« Voter pour le Maroc à la présidence du Conseil des droits de l’homme , c’est l’encourager à poursuivre ses crimes et son occupation illégale du Sahara occidental ». Peu de pays sont dignes de présider le Haut Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Ce sont les Etats membres de l’ONU qui sont les électeurs et qui sont aussi les garants de l’application des Organes de Traité qui régissent le Droit international. D’emblée le Maroc, l’un des deux Etats candidats avec l’Afrique du Sud, est disqualifié pour se présenter à cette fonction en tant qu’Etat colonial qui occupe un autre pays d’Afrique depuis 48 ans. Tous les pays connaissent le colonialisme soit pour avoir été pays colonisateur soit pour avoir été colonisé . En 2024, cela existe encore et le Maroc est coupable depuis 48 ans de tous les crimes trop connus perpétrés par un Etat colonial A ce propos, je vais vous partager mon témoignage de résistante au colonialisme aux côtés du Peuple sahraoui en lutte pour son indépendance. Je suis Claude Mangin-Asfari, l’épouse de Naâma Asfari défenseur sahraoui des droits humains et militant pacifique pour l’indépendance de son pays . Son père aujourdhui décédé a vécu la disparition forcée durant 16 ans dans les bagnes de Hassan II de 1976 à 1991, sa mère est morte jeune des suites de son militantisme et de sa recherche de son mari disparu qu’elle n’a pas revu laissant orphelins 3 enfants en bas âge. Naâma a milité activement pour l’indépendance de son pays à partir de 2005, durant « l’intifada aux pieds nus »qui a culminé en octobre-novembre 2010 avec le Campement pacifique dit de Gdeim Izik qui a duré un mois dans les environs de Layoune la capitale du Sahara occidental et qui a réuni durant un mois plus de 20.000 Sahraouis, hommes, femmes, enfants, vieillards sous plus de 8000 tentes, les Khaimas symboles de la culture sahraouie. C’était le début du Printemps arabe comme l’a qualifié Noâm Chomsky. Ce défi, après 35 ans d’occupation, a surpris le colonisateur trop sûr de lui qui croyait avoir maté ce Peuple et désignait les Sahraouis comme des Marocains-Sahraouis comme on parle de Marocains Rifains, Fassi, Marrakchi etc… La répression a été à la hauteur du défi avec les méthodes trop connues de la violence et de la vengeance coloniale: démantèlement par la force par l’armée marocaine qui assiégeait loin des regards extérieurs depuis un mois le Campement appuyé par toutes les forces de sécurité que compte le Royaume, enlèvement de centaines de Sahraouis femmes et hommes qui ont été torturés dans les sous-sols des casernes et gardés en prison durant plus de 6 mois puis libérés sans autre forme de procès. Parmi eux, 25 militants, responsables d’associations de défense des droits de l’homme, des journalistes sahraouis pacifiques qu’ils aient été présents ou non à Gdeim Izik, ont été enlevés, torturés et transférés en avion à la prison Zaki de Rabat. Naâma Asfari, mon mari depuis 2003, fait partie de ce groupe de 25 prisonniers politiques dit de Gdeim izik . Il a été arrêté dans la ville de Laayoune le 7 novembre 2010, la veille du démantèlement violent du Campement qui a eu lieu le 8 novembre. Il a disparu 5 jours, les 5 jours les plus longs de ma vie, durant lesquels il a été torturé par des agents de la DST. Quand, à son arrivée à Rabat, il a montré son front qui saignait au juge militaire devant lequel il a été présenté le juge a répondu: « Je ne suis pas médecin » une grande humiliation pour Naâma! La Justice aux ordres, on sait que la question sahraouie est dans les mains du Roi et du Ministère de l’intérieur, a organisé deux procès l’un militaire en 2013 et l’autre en Appel au civil en 2017qui se voulaient exemplaires mais qui se sont révélés être des simulacres comme les dizaines d’observateurs présents aux deux procès l’ont écrit et l’ont dénoncé. Les prisonniers eux mêmes et leurs avocats Sahraouis, marocains et français ont montré qu’il n’y a eu aucun flagrant délit, aucune preuve autre que des témoignages obtenus sous la torture ce qui en droit international n’est pas reconnu comme des preuves. Ils ont été condamnés à des peines allant de 20 ans à perpétuité pour des meurtres de membres des forces marocaines qu’ils n’ont pas commis. En février 2014, avec l’ACAT- Association des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture et le Cabinet Ancile de Paris , nous avons porté plainte devant les Tribunaux français et devant le CAT-Comité contre la Torture de l’ONU à Genève. En France, la plainte contre M. Hammouchi le responsable de la DST a provoqué un an de rupture des relations judicaires entre les deux pays. A l’ONU, le CAT a condamné en novembre 2016 pour la 1° fois le Maroc pour fait de torture sur Naâma. Ce qui aurait dû entraîné sa libération immédiate puisqu’il n’y avait plus de preuve. Aujourd’hui, ce sont 5 autres plaintes de membres du groupe de Gdeim Izik qui ont abouti à la condamnation du Maroc et 8 autres sont en cours de traitement. Dans la dernière condamnation, les experts de l’ONU ont écrit que la pratique de la torture par le Maroc est systémique. Donc les 8 plaintes qui concernent la même affaire en cours aboutiront aussi à la condamnation du Maroc. Quel immense travail il faut de la part des prisonniers, de leur famille, des militants des Associations des droits de l’homme, de Solidarité avec le peuple sahraoui, des juristes , des avocats et des experts de l’ONU. Et pourtant, ils sont toujours 19 en prison depuis plus de 13 ans loin de leurs enfants qui grandissent sans eux et loin de leurs parents dont beaucoup sont décédés durant ces 13 ans. Et c’est donc pour le Maroc, candidat à la Présidence du Haut Conseil des Droits de l’Homme, un Etat tortionnaire que des pays voteraient le 10 janvier prochain? Pour un Etat colonial qui torture, emprisonne, assiège les maisons des militants et des familles de prisonniers, pour un Etat qui m’empêche depuis 7 ans d’aller rendre visite à mon mari, qui ne lui donne ni mon courrier ni les livres que je lui envoie, un Etat qui ment dans toutes ses réponses aux lettres que j’écris au Conseil des droits de l’homme pour dénoncer toutes ces représailles que le Maroc n’a pas le droit d’exercer sur la famille comme il est stipulé dans les recommandations du CAT sur l’avis de condamnation . Et je ne parle pas de mon i-phone qui a été surveillé par Pegasus durant 9 mois avec plus de 120 connexions… Cet Etat colonial tortionnaire qui a ratifié toutes les Conventions y compris celle contre la torture ne doit pas présider le Conseil des Droit de l’Homme. Le Maroc doit libérer tous les prisonniers politiques sahraouis en détention arbitraire. Les pays membres de l’ONU doivent obtenir l’indépendance du Sahara occidental le dernier pays colonisé d’Afrique, après le Maroc pourra peut-être présider le Conseil de l’ONU !