Abbes Belghit, écoguide au parc national d’El-Kala à la Patrie
« Les flammes ont atteint 15 hectares de forêts de chêne-liège »
Pendant des jours, Abbes Belghit, ancien cadre de la conservation forestière et actuellement guide écologique, arpente le parc national d’El-Kala, partie par partie pour évaluer de potentiels dégâts, causés par les incendies, sur la faune et la flore. Par miracle, cette réserve biosphère, classée patrimoine de l’Unesco en 1990, a été préservée par les flammes. Dans cette interview, il nous fait un point de situation sur ce qu’il a constaté de visu.
Propos recueillis par
Soulef Biskri
La Patrie news : On parle de 10 000 hectares du parc national d’El-Kala ravagés par les feux. Comment évaluez-vous les pertes en matière de biodiversité et est-ce les incendie étaient évitables dans cette région ?
Abbes Belghit : Parler de 10 000 hectares ravagés par les feux est trop exagéré. A vrai dire, les foyers des incendies sont épars. Tout porte à croire que les mises à feu sont préméditées, puisque les incendies se sont déclenchés, partout, à la même heure de l’après-midi de la journée du 17 aout 2022, soit à 15h 30 mn. Les départs de feu ont eu lieu à côté des décharges sauvages et des dépôts de pneus crevés, amassés dans les forêts. Ce qui a accentué la hauteur des flammes.
A ce jour, tout le littoral du parc national d’El-Kala est bien en vert. La faune et la flore du Cap Rosa, aux frontières algéro-tunisiennes sont parfaitement préservées. Aucun incendie dans cette partie du parc.
Les zones intégrales, à l’instar du lac Tonga et sa périphérie, le lac Oubeira et celui de lac Mellah, n’ont pas été touchées. Les feux ont atteint 10 à 15 hectares de forêts, à raison d’environ deux hectares dans chacune des communes de la daïra d’El-Kala. Ce sont des forêts de chêne-liège (des arbres à feuillage persistant, ndlr), qui se régénèrent à la fin du mois d’octobre ou du mois de novembre, en fonction de la pluviométrie.
Est-il possibilité de reconstituer ces parties de forêts incendiées, sachant que le parc a été créé en 1980 ?
En réalité, comme je vous l’ai dit précédemment, la faune n’a pas été affectée vraiment par les incendies. Même les oiseaux avaient quitté leurs nids, à la fin du mois de juillet. Tous les oiseaux nicheurs prennent les oisillons au vol vers les sites naturels humides, à un kilomètre la mer.
Le Parc est classé depuis 1990. Que représente ce parc pour l’environnement et pour l’écosystème ?
Le parc national d’El-Kala représente les poumons des deux pays voisins, l’Algérie et la Tunisie. La faune mammifère ou oiseaux contribuent à la régénération des sites naturels des régions tunisiennes telles que Tabarka, Ain Draham, Jendouba et les grandes forêts et les lacs d’El-Kala au Bougous, El-Aioun et Ramel-Souk. Il en est de même pour les oiseaux marins et les rapaces, qui se trouvent en vie sédentaire dans nos côtes, tels que le Balnuzard-Pêcheur, le faucon pèlerin, tous les faucons d’Eléonore crècerelle, l’aigle royal, l’aigle de Pomarin etc…. Sans oublier que les écosystèmes, protégés des pollutions atmosphériques et terrestres, attirent la faune de toutes les espèces. Ils privilégient la pousse des plantes médicinales (aromatiques, cosmétiques et nutritives. Le parc national d’El-Kala est une planète paradisiaque à préserver absolument.