Quand l’ambassadeur marocain à l’ONU ne maîtrise ni l’histoire ni la géographie du Maghreb
Selon des médias marocains, l’ambassadeur permanent de leur pays auprès de l’ONU aurait « répondu » dans le détail au ministre algérien des affaires étrangères, Ramtane Lamamra, suite à son intervention à la réunion par visioconférence du mouvement des non-alignés, qui a concerné, entre autres, l’affaire du Sahara Occidental.
Dans sa « réponse » à Lamamra, Omar Hilal « s’est étonné que le ministre algérien des affaires étrangères se pose en ardent défenseur du droit à l’autodétermination, et dénie ce même droit au « peuple kabyle », l’un des plus anciens peuples d’Afrique qui souffre de la plus longue colonisation ».
Mais il semble qu’Omar Hilal ne maitrise ni l’histoire, ni la géographie, ni même la réalité actuelle de la région où il est né et qu’il représente au sein de l’ONU. Pourtant, s’il avait pris la peine de faire quelques recherches, il aurait appris que les berbères ou amazighes ou kabyles sont « un groupe ethnique autochtone d’Afrique du Nord dont les terres s’étendaient des Iles Canaries à l’ouest du Maroc actuel jusqu’à l’ouest de l’Egypte antique. L’Egypte moderne comprend l’oasis de Siwa qui est une région BERBEROPHONE ». Rien que cela.
Le Maroc ancien, tout comme l’Algérie, la Lybie, la Tunisie et une partie de l’Egypte composaient le territoire berbère. Si nous revenons au Maroc d’aujourd’hui, M. Omar Hilal peut-il nous dire quel pays, avec l’Algérie, a reconnu la langue amazighe comme seconde langue nationale auprès de l’arabe ? Il doit bien savoir que c’est le Maroc. La question se pose tout naturellement : pourquoi ? La réponse est tout aussi naturelle : parce qu’il y a des kabyles, beaucoup de kabyles (berbères) au Maroc.
Si nous prenons une carte des aires dialectales au Maroc, nous remarquerons qu’elles occupent plus de la moitié de la superficie totale du pays, concentrées particulièrement au centre, du nord vers le sud. Il y a la région d’El Hoceima sur les régions côtières méditerranéennes qui parle le rifain (c’est du tamazigh aussi), à Fès, à Khemisset, à Azrou, à Goulmima, les marocains parlent Tamazight alors qu’à Ouarzazat et dans les régions près de Marrakech et Essouira, ils parlent Tachelhit.
La différence entre certaines régions d’Algérie et la Kabylie (pas que la Kabylie, il faut le préciser) n’est qu’un peu linguistique, il n’y a rien qui nous sépare, c’est juste parce qu’une région a gardé ce parler ancestrale et une autre s’est tournée vers l’arabe, pour des raisons souvent exogènes. C’est la même chose pour le Maroc, alors pourquoi ne leur permettez-vous pas de décider de leur devenir, d’être autonomes, puisque vous voulez que ce soit ainsi pour la Kabylie en Algérie ?
Il y a aussi une vérité que tout le monde cache, c’est que la Kabylie n’est pas la seule région berbérophone en Algérie, toute les régions le sont. Faites un tour là où vous voulez, vous allez découvrir que des hameaux, des villes, des villages, des montagnes portent des noms amazighs, les habitants qui y résident depuis la nuit des temps parlent un dialecte amazigh.
Les monts de l’Atlas blidéen, une grande partie de la wilaya de Tipaza, à Chleff, à Tlemcen, à Batna, Khenchela, Souk Ahras, à Ghardaïa, à Tamanrasset, partout en Algérie, vous trouverez des dénominations amazighes, des noms amazighs, des parlers amazighes, un art culinaire amazigh, les vêtements et le mode de vie.
Non, monsieur l’ambassadeur auprès de l’ONU, les kabyles ne sont pas un peuple colonisé par l’Algérie, ils sont le peuple algérien, ils sont sa composante essentielle, tout comme au Maroc. Donc avant de nous demander de donner une indépendance à une de nos région, commencez chez vous, donnez à tous ceux qui parlent amazigh leur indépendance.
Mais, au fait, quel langage parle le peuple sahraoui ?
Tahar Mansour