Le Maroc face au dilemme : puissance militaire ou justice sociale ? Un équilibre menacé.
« un discours nationaliste axé sur la « résilience » et « l’honneur », Le Président Abdelmadjid Tebboune .
Tiraillé entre ses ambitions géostratégiques et les urgences socio-économiques, le Maroc suscite des interrogations. Le royaume investit massivement dans la modernisation de son armée, avec des achats d’hélicoptères de combat, de drones et des projets de sous-marins. Mais cette course à l’armement, financée par une dette extérieure record de « 70 milliards de dollars », contraste avec la réalité d’une population où la pauvreté persiste. Face à l’Algérie, voisin mieux équipé militairement et sans dette, et à une jeunesse en quête d’opportunités, le modèle marocain semble fragilisé.
Dans ma contribution du 30/11/2010. « Demain sera numérique »
Je préconise de penser en termes de «toile de technologues». Revendication de nos chercheurs Algériens à l’étranger, afin de tisser un réseau de chercheurs Algériens des différents pôles de la recherche universitaire ou industrielle pour un véritable transfert de technologie. Un réseau de compétences pour asseoir une nouvelle stratégie de développement et de création des technopôles des technologies. Nous avons attiré l’attention des pouvoirs publics pour une Algérie plus consciente de ses atouts et des enjeux auxquels elle doit faire face. Une politique high-tech à l’image de ce que les chinois ont fait dans leur pays. A partir de 1980 la Chine a décidé d’attirer des scientifiques sur son territoire. Tous les Chinois partis à l’étranger pour étudier, mais aussi potentiellement des étrangers qui seraient intéressés de venir travailler et faire des recherches en Chine Quinze ans après… où sommes nous?
Le Maroc a multiplié les acquisitions militaires pour renforcer son statut régional : Une armée high-tech… mais un pays endetté.
– Hélicoptères Apache AH-64E: Livrés en 2023 à 125 millions de dollars l’unité, ils offrent une puissance de frappe aérienne inédite.
– Drones de combat: En 2021, 13 drones turcs Bayraktar TB2 (70 millions de dollars)
-Des modèles chinois TB-001 (280 000 dollars l’unité) ont étoffé les capacités de surveillance et d’attaque.
– Sous-marins russes en projet: Deux sous-marins Amur-1650 (1 milliard de dollars chacun) sont envisagés pour concurrencer l’Algérie, qui dispose déjà de six submersibles.
Ces achats s’accompagnent d’une diversification des partenaires (États-Unis, Turquie, Russie, Chine), au détriment des fournisseurs européens traditionnels. La France (Naval Group) et l’Allemagne (TKMS) restent néanmoins en lice pour des contrats de sous-marins.
Cependant, cette stratégie militaro-diplomatique repose sur une dette extérieure représentant 50 % du PIB (130 milliards de dollars en 2023). Les créanciers du FMI, de la Banque mondiale et des prêteurs privés imposent des conditions strictes, tandis que les dépenses militaires absorbent -5,3 % du PIB – loin des 6,7 % algériens, mais suffisant pour alourdir un budget national déjà sous tension.
Les Fractures sociales dans un royaume à deux vitesses:
-Derrière les discours de modernité,
40 % des ruraux vivent sous le seuil de pauvreté (Banque mondiale, 2022). Le chômage frappe 11,8 % de la population active , culminant à 22 % chez les jeunes. Les inégalités, mesurées par un indice de Gini de 39,5 (mesure le degré d’inégalités de revenu d’un pays.2021), alimentent un mécontentement croissant, illustré par les protestations du Rif en 2016-2017.
-Les coupes dans les subventions aux carburants et denrées de base, exigées par le FMI, ont exacerbé les difficultés.
Pourtant, le roi Mohammed VI, classé par « Forbes comme le 7ᵉ monarque le plus riche au monde 8,8 milliards de dollars. (Liechtens .Luxembourg, Qatar, Monaco, Oman ,Belgique, Pays Bas, Norvège, Danemark, Jordanie, Suède, Koweït) , incarne un paradoxe criant ». Propriétaire d’un hôtel particulier parisien à 80 millions d’euros et du château de Betz dans l’Oise de 70 ha , il finance des projets locaux en France : aides périscolaires, voyages au Maroc pour des collégiens (avec 500 € d’argent de poche par enfant), et rénovation d’infrastructures communales… le paradoxe il fait plus pour la France que pour le Maroc.
Géopolitique : Le Maroc mise sur des partenariats risqués pour assoir son influence :
– Normalisation avec Israël (2020) : Rabat a soutenu, sans succès, l’entrée d’Israël comme observateur à l’Union africaine, contrée par l’Algérie et l’Afrique du Sud en février 2023.
– Coopération avec Moscou et Pékin: Les drones turcs Bayraktar , dépendants de maintenance extérieure, et les contrats russes menacent de froisser les alliés occidentaux.
Parallèlement, le royaume s’implique dans des coalitions militaires internationales :
– Guerre du Golfe (1991): 17 000 soldats marocains déployés.
– Coalition contre Daech (2014): Six avions F-16 engagés sous commandement émirati.
– Interventions au Yémen: Appui aux frappes saoudiennes contre les Houthis.
Mais cette projection régionale contraste avec la stabilité Algérienne : Alger, doté d’un arsenal supérieur et « sans dette extérieure », cultive un discours nationaliste axé sur la « résilience » et « l’honneur », selon les mots du Président Abdelmadjid Tebboune.
En conclusion : La bombe à retardement sociale, créée par le Royaume qui incarne un État schizophrène : désireux de s’imposer comme puissance militaire, mais miné par des dettes colossales et un tissu social en lambeaux. Si les tensions au Sahara Occidental et sa soi-disante rivalité algérienne justifient partiellement les investissements sécuritaires, l’éducation, la santé et l’emploi restent les parents pauvres du budget. En 2023, la défense a reçu 16 fois plus de fonds que l’agriculture, secteur-clé pour 40 % des Marocains.
Sans rééquilibrage urgent, le royaume risque de voir sa quête de puissance éclipsée par des crises internes – rappelant que la sécurité nationale ne se construit pas qu’avec des armes, mais aussi avec la justice sociale. L’urgence d’un rééquilibrage vers l’éducation, la santé et l’emploi s’impose pour éviter que le royaume ne s’enlise dans une spirale où la force militaire ne compensera pas la vulnérabilité de sa population.
A bon entendeur Salut
Abdelkader REGUIG
Président de l’Ordre des Ingénieurs Experts Arabes. Genève. Suisse
Émail: orarexe @gmail.com