Le président chinois revient sur le continent européen pour la première fois depuis 2019 et la fin du Covid. Paris, Belgrade et Budapest sont au programme d’une visite qui illustrera l’érosion des relations sur fond de tensions commerciales et géopolitiques
Le président chinois entame en effet, son périple lundi à Paris où il sera reçu par Emmanuel Macron pour une visite d’Etat. Au menu, des tractations commerciales pour éviter une spirale protectionniste où il sera question aussi bien de voitures électriques et de panneaux solaires que de cognac et de tripes.
Xi Jinping plaidera contre la tentation européenne de découplage économique avec la Chine, dont elle serait devenue trop dépendante après un quart de siècle de globalisation, tout en labourant le terrain du découplage politique entre les Européens et les Etats-Unis, leur alliance étant le principal frein à l’affirmation d’un nouvel ordre mondial voulu par Pékin.
Le président français, qui vient de répéter dans un discours à la Sorbonne que Bruxelles ne devait pas devenir un vassal de Washington, est un hôte de choix pour enfoncer un coin dans la relation transatlantique.
Mardi prochain, le 7 mai, Xi partira en Serbie pour s’entretenir avec le président Aleksandar Vucic, qui s’est dit «fier» d’accueillir le «grand dirigeant et ami chinois» à Belgrade. Xi et Vucic se sont rencontrés pour la dernière fois en 2018, en marge du Forum d’été de Davos organisé dans la municipalité chinoise de Tianjin.
A cette occasion, Xi a qualifié les résultats de la coopération entre les deux pays de « fructueux » liés par « une amitié traditionnelle et une confiance profonde ».
Comme l’a souligné Lin Jian, porte-parole du ministère des Affaires étrangères de Pékin, Xi poursuivra lors de sa visite des échanges accrus et discutera de l’amélioration des relations bilatérales.
La tournée se terminera par une escale en Hongrie, où le président chinois sera reçu entre le 8 et le 10 mai par son homologue Tamás Sulyok et le Premier ministre Viktor Orban.
Sous l’administration de Orban, la Hongrie est devenue un allié fidèle de la Chine en Europe. Le Premier ministre hongrois s’est rendu à Pékin en octobre dernier pour participer au Forum sur l’initiative «la Ceinture et la Route» (BRI), une occasion au cours de laquelle il a tenu à présenter Budapest comme «un ami et un partenaire de confiance» de la Chine.
Le Premier ministre a également pris une position claire à l’égard de la politique de réduction des risques proposée par Von der Leyen à l’égard de Pékin, la qualifiant d’«erreur qui ne sert pas les intérêts de l’Europe». La Hongrie est en effet la principale destination des investissements chinois dans les batteries pour véhicules électriques.
La gigafactory créée par le géant chinois Contemporary Amperex Technology (Catl), avec un investissement de 7,3 milliards d’euros, est en passe de devenir la plus grande d’Europe, avec des répercussions sur ses concurrents locaux.
Avec la Serbie, la Hongrie, elle a également promu avec confiance ses liens avec Pékin dans le cadre du mécanisme de coopération entre la Chine et les pays d’Europe centrale et orientale (CECC), proposé par Pékin pour élargir la portée de la Nouvelle Route de la Soie dans la région.
L’un des projets les plus médiatisés financés dans le cadre de ce mécanisme est le chemin de fer à grande vitesse Belgrade-Budapest, dont la construction a toutefois été bloquée en septembre en raison du non-respect des normes européennes.
La Serbie et la Hongrie sont également alignées sur la Chine en ce qui concerne les liens économiques avec Moscou, que Budapest a refusé à plusieurs reprises de rompre en raison de sa dépendance à l’égard des approvisionnements en pétrole et en gaz russes.
La chaîne de télévision américaine «Bloomberg» considère comme important le choix des pays dans lesquels Xi s’arrêtera, «qui recherchent des investissements de la Chine, malgré une série d’enquêtes lancées par l’UE sur la politique industrielle de Pékin et les avertissements des responsables de Pékin et de Washington concernant les risques».
La référence est aux enquêtes antisubventions lancées ces derniers mois par la Commission européenne contre les fabricants chinois de véhicules électriques, de panneaux solaires, d’éoliennes et les marchés publics de dispositifs médicaux, qui, pour Bruxelles, risquent de nuire aux concurrents et aux chaînes d’approvisionnement européennes.
Xi, poursuit « Bloomberg » dans un éditorial du 29 avril, vise à exploiter les dilemmes et les divisions qui traversent l’Europe, qui peine à s’orienter entre les opportunités et les risques liés aux relations économiques et commerciales avec Pékin : en capitalisant sur ces divisions.
Le président chinois aurait l’intention d’éloigner l’Union européenne des États-Unis et de positionner son pays comme le partenaire indispensable de l’Europe pour l’avenir.
Ce voyage en Europe précède également celui que le président russe Vladimir Poutine effectuera à Pékin ce mois-ci, son premier depuis qu’il a été reconduit à la tête du Kremlin pour un nouveau mandat de six ans en mars dernier.
Dans le message adressé à son homologue à l’occasion de sa réélection, Xi, il a déclaré que la victoire « reflète pleinement le soutien du peuple russe « au président. « Je crois que, sous la direction de Vladimir Poutine, la Russie sera en mesure de réaliser de nouveaux progrès en matière de développement et de construction nationale «, a déclaré M. Xi.
« La Chine – a-t-il ajouté – attache une grande importance au développement des relations bilatérales et est disposée à maintenir une communication étroite avec Moscou pour promouvoir le développement durable, sain, stable et en profondeur du partenariat stratégique global sino-russe dans le nouveau époque, pour le bénéfice de deux pays et de leurs peuples».
R.I/Agences