Dr Lotfi Benbahmed au micro d’Oxford Business Group :
« L’industrie pharmaceutique peut être un levier de croissance créateur de richesse pour le pays »
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OBG vient ainsi de publier une vidéo d’une interview réalisée avec le ministre algérien de l’industrie pharmaceutique, Lotfi Benbahmed, qui a donné toutes les informations relatives à l’industrie pharmaceutique algérienne qui est qualifiée de très prometteuse et devrait positionner l’Algérie comme un hub régional dans le secteur. OBG estime que notre pays bénéficie d’un emplacement stratégique ‘qui peut permettre au pays d’exporter davantage de produits pharmaceutiques vers l’Afrique subsaharienne en tirant parti de sa capacité de production, de son savoir-faire historique et de la disponibilité de jeunes talents’.
Le choix d’un organisme non-gouvernemental à l’expertise confirmée pour l’Algérie et, particulièrement, pour son industrie pharmaceutique, donnent un aperçu sur la place de choix qu’occupe désormais notre pays dans le concert économique des nations tout en confirmant la vision objective du Président Abdelmadjid Tebboune lorsqu’il a décidé de créer un ministère de l’industrie pharmaceutique. Le sujet abordé par l’analyste qui a interviewé Lotfi Benbahmed est justement celui du ‘Rôle du ministère de l’industrie pharmaceutique algérien dans le développement du secteur’.
L’industrie pharmaceutique, un levier de croissance
Dans ce cadre, Dr Benbahmed affirme que les ‘produits pharmaceutiques ne doivent pas être considérés comme un secteur budgétivore, un fardeau pour les systèmes de santé mais, au contraire, un secteur qui peut être un levier de croissance pour le pays, un richesse, non seulement en créant de la valeur ajoutée par la production et par une politique pharmaceutique affirmée, réelle, avec des objectifs clairs, une politique cohérente à la fois règlementairement et politiquement. Les ingrédients existaient en Algérie pour faire de l’industrie pharmaceutique un secteur pouvant assurer la disponibilité, la qualité et la sécurité des produits pharmaceutiques tout en étant un secteur de croissance pour le pays, créateur de richesse’.
Il continua en rappelant que lorsque le secteur des produits pharmaceutiques était géré par le ministère de la santé, il n’était qu’une direction qui gérait de manière administrative ce secteur alors ‘qu’aujourd’hui, c’est un ministère plein, avec directions centrales et son administration, qui s’occupe non seulement de régulation, mais aussi de veille pharmaceutique, de développement industriel et d’export, de numérisation’, a-t-il précisé.
Plan d’action et loi sanitaire amendée
Un plan d’action pour ce ministère a été adopté par le Conseil des ministres et un amendement de la loi sanitaire a été décidé qui a permis de transférer les prérogatives à partir du ministère de la santé vers celui de l’industrie pharmaceutique pour tout ce qui concerne les produits pharmaceutiques, à tous les niveaux. ‘Nous nous occupons des produits, le ministère de la santé s’occupe des soins, ainsi le circuit du médicament, son enregistrement, son expertise, sa qualité, les essais cliniques, sa production, sa distribution, son importation dépendent exclusivement du ministère de l’industrie pharmaceutique’, explique Dr Benbahmed.
‘L’objectif de ce ministère, c’est de créer un secteur créateur de richesse et c’est surtout de définir une politique pharmaceutique qui soit à la fois cohérente règlementairement et économiquement’, a-t-il aussi déclaré.
