L’Arabie saoudite et la révolution algérienne :
Le roi Saoud : le plus algérien des Saoudiens
Tous les historiens s’accordent à dire que l’intérêt de l’Arabie saoudite pour la cause algérienne a commencé avant même le déclenchement de la Révolution du 1er novembre 1954. Il remonterait exactement à 1946, lorsqu’un document de ce qui était appelé «le Front pour la défense de l’Afrique du Nord» a été remis au roi Abdulaziz lors de sa visite en Egypte par deux membres de ce front, Cheikh Lakhdar Hocine et Cheikh Foudhil El-Ouarthilani.
L’insurrection algérienne a commencé un an après la disparition du roi Abdulaziz. Son successeur, le roi Saoud ben Abdulaziz, marchera sur le pas de son défunt père en proclamant son soutien à la cause algérienne et à toutes les causes justes. Sa période de règne coïncidait avec l’étape la plus cruciale et la plus douloureuse du combat du peuple algérien contre le colonialisme français, caractérisée par la lutte armée.
Ce que l’on peut retenir à ce sujet, c’est que les différentes décisions prises par le roi Saoud en faveur de la révolution algérienne, aux plans financier, politique, moral et diplomatique, eurent un impact considérable sur la question algérienne au niveau notamment des instances internationales, mais aussi sur l’issue de la guerre en soi, grâce aux généreuses donations versées par les Saoudiens aux représentants du FLN à l’extérieur, ce qui a permis un meilleur approvisionnement en armes destinées aux maquis de l’intérieur, au moment où les moudjahidine en avaient cruellement besoin.
Ce soutien multiforme fit du royaume d’Arabie saoudite incontestablement le plus fort soutien arabe de la cause algérienne, comme l’a confié un jour le roi Hussein de Jordanie à Cheikh Ahmed Tewfik El-Madani, cité par ce dernier dans ses Mémoires. Le souverain jordanien lui a dit : «Vous vous appuyez sur deux piliers principaux que sont l’Egypte et l’Arabie saoudite, puis viennent la Syrie et l’Irak. Je pense que plus vous combattez, plus les aides afflueront su vous.»
En 1955, le roi Saoud Abdulaziz a officiellement appelé à l’inscription de la question algérienne à l’ordre du jour des Nations unies, pour attirer l’attention de la communauté internationale sur la lutte et les sacrifices du peuple algérien pour réclamer leur droit à l’indépendance et à la liberté. La délégation saoudienne a rencontré, à cette occasion, tous les membres des délégations des pays arabes, africains et asiatiques membres de l’Assemblée générale des Nations unies, pour les exhorter à apporter leur soutien à la position saoudienne. Tous les pays n’ont pas, malheureusement, honoré leur engagement.
Aussi, le royaume saoudien a sacrifié ses liens d’amitié avec la France pour la cause algérienne. On attribue au roi Saoud cette petite phrase, ô combien éloquente et honorable, adressée au secrétaire général des Nations unies de l’époque Hummer Shield, en 1958 : « Nos relations politiques avec la France dépendent désormais d’un règlement de l’affaire algérienne. »
Fin octobre 1956, le Roi Saoud appelle les saoudiens à aider financièrement leurs frères algériens dans leur résistance à l’occupation française. Selon des récites recoupées, les Saoudiens ont fait don d’un million de riyals au total, sachant que la collecte a atteint deux cent mille riyals dès le premier jour.
En 1958, le même roi Saoud a annoncé qu’il ferait du 15e jour de Chaabane la «Journée de l’Algérie», au cours de laquelle le peuple saoudien fera don d’argent pour aider le peuple algérien dans sa lutte pour libérer son pays du colonialisme français.
Au cours de cette campagne d’aide à l’Algérie, le gouverneur de Riyad, qui n’est autre que l’émir Salman, l’actuel roi d’Arabie Saoudite, qui était en même temps président du Haut comité de collecte de fonds pour l’Algérie, adressa un appel au début du mois d’avril 1960, pour continuer à collecter des dons de diverses espèces, en liquide ou en nature, durant toute une semaine. Dans son appel, le prince mit en exergue les atrocités et les crimes commis par l’occupation française contre le peuple algérien, et les conditions déplorables dans lesquelles vivaient des dizaines de milliers d’innocents, dont la plupart étaient des femmes, des personnes âgées et des enfants, dépourvus d’abris et de nourriture.
A la suite de cet appel, une délégation algérienne arriva à Djeddah à bord d’un avion saoudien à la mi-avril de la même année. La délégation, conduite par Krim Belkacem, vice-premier ministre du GPRA, a été reçue au palais royal à Riyad par le roi Saoud, lequel réitéra devant ses hôtes le soutien de son pays à la question algérienne, en leur affirmant qu’il en faisait sa priorité et que tout ce que le Royaume entreprenait pour l’Algérie, «il le faisait par devoir envers des frères ».
Pendant ce temps, le Haut comité de collecte de fonds pour l’Algérie à Riyad s’employait, sous la supervision du prince Salman, le travail des sous-comités qui étaient installés à travers les régions, les gouvernorats, les villes et les villages du royaume, à recueillir les dons des citoyens et des bienfaiteurs.
Le gouvernement du royaume d’Arabie Saoudite a reconnu le premier gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) par un télégramme envoyé par l’émir Fayçal ben Abdulaziz, prince héritier et Premier ministre à Ferhat Abbas, président du GPRA, le 20 septembre 1958, c’est-dire deux jours après sa proclamation au Caire.
In Memoria