Amar Takdjout, Secrétaire général de l’UGTA à la Patrie news
« Le dialogue social, incontournable »
Dans cet entretien, le Secrétaire général de la Centrale syndicale évoque les dossiers, qui seront ouverts au débat avec les autorités nationales essentiellement la revalorisation du SNMG et la retraite sans condition d’âge. Amar Takdjout a insisté sur le dialogue social, unique voie de règlement des conflits sociaux et satisfaction des revendications des travailleurs.
Propos recueillis par
Souhila Hammadi-Biskri
La Patrie-news : Le président de la République a approuvé une augmentation de 10 à 15% des pensions et allocations de retraite. Quel serait l’impact sur le pouvoir d’achat des retraités ?
Amar Takdjout : Une augmentation de revenu a toujours un sens. Les retraités l’ont revendiquée. Ces derniers temps, c’est devenu une demande persistante. Personnellement, je pense que cette revalorisation est importante au plan psychologique. Elle permet aussi de soulager des problèmes sociaux.
Il reste à savoir si cette augmentation ne sera pas rattrapée par l’inflation. C’est par le biais de l’économie qu’il sera donc possible d’endiguer l’inflation. Sinon, on se retrouverait dans une véritable spirale. Je m’inscris, à ce titre, dans les grandes décisions du président de la République pour la relance économique.
A présent, il faudrait nous imprégner de cette philosophie économique. Il est insensé et injuste de notre part, nous travailleurs, de ne pas comprendre qu’il faut que nous soyons rentables dans l’entreprise et que nous gagnions la bataille de la productivité pour que nous puissions stabiliser la situation sociale. Il faut que nous dégagions une plus-value de l’économie hors hydrocarbures. Autrement, les augmentations, quelles qu’elles soient, n’aurons pas d’impact réel sur le pouvoir d’achat.
Le président Tebboune adhère à la proposition de l’UGTA portant organisation d’une tripartite. Quels dossiers seront discutés par le gouvernement, le patronat et la centrale syndicale ?
Le président de la République a adhéré au dialogue social. La tripartite est un mécanisme de retrouvailles entre partenaires. Ce qui est important est d’entretenir une culture de dialogue social et d’être réactifs. A chaque fois qu’il y a nécessité d’engager le débat sur une thématique, il faut le faire. La tripartite est le couronnement d’un processus de discussions et d’échanges d’idées. Comme l’a affirmé le président de la République, il ne faut plus organiser des tripartites alibis.
Vous savez, 50% des problèmes peuvent être résolus au niveau des syndicats, par l’échange et l’écoute. Les 50% restants sont posés dans le cadre d’une tripartite. La centrale syndicale est disposée à émettre des propositions, par exemple sur l’entreprise économique, la création d’un Conseil national du travail, le prolongement du congé de maternité des mamans ayant des enfants nés avec une malformation ; le travail à mi-temps au profit des travailleurs atteints de cancers ou de maladies chroniques… Nous avons des pistes de réflexions qui permettront aux uns et aux autres de trouver une ligne de conduite.
Je me réjouis, par ailleurs, de cette journée du 1er mai et de tout ce qui a été dit par le président de la République. Ce qui a été proposé et accepté au plan du principe.
Il est attendu l’ouverture d’un débat sur deux dossiers : la revalorisation du SNMG (Salaire national minimum garanti) et le retour de la retraite sans condition d’âge après 32 ans de cotisation. Qu’en est-il ?
La revalorisation du SNMG est une demande de l’UGTA, car elle remet de l’ordre dans la structure salariale des entreprises. Par ailleurs, le président de la République n’a pas exclu le débat sur la retraite après 32 ans de cotisation, en faisant référence, en demi-teinte, à la pénibilité du travail dans le sud du pays. C’est par ce biais-là effectivement que nous devrions aborder le dossier.
Il faut savoir si beaucoup de salariés veulent partir en retraite avant l’âge légal. Il faut aussi faire une étude sur le phénomène, pour connaître les raisons qui poussent de jeunes travailleurs à vouloir être admis en retraite. Est-ce à cause de l’environnement professionnel ? D’une situation de harcèlement moral ? De pénibilité ? La revendication ne doit pas être populiste, parce qu’il faut financer aussi la Caisse nationale des retraites et préserver un système social fondé sur la solidarité intergénérationnelle.
Le front social est globalement serein. Mais il reste quelques foyers de tension, comme dans l’éducation nationale. Comment les régler ?
L’Education nationale, comme d’autres secteurs, sont en phase de discussions sur les statuts particuliers, qui font grincer des dents. Je reviens au dialogue social, qui dicte la patience. Ce n’est pas possible de poser un problème et d’avoir la réponse le jour même. Les syndicats doivent, en outre, apprendre à présenter des arguments, à même de porter la solution. La force de l’UGTA était puisée dans l’analyse et l’argumentaire. Deux atouts perdus ces dernières années, malheureusement. En interne, il y a une tendance à la communication à sens unique, qui est stérile.
L’UGTA souhaite engager une révision de la loi organique portant exercice syndical. Que faut-il changer ?
Il y a certes des désaccords sur les dispositions de la loi sur le travail et sur le syndicat. Mais ce n’est pas une raison de ne pas s’y conformer. L’application des lois n’est pas synonyme non plus d’inertie. J’ai demandé aux syndicats de réfléchir sur ce qui ne fonctionne pas dans cette loi et qui ne cadre pas avec la réalité syndicale. Ce qui est regrettable, c’est d’aller vite vers la crise et l’impasse parce qu’une loi, dans notre conception philosophique, ne nous convient pas. Si elle n’est pas bonne, il faut militer dans des espaces d’échanges de nos syndicats pour proposer des amendements. Le monde du travail est vaste, diversifié. Il cumule douze millions de travailleurs. Il y a énormément de problèmes. C’est le propre du militantisme syndical.
Vous êtes Secrétaire général de la centrale syndicale depuis quelques mois. Quelle est votre feuille de route ?
Ma feuille de route est à la fois simple et compliquée. L’ensemble des représentations syndicales, (les unions de wilayas, les fédérations, les syndicats d’entreprises…), devront renouveler leurs structures. D’autant que la nouvelle loi limite les mandats des dirigeants à deux. La loi n’est pas à effet rétroactif, mais ledit article, si. Ce n’est pas simple, car nous faisons face à une certaine résistance