Des matières premières 300 fois plus chères dans l’ancien système
Concernant les investisseurs étrangers dans le secteur pharmaceutique en Algérie, Dr Benbahmed rappelle que l’Algérie avait déjà, dans l’ancien système, promu l’investissement étranger qui avait des parts conséquentes du marché du médicament en Algérie. ‘Mais aujourd’hui, notre objectif est de créer une industrie qui apporte de la valeur ajoutée, il ne s’agit pas seulement de faire de l’immobilier industriel par la multiplication des unités industrielles sans avoir une analyse sur la valeur ajoutée qui était créée. Nous avons mis en place une nouvelle règlementation pharmaceutique, comme cela existe dans de nombreux pays dans le monde. Sur la valeur ajoutée, c’est cela qui est important, nous avons mis en place un système qui nous permet de valoriser ce qui est créé en Algérie, parce qu’à un moment donné, il y avait des entreprises implantées en Algérie mais qui nous vendaient leurs matières premières 300 fois plus cher que leurs concurrents, c’est-à-dire que la valeur ajoutée était externalisée vers le pays d’origine et n’était d’aucun apport pour l’Algérie’ a aussi affirmé le ministre de l’industrie pharmaceutique. Il précise aussi que les médicaments produits, même s’ils n’étaient pas vendus et qu’ils étaient périmés, c’était toujours l’Algérie qui était perdante.
A une question relative à la place que va occuper l’Algérie dans le secteur pharmaceutique en tant qu’acteur régional et international, Dr Benbahmed estime que : ‘Nous avons des atouts, en termes de relocalisation des productions qui, à l’heure de la pandémie, étaient réellement ressenties par l’Europe et qui ont pu relocaliser des unités avec l’énergie la moins chère au monde, des ressources humaines très accessibles et très bien formées, nous avons douze universités de pharmacie en Algérie. Nous avons donc une formation académique de haut niveau qui nous a d’ailleurs permis de créer cette industrie et nous avons aussi un marché, le plus grand marché africain, avec plus 4 milliards d’Euros, entre l’importation et la production locale. Avec toutes ses capacités et la mise en place de plateformes numériques, nous sommes ouverts à tout dans ce secteur. En outre, pour le calcul des prix, nous utilisons le taux d’intégration nationale et même l’exportation dépend des taux d’intégration, ce qui fait que nos producteurs locaux ont tendance à développer de plus en plus leur taux d’intégration, taux qui a été intégré dans la règlementation pour le calcul du prix du médicament’.
Les intrants, autre atout de l’industrie pharmaceutique
Le ministre rappelle aussi que l’Algérie possède de réelles capacités de produire localement les intrants, qui sont très nombreux et très importants dans l’industrie pharmaceutique du point de vue économique, et sur lesquels le ministère travaille. Il donne l’exemple des dizaines d’imprimeries qui pouvaient fabriquer les étuis mais que certains producteurs pharmaceutiques importaient, juste par méconnaissance de l’existence de de ces unités : ‘c’est donc tout l’intérêt d’avoir créé ce ministère qui nous donne une vision complète, globale, économique qui met en premier lieu la protection de la santé publique et, pour notre part, nous restons sur la protection de la santé publique, avec cette vision de cohérence économique et de développement du pays’, a ajouté Dr Benbahmed.
Satisfaction à 70% du marché national
Enfin, le ministre met en exergue le fait que l’Algérie possède un tissu industriel pharmaceutique très important aux normes internationales et : ‘nous avons l’ambition légitime d’être un hub local, nous avons des centaines de produits nouveaux qui vont très largement augmenter notre gamme et qui seront mis sur le marché en 2021 et 2022, après un blocage qui était étranglant sous l’ancien système. Ceci nous permettra d’atteindre l’objectif tracé par le programme du président de la république qui consiste à atteindre 70% de satisfaction de nos besoins et nous y arriverons très largement, mais, au-delà de cela, nous serons le seul pays à avoir ses capacités industrielles et, naturellement, notre territoire deviendra trop étroit pour nos industriels et ils se projetteront alors vers l’international. En plus, nous avons des atouts par notre profondeur stratégique, le cout de notre énergie, nos ressources humaines et notre législation qui nous met réellement dans l’innovation, dans l’ouverture’, a-t-il terminé son intervention.
Tahar Mansour