Entretien
Hassana Moulay Eddahi, défenseur des prisonniers politiques sahraouis : « Le Sahara Occidental vit sous état de siège militaire et médiatique ! »
A la lecture de l’entretien qui va suivre, on se rend compte horrifiés, que l’enfer sur terre existe bel et bien. Le Maroc applique dans les territoires occupés sahraouis, à peu de choses près, les mêmes méthodes imposées en Palestine. Celles-ci sont basées sur l’apartheid, l’arbitraire, et une justice aux ordres. Hassana Moulay Eddahi nous décrit par le menu détails cet enfer quotidien. Ce disant, il prend d’incommensurables risques de représailles contre lui et ses proches. Soltana Kheya avait été assignée à résidence pendant deux ans, et fait l’objet des pires sévices qui se puissent concevoir, immédiatement après le premier entretien qu’elle m’avait accordé. Or, il faut témoigner, prendre ces héroïques risques. Car, il faut que le monde sache ce qu’il se passe dans les territoires occupés, interdits à tous, y compris à l’ONU via son représentant Staffan de Mistura. Je souhaite bonne lecture, et demande un max de partages à tous.
Entretien réalisé par Mohamed Abdoun
« Avec Me. Elise Taulet, nous avons été placés sous très étroite surveillance, je dis bien très étroite surveillance. Cela confirme et prouve que des crimes sont bel et bien commis dans les territoires occupés sahraouis ».
« Depuis 2017 les prisonniers politiques sahraouis, à commencer par ceux de Gdeim Izik, sont empêchés de recevoir la moindre visite extérieure ».
« Nous disposons d’une motion qui rappelle que depuis 2017 à ce jour, le nombre des expulsés a atteint 296, venus d’une vingtaine d’Etats et de quatre continents”.
« Les défenseurs des droits de l’Homme activant à l’intérieur des territoires occupés sont directement ciblés. Ils sont placés sous une surveillance constante et étroite ».
« Les éléments de la MINURSO ne lèvent pas le petit doigt face aux dépassements dont nous sommes victimes. A croire qu’ils sont déployés au Sahara Occidental pour y faire du tourisme ! ».
« La vie des défenseurs des droits humains au Sahara Occidental est un enfer quotidien, et de tous les instants. Notre instabilité est chronique sur les plans matériel, physique et familial ».
« La situation des droits de l’Homme est catastrophique dans les territoires occupés. Les atteintes et dépassements y sont légions ».
« Toutes les ONG sont empêchées de se rendre dans les territoires occupés, à l’image d’Amnesty Internationale, Human Rights Watchn Front Line Defender, Reporters Sans Frontières, et tant d’autres. Cet état de siège total est la meilleure preuve des crimes que les forces d’occupation marocaine tentent de cacher aux yeux de la planète entière ».
« L’ensembles des détenus politiques sont visés au sein-même des prisons. Les attaques dont ils font l’objet relève de la puérile et mesquine vengeance ».
« Ce sont des exemples parmi d’autres de ce qu’endurent ces détenus avec leurs proches, alors qu’ils se battent pour une cause noble et juste. Ils tiennent bon malgré tout, jusqu’à la victoire finale ou bien le martyr ».
Nous-nous battons tout le temps pour défendre les causes justes de ces détenus, et pousser la communauté mondiale à redoubler de pression sur le Maroc. Nous en sommes déjà à une dizaine plaintes déposées au niveau de la commission contre la torture relevant des Nations-Unies.
La Patrie News : après plusieurs jours d’attentes, de faux rendez-vous et discussions fictives pour tromper et semer la surveillance des services de renseignements marocains, j’arrive enfin à vous parler, après que vous ayez échappé de justesse à l’arrestation, et empêché d’accompagner l’avocate française Elise Taulet vers les territoires occupés, en votre qualité de membre du bureau exécutif de la LPPS, ligue de protection des prisonniers sahraouis. Tout d’abord, pouvez-vous revenir dans cet entretien sur ce dépassement marocain, ou cette expulsion illégale, qui a choqué la planète entière ?
