de la Patrie News. La directrice générale, très à l’aise avec les chiffres et ayant une connaissance parfaite de son métier, a tenu à éclairer l’opinion publique sur le rôle important que joue le système de sécurité sociale en général et celui de la CNAS particulièrement, dans la préservation du rôle social de l’Etat et dans la relance économique.
Questionnée sur les actions et les réalisations de la Cnas visant à concrétiser la justice sociale qui est l’un des engagements du président de la République, la directrice générale de la Caisse, sans chercher ses mots, preuve de sa grande maîtrise du dossier, a commencé par expliquer : «la Cnas est un organisme de service public par excellence dont l’activité et la mission s’inscrit pleinement dans les engagements du président de la République en matière de justice sociale. Nous accompagnons et les employeurs qui sont assujettis à notre caisse et les assurés sociaux. Nous accompagnons les employeurs dans tout ce qui est assujettissement, nous garantissons le recouvrement des cotisations qui servent, elles, à assurer ces prestations pour les assurés sociaux et leurs ayants-droits. Par la même, la nature des prestations que nous offrons aux assurés sociaux garantissent l’équité sociale et la solidarité ». Rappelant que le système de la sécurité sociale est basé sur l’équité et la solidarité intergénérationnelle, Mme Nessah a ajouté « C’est tous les assurés sociaux qui ouvrent droit à un niveau de prestations que nous élevons à chaque fois pour garantir la sécurité sociale qui est un élément essentiel dans la justice sociale. Parce que ça contribue efficacement dès lors que nos assurés et ayants-droits, les citoyens algériens en général, peuvent bénéficier d’une protection sociale qui couvre un grands nombre de risques : l’assurance maladie, les accidents de travail et maladies professionnelles, la maternité, le décès, l’invalidité, la CNAS gère aussi les allocations familiales pour le compte de l’Etat ». La caisse est au milieu de la vie des assurés sociaux, a lâché notre interlocutrice soulignant qu’elle « accompagne le futur assuré social, depuis sa naissance, comme un ayant-droit, comme étudiant jusqu’à ce qu’il devienne salarié et là, elle le protège dans la maladie, dans la vieillesse… Donc la sécurité sociale et la Cnas accompagnent les assurés sociaux et joue un rôle effective dans la justice sociale. »
La carte Chifa ouvre toutes les portes aux assurés sociaux
Etayant ses dires par des chiffres éloquents, Mme Nessah avance «aujourd’hui la Cnas assure plus de 27 millions de citoyens à travers nos agences de wilaya, nous en avons 59 actuellement qui sont réparties sur tout le territoire nationale. Nous sommes implantés dans toutes les wilayas du pays avec l’ouverture de 10 nouvelles agences dans le Sud sur lesquelles nous oeuvrons pour assurer cette couverture sociale et contribuer dans cette justice sociale. » C’est important de savoir qu’au centre de ce système, dit-elle, il y a la carte Chifa qui permet aux assurés de bénéficier de la totalité des prestations. « Aujourd’hui, les 27 millions d’assurés sociaux bénéficient de toutes les prestations via la carte chifa sans avancer aucun frais et on voit bien donc l’impact sur cette justice sociale et cette équité.
La CNAS est conventionnée avec : plus de 12 000 officines pharmaceutiques à travers le territoire national, 3770 médecins traitants 31 cliniques cardio-vasculaires, 211 centres d’hémodialyses, 366 transporteurs sanitaires, 120 cliniques d’accouchement et 662 opticiens lunettiers.» énumère encore la responsable confirmant par la même que « cette carte ouvre toutes les portes aux assurés sociaux ». Convaincue que la justice sociale ne peut se faire que si « la Cnas arrive à assurer les ressources nécessaires », Mme Nessah explique que la caisse n’a d’autres ressources que celles des cotisations des employeurs et des assurés sociaux. L’objectif premier et permanent est donc l’élargissement de l’assiette cotisante et « dans ce cadre, il y a un programme très ambitieux, issu des orientations de M. le ministre du travail, de l’emploi et de la sécurité sociale, qui vise à mettre en application les orientations et les engagements de M. le président de la République, dans le domaine de l’élargissement de la protection sociale qui est un vecteur majeur pour assurer cette justice sociale aujourd’hui. » Pour réussir le challenge de l’élargissement de l’assiette des cotisants, la Cnas a misé sur la facilitation des procédures et les campagnes de sensibilisation. Une démarche réussie puisque l’organisme est l’un des premiers à avoir fait de la numérisation une réalité en mettant à la disponibilité du citoyen une série intégrée de solutions et d’application électroniques. « La Cnas à l’instar des organismes sous tutelle du ministère du travail, s’est inscrit pleinement dans la démarche initiée par notre secteur de numériser et moderniser l’ensemble des services que nous pouvons offrir à nos citoyens, c’est pour ça que nous disons que nous sommes un service public par excellence. Ce que nous faisons, c’est dans l’intérêt de nos usagers qu’ils soient employeurs ou assurés sociaux», a expliqué Mme Nessah.
