Mourad Goumiri, économiste, à propos de l’insertion du mandat pour le gouverneur de la Banque d’Algérie : « Une mesure positive »
Entretien réalisé par Yacine Bouali
La Patrie News : La réforme de la loi sur la monnaie et le crédit, annoncée par le premier ministre devant les sénateurs, porte sur l’insertion du principe de mandat pour le gouverneur de la Banque d’Algérie en vue d’assurer une autonomie de la Banque centrale et de réhabiliter le rôle des outils de la politique monétaire dans la réalisation des grands objectifs économiques. Un commentaire?
Pr. Mourad Goumiri : Le pouvoir monétaire, à l’instar de celui législatif et exécutif, n’a de signification que dans la mesure où il permet à la Banque d’Algérie de jouir d’une autonomie relative.
Dans la loi 90-10 relative à la monnaie et au crédit, cette autonomie était inscrite en lettre d’or dans deux articles clés qui donnaient un mandat inamovible de cinq ans, au gouverneur et à son Conseil de la monnaie et du crédit.
Le second article était relatif aux relations entre la Banque d’Algérie et le Trésor public, qui devaient être construites sur des avances limitées à 20% des ressources du Trésor enregistrées l’année antérieure.
Ces deux articles ont été abrogés par le gouvernement de Abdeslam Belaïd, jusqu’au jour d’aujourd’hui!
Que le Premier ministre veuille revenir sur cette abrogation, est positif et entre dans le cadre des réformes économiques et financières que nous attendons depuis vingt ans.
Il s’agit également de l’insertion des principes de gouvernance dans la gestion des banques et des institutions financières. Par quels leviers réussir cette réforme bancaire notamment les banques publiques?
Les banques commerciales publiques ou privées nationales mixtes ou internationales de la place financière algérienne sont régies par le code de commerce et obéissent à la loi 90-10 relative à la monnaie et au crédit. Cette loi indique clairement les conditions de recrutement des cadres dirigeants des banques et des établissements financiers(diplômes, expérience, probité…).
Il faut simplement appliquer la loi et faire en sorte de mettre en œuvre les règlements internes applicables, notamment dans l’octroi des crédits et de mise sur le marché de produits financiers adaptés à la clientèle algérienne. En d’autres termes plus triviaux, interdire les coups de téléphone pour obtenir des crédits!
La révision de ladite loi consacre également l’autorisation des fournisseurs de services de paiement à accéder au système national de paiement en tant qu’ «actionnaire indépendant » pour promouvoir l’économie numérique. Quel sera l’apport de cette mesure ?
Cette mesure fait également partie de la loi 90-10 mais les textes réglementaires ne sont pas encore sortis… trente ans après sa promulgation!
La monétique a pris un retard considérable dans notre pays, en comparaison de nos pays voisins. Il est urgent de s’en préoccuper pour mettre sur le marché des services financiers performants et transparents afin de permettre aux entreprises d’avoir accès à l’économie numérique et de bancariser les Milliards de DA qui se trouvent dans le marché informel ou thésaurisés.
Y.B