Hassana Moulay Eddahi : Au nom de Dieu, clément et miséricordieux. Cela n’a en effet pas été une affaire simple de tromper la vigilance des agents qui me surveillent constamment, et d’arriver enfin à m’entretenir avec vous. Je tiens tout d’abord à vous remercier pour l’occasion que vous m’accordez de pouvoir m’exprimer er faire entendre nos vois étouffée via votre honorable média. S’agissant de votre question concernant l’expulsion musclée de l’avocate Elise Taulet des territoires occupés via leur accès nord, de la part des forces d’occupation marocaines, je tien à préciser d’abord que cette visite s’inscrit dans le programme tracé par notre ligue, la LPPS, afin de faire la lumière sur les détenus politiques sahraouis, qui croupissent dans les geôles de l’occupant marocain et de faire en sorte de rappeler que ces conditions sont de plus en plus inhumains et inacceptables la meilleure preuve en est l’empêchement dont a été frappée cette avocate française de rendre visite à ces détenus, ainsi qu’à leurs familles. Me. Elise Taulet a pourtant satisfait à l’ensemble des procédures administratives requises en déposant une demande au niveau du ministère de la Justice, et en rendant visite au procureur du roi officiant au niveau de Knitra. Une demande a également été introduite au niveau de l’administration des prisons marocaine. Chacune des administrations approchées et sollicitée à essayé de fuir ses responsabilités en essayant de jeter la balle à l’autre. Ceci d’une part. De l’autre. Depuis l’entrée de cette avocate sur le territoire marocain via l’aéroport de Casablanca, nous avons été placés sous surveillance étroite de la part des services de renseignements marocains. Entre deux et quatre voitures étaient mobilisées à cet effet, avec quatre, et jusqu’à huit agents à chaque fois. Cette surveillance ostensible était menée H24, et nuit et jour. Avec Me. Elise Taulet, nous avons été placés sous très étroite surveillance, je dis bien très étroite surveillance. Cela confirme et prouve que des crimes sont bel et bien commis dans les territoires occupés sahraouis. Cela prouve aussi que le Maroc tente de cacher ses crimes aux yeux de l’opinion internationale, et spécialement des instances onusiennes en charge du respect des droits de l’Homme. Ces interdits et cette expulsion viennent prouver, si besoin en était encore, que les détenus politiques sahraouis sont privés de visites extérieures, et empêchés d’entretenir le moindre contact avec le monde extérieur. Une preuve supplémentaire en est que depuis 2017 les prisonniers politiques sahraouis, à commencer par ceux de Gdeim Izik, sont empêchés de recevoir la moindre visite extérieure. Tous les avocats, militants des droits de l’Homme, activistes politiques, journalistes et autres, sont systématiquement expulsés, ou empêchés de mettre les pieds dans les territoires occupés. Quant aux activistes sahraouis, ils sont visés intimidés, placés sous surveillance, et empêchés de mener à bien leurs missions légales. Nous disposons d’une motion qui rappelle que depuis 2017 à ce jour, le nombre des expulsés a atteint 296, venus d’une vingtaine d’Etats et de quatre continents. Ce chiffre impressionnant vient rappeler que le Sahara Occidental vit sous état de siège militaire et médiatique.
Quelles sont les conditions de vie des militants sahraouis qui tentent de se battre pacifiquement en faveur de leur indépendance ?
Les défenseurs des droits de l’Homme activant à l’intérieur des territoires occupés sont directement ciblés. Ils sont placés sous une surveillance constante et étroite, 24 heures par jour, et 7 jours par semaine. Ils sont privés de leurs droits légitimes de se déplacer, de se rassembler, de se constituer en associations… bref, ils sont privés de leurs droits les plus basiques et les plus élémentaires qui soient. Il s’agit aussi de l’ensemble des conventions internationales que le Maroc prétend avoir ratifiées, et vouloir respecter. La meilleure preuve de ce que je dis, c’est ce qu’a subi la militante Soltana Kheya. Elle a été assignée à résidence pendant plus de deux ans. Elle et sa sœur ont fait l’objet durant cette longue période de divers types d’agressions, de menaces, d’intimidations et même de tentatives d’assassinat. Nous sommes également empêchés de recevoir des visites de la part des militants et hommes de loi étrangers. Les territoires occupés sont hermétiquement fermés, et interdits à tous visiteurs étrangers. Les militants des droits de l’Homme, ainsi que leurs proches, sont même visés sur le plan psychologique. Ils sont également attaqués sur les plans matériel et économique en se faisant chasser de leurs emplois. Des pressions incommensurables sont également exercées sur les proches des militants des droits de l’Homme. A tout cela, viennent s’ajouter les agressions physiques directes, qui peuvent aller jusqu’aux tentatives d’assassinat. Notamment, lors des manifestations publiques que nous tentons d’organiser régulièrement afin de revendiquer nos droits légitimes. Comme celui à l’indépendance, ainsi que l’autodétermination et l’arrêt du pillage de nos ressources naturelles. Malheureusement, tous ces dépassements se produisent sous le regard de ce qui s’appelle mission e la MINURSO. C’est, je le rappelle, la mission des Nations-Unies pour la tenue d’un référendum d’autodétermination au Sahara Occidental. C’est l’unique mission onusienne au monde qui ne jouit pas des prérogatives de veiller à faire respecter les droits de l’Homme. Les éléments de la MINURSO ne lèvent pas le petit doigt face aux dépassements dont nous sommes victimes. A croire qu’ils sont déployés au Sahara Occidental pour y faire du tourisme ! c’est beaucoup plus délégation en séjour touristique bien plus qu’une véritable mission onusienne, chargée au moins de faire respecter les droits de l’Homme dans les territoires occupés. Bref, la vie des défenseurs des droits humains au Sahara Occidental est un enfer quotidien, et de tous les instants. Notre instabilité est chronique sur les plans matériel, physique et familial. Les visites de nos proches et amis sont étroitement surveillées, et très souvent arbitrairement interdites. En résumé, la situation des droits de l’Homme est catastrophique dans les territoires occupés. Les atteintes et dépassements y sont légions. La communauté internationale ne digne pas exercer un minimum de pression sur les forces d’occupation marocaines afin que celles-ci relâchent leurs répressions, et daignent ouvrir les territoires occupés aux délégations onusiennes, parlementaires, médiatiques et autres. La MINURSO patine et fait du sur-place depuis au moins huit ans. Toutes les ONG sont empêchées de se rendre dans les territoires occupés, à l’image d’Amnesty Internationale, Human Rights Watchn Front Line Defender, Reporters Sans Frontières, et tant d’autres. Cet état de siège total est la meilleure preuve des crimes que les forces d’occupation marocaine tentent de cacher aux yeux de la planète entière.