La numérisation, l’autre réussite de la Cnas
La responsable a assuré que durant les deux dernières années, les services de la caisse «ont accélérés la cadence pour la numérisation. Nous offrons un portail complet à nos assurés et à nos employeurs. A titre indicatif, je peux vous affirmer que nos assurés sociaux n’ont plus besoin de se déplacer à nos agences. Nous avons mis en place tout un processus via notre portail El Hanaa qui permet à nos assurés sociaux de tout faire à distance, ce qui n’était pas imaginable il y a quelques temps seulement. Ils peuvent déposer l’arrêt de travail en ligne, de même pour la demande de maternité, la demande de capitale décès et toutes ces demandes sont traitées. Ils peuvent éditer l’attestation l’affiliation, suivre leur dossier de remboursement, demander la carte chifa en ligne, ils sont invités au contrôle médial via SMS, c’est un service complet. Par rapport aux employeurs, ces derniers peuvent obtenir l’ensemble des documents en ligne par le biais du portail « télédeclaration ». Ils peuvent procéder à l’ensemble des déclarations en ligne que ce soit celle de la déclaration, des salariés, paiement en ligne… ». Face à cette multitude de services, une réussie, Mme Nessah exprime sa fierté et rappelle « la Cnas a été récompensée à Genève par un prix international du Sommet mondial sur la société de l’information organisé par l’Union internationale des télécommunications. Ce prix a mis en valeur les efforts qui ont été fournis sur ce volet numérique. C’était là une victoire pour tout le secteur. Cet ensemble de services qui sont actuellement en ligne sont l’aboutissement de la simplification des procédures qui a été décidée par notre secteur. »
C’est en partie grâce à cette numérisation que la Cnas a réussi à relever le défi qui s’est présentée à elle. Celui de répondre promptement à l’instruction du président de la République d’octroyer aux jeunes bénéficiaires d’une allocation chômage, une carte Chifa. Ce n’était pas chose facile puisque le nombre des bénéficiaires dépasse le million. Mais la Cnas aime le défi, comme le dira Mme Nessah. «Le défi, on aime ça !»
Bénéficiaires de l’allocation chômage : vos cartes chifa vous attendent !
