« J’ai plus de souvenirs que si j’avais mille ans », a écrit Baudelaire. Pour ma part, je n’en ai peut-être pas autant. Mais, j’ai traversé pas mal de guerres, d’orages, d’hivers et de printemps. Le tout, pour tenir le cap, a été de tenir courageusement le cap, navigant dans un immuable et étroit couloir. Celui de ses principes de base. Bien sûr, en s’efforçant de rester optimiste, de guetter l’éclaircie du fin-fond de la grisaille ambiante. Mais cette fois, et pour une fois, je n’attends rien de bon, ni de mauvais d’ailleurs », du procès intenté contre Israël par l’Afrique du Sud au niveau de la Cour Internationale de Justice (CIJ).
Certes, la stature monumentale de Pretoria la donne gagnante à plate couture. L’avocat Adila Hashim qui mène le dossier de l’Afrique du Sud s’est montrée tellement sûre de son fait qu’elle ne s’est même pas sentie obligée de frapper le défaut de la cuirasse. Le talon d’Achille de Tel-Aviv.
Ses plus de 23.000 martyrs, dont plus de 70 % de femmes et d’enfants sont en effet plus éloquents que tout autre