Et qu’en est-il des conditions de détention des prisonniers politiques que votre ligue défend et représente ?
L’ensembles des détenus politiques sont visés au sein-même des prisons. Les attaques dont ils font l’objet relève de la puérile et mesquine vengeance. Cette vengeance est liée à leurs combats et positions politiques en faveur de l’indépendance et de l’autodétermination du peuple sahraoui. Les détenus sont souvent placés dans des prisons très éloignées des lieux de résidence de leurs familles pour empêcher ces dernières de leur rendre visite. Ces détenus sont souvent privés de leurs rendez-vous médicaux, dont la plupart sont même annulés sans raisons plausibles. Les détenus politiques sahraouis font l’objet de punitions de la part des gardiens. Même les prisonniers marocains de droits communs sont encouragés pour s’en prendre à eux. Ils subissent ces pressions, ces tortures et ces intimiderions pour tenter de les terroriser, et de briser leur volonté et leur détermination. Même les familles et proches des prisonniers politiques sahraouis ne sont pas épargnés. Voilà pourquoi notre ligue s’est fixé pour noble mission, depuis des années, de mettre en lumière les souffrances et tortures qui visent les détenus politiques sahraouis ainsi que leurs proches. La meilleure preuve de cette farouche et monstrueuse répression dont souffrent les détenus politiques sahraouis réside dans les grèves de la faim illimitées que beaucoup d’entre eux entament très régulièrement. L’ensemble de ces données accablantes sont contenues dans notre bulletin d’information annuel, et communiqués urgents que nous diffusions régulièrement. J’ajoute à cela que tous les détenus politiques sahraouis, à commencer par ceux de Gdeim Izik, ont été transférés vers des prisons très éloignées de leurs proches. Les familles voyagent parfois trois ou quatre jour pour leur rendre visite, quand cela leur est encore permis. Certaines n’ont pas vu leurs proches depuis une dizaine d’années pour ces raisons financières, matérielles et de santé. Outre l’exigence de libérer immédiatement et sans conditions ces détenus politiques, notre ligue revendiquent qu’ils soient au moins rapprochés des lieux de résidence de leurs proches, afin de faire cesser cette machiavélique et monstrueuse double peine. Ce sont des exemples parmi d’autres de ce qu’endurent ces détenus avec leurs proches, alors qu’ils se battent pour une cause noble et juste. Ils tiennent bon malgré tout, jusqu’à la victoire finale ou bien le martyr.
Quelles sont les actions concrètes que mène votre ligue pour faire entendre les voix de ces détenus et de leurs proches ?
Nous-nous battons tout le temps pour défendre les causes justes de ces détenus, et pousser la communauté mondiale à redoubler de pression sur le Maroc. Nous en sommes déjà à une dizaine plaintes déposées au niveau de la commission contre la torture relevant des Nations-Unies. Celle-ci à déjà condamné le Maroc pour son occupation et sa torture. Elle a également exigé la libération immédiate et inconditionnelle de ces détenus. En cas de refus de se plier à ces décisions et condamnations onusiennes, le Maroc sera isolé et légalement pris en faute, à cause de son refus d’appliquer des conventions qu’il a signées et ratifiées, mais qu’il refuse d’appliquer sur le terrain. A cela, s’ajoutent les campagnes internationales que notre ligue mène de concert avec plusieurs ONG partout dans le monde. Nos militants, malgré leurs maigres moyens, font tout pour accompagner, soutenir et conseiller les proches de ces détenus politiques. Nous assistons et accompagnons aussi ces derniers dans les procès iniques qu’ils sont forcés de subir. Nous faisons cela malgré nos maigres moyens, et en dépit des menaces et intimidations que nous subissons. Preuve en est que le président de notre ligue, Abderrahmane Zeyou, a été chassé de son emploi. Un autre vice-président, Hassan Dweihi a été déplacé de force. Notre secrétaire général, Mohamed Hali, est empêché d’exercer son métier d’avocat malgré son passage avec succès de l’ensemble des examens.