« Il faut souligner, tout d’abord, que la décision prise par le président de la République, est une décision historique. Permettre à ces primo-demandeurs d’emploi de bénéficier d’une allocation chômage c’est quelque chose de nouveau, un défi. Compléter cette allocation par une couverture sociale était évidente. Il s’agit là d’une instruction du président de la République et donc la Cnas s’est intégrée pleinement dans cette orientation » a affirmé la DG de la Cnas soulignant que «l’opération de remise des cartes chifa a été pilotée par M. le ministre, lui-même, qui en mesurait l’importance. Il ne s’agissait pas uniquement de remettre une carte mais d’élargir la couverture sociale qui contribue encore une fois à la justice sociale dans laquelle s’est engagé le président de la République. » Pourquoi c’était un défi ? « C’est parce qu’il fallait mettre en place tout un processus dans le cadre de l’entraide administrative entre nos services et ceux de l’Anem pour immatriculer ces bénéficiaires automatiquement. Comme vous avez eu à le constater, les bénéficiaires n’ont pas eu à se déplacer au niveau des agences Cnas. Aujourd’hui sur plus d’un million de bénéficiaires de l’allocation chômage, nous les avons immatriculés, affiliés et nous sommes en train de remettre les cartes chifa. D’ailleurs la seule intervention de ces allocataires est de télécharger leur photo. Vous voyez à quel point nous avons pris ce dossier à coeur et pour nous c’était un défi. Regarder la simplification et la modernisation avec l’entraide entre les organismes de notre secteur qui ont permis d’établir les cartes chifa et de les remettre ». Mme Nessah a saisi l’occasion pour lancer un appel aux jeunes afin de télécharger leurs photos via le portail El Hanaa qui est ouvert 24/24 et 7j/7. « Celui qui n’arrive pas à télécharger, peut tout simplement déposer sa photo auprès de nos agences. Nous leur enverrons un sms pour le retrait de leur carte Chifa. »
La Cnas et le défi de la crise sanitaire
Revenant sur la crise sanitaire mondiale qui a touché de plein fouet le monde entier, Mme Nessah est revenu sur les facilitations accordées par la Caisse pour s’inscrire dans la démarche du gouvernement et répondre aux instructions du chef de l’Etat visant le soutien des citoyens et des emplois. «Dès qu’on a vu les premières difficultés suite à la crise sanitaire du covid-19, le gouvernement a pris une série de mesures pour préserver l’emploi. Principalement on a écouté les employeurs. C’est nouveau pour la caisse qui a mis en place toutes les orientations qui ont été dictées par le gouvernement où nous avons notamment reportés des délais de paiement pour les cotisations. On a gelé, pendant six mois, les majorations et les pénalités de retard. On a accordé des échéanciers de paiement aussi. Nous avons pris également d’autres mesures spécifiques à la Cnas qui s’est adaptée à la mesure d’interdiction de se déplacer durant la crise sanitaire. Afin de faciliter l’opération de recouvrement, les employeurs ont été ainsi autorisés à payer leurs cotisations dans n’importe quelle wilaya et auprès de n’importe quelle agence ou par e paiement. Concernant les assurés sociaux, on a prévu une prolongation automatique de l’ouverture des droits. Généralement l’ouverture des droits est renouvelée chaque 31 mars.
Nous avons décidé d’un renouvellement automatique durant la crise sanitaire. On a levé aussi transitoirement le contrôle à priori. On a levé également le contrôle administratif pour les arrêts de travail, on a prolongé automatiquement les rentes. C’est grâce à toutes ces mesures qui ont permis de préserver les assurés sociaux et ont soulagé les employeurs, que toute la société a réussi à dépasser cette crise car il y avait énormément de difficultés et beaucoup de pertes d’emploi ont été enregistrées. » La Cnas a eu également à gérer la période post-covid. Là aussi, il fallait accompagner les employeurs, éprouvés par le gel de la machine économique. C’est en application des instructions du président de la République qui a décrété des mesures exceptionnelles pour accompagner les employeurs et contribuer activement dans la relance économique que la Cnas a eu à mettre en application l’ordonnance 21-12. « Cette ordonnance a apporté des facilitations aux employeurs qui avaient du mal, après la crise, à payer leurs cotisations. Il y avait même ceux qui en payant leurs cotisations, se sont retrouvés face à des majorations de retard qu’ils ne pouvaient assumer. Il y a aussi ceux qui avaient perdu les mesures incitatives d’appui et d’encouragement à l’emploi. Donc la promulgation de cette ordonnance a été une réelle bouffée d’oxygène puisqu’elle annonçait l’exonération exceptionnelle totale et qui permettait aux employeurs de régulariser leur situation. Par exemple, lorsqu’un employeur avait des cotisations à régler, s’il arrivait à solder l’ensemble des arriérés, il bénéficiait de l’annulation de toute majoration et pénalité de retard. Celui qui ne pouvait pas s’acquitter de ces cotisations en totalité, bénéficiait d’un rééchelonnement avec annulation aussi des majorations et des pénalités de retard. Les dispositifs d’aide à l’emploi ont été rétablis aux employeurs, une fois leur situation régularisée. La décision du président de la République a répondu à un besoin pressant et réel exprimé à maintes reprises par les confédérations du patronat et des employeurs que nous avons eu l’occasion de rencontrer » a assuré Mme Nessah avant de donner certains chiffres.
2 700 milliards cts de pénalités effacées et 3 millions d’emplois préservés
«Pour mesurer l’impact de l’ordonnance 21-12, il suffit d’indiquer que pas moins de 233 515 employeurs ont en bénéficier. Parmi ces derniers, 211 345 ont bénéficié de l’annulation totale des majorations et pénalités de retard pour un montant de 2700 milliards cts en contre partie du règlement des cotisations en une tranche. Ces employeurs ont bénéficié immédiatement d’attestations de mises à jour leur permettant de soumissionner à des marchés publics ou privés, de maintenir l’emploi et de bénéficier des mesures d’abattement pour le recrutement de nouveaux salariés. 19 202 débiteurs ont souscrit des échéanciers de paiement pour le règlement de leur dette vis-à-vis de la CNAS et bénéficieront à terme de cette exonération en majorations et pénalités de retard. Près de 3000 employeurs ont bénéficié du rétablissement des mesures d’encouragement et d’appui à l’emploi suite au règlement des cotisations principales» a précisé Mme Nessah soulignant que ces mesures ont permis à la caisse de recouvrer 4000 milliards cts qui étaient considérées comme créance difficilement recouvrable, tout en allégeant les charges parafiscales de ces opérateurs économiques.
Avec 4 000 milliards cts dans les caisses, plus de 233 000 entreprises préservées et pas moins de 3 millions d’emplois sauvés, la décision du président est intervenue au moment opportun pour soulager le citoyen algérien mais aussi relancer l’économie nationale, a encore fait savoir la DG de la Cnas qui affirme que la caisse a enregistré 365 009 employeurs affiliés dans le secteur économique au mois de mai 2022 contre 359 135 au 31 décembre dernier. « Ces résultats démontrent sur le terrain que les mesures introduites par l’Ordonnance 21-12 qui concrétise l’engagement de Mr le Président de la République visant à encourager les opérateurs économiques à investir en levant tout type de contrainte. » Abordant, par ailleurs, les difficultés pour le recouvrement, la directrice générale de la Cnas a assuré que ses services «sont face d’un côté au travail informel et donc c’est l’évasion parafiscale contre laquelle nous luttons et de l’autre à des activités qui sont en difficultés financières et qui n’arrivent pas à honorer leurs engagements. Nous avons l’ancrage juridique qui nous permet d’aller vers un recouvrement forcé mais nous privilégions le recouvrement à l’amiable avec les échéanciers de paiement mais lorsque les mesures exceptionnelles ont pris fin nous sommes retournés vers la loi. Nous avons les moyens de recouvrer et c’est notre métier de recouvrer mais nous sommes là pour accompagner les entreprises. Il est important de signaler que le salarié, ouvre droit à des prestations et cela même si son employeur n’a pas honoré ses engagements. Parce que nous, on protège l’assuré social des aléas de la vie mais aussi des défaillances de son employeurs ». Mme Nessah est consciente que la situation financière des entreprises se répercute sur la Cnas qui ne vit que des cotisations mais considère que c’est à la caisse « de mettre tous les mécanismes nécessaires pour recouvrer le maximum des cotisations et continuer à assurer nos prestations. »
Dernier mot ?
« Il faut qu’on oeuvre tous pour préserver le système de la sécurité sociale. Ce système qui est basée sur la solidarité intergénérationnelle et l’équité, ne peut compter que sur la contribution de nous tous. Des mesures concrètes doivent être opérées pour rapatrier tous les travailleurs du secteur informel et à les faire adhérer. La période post-covid est le moment opportun de comprendre l’importance de rejoindre le système de la sécurité sociale. Nombreux travailleurs dans l’informel ont perdu leur emploi et se sont retrouvés éprouvés par la crise. Il faut retenir les enseignements de la covid. Le droit à la sécurité sociale est un droit constitutionnel. Il faut qu’on mesure la valeur de la couverture sociale. »
H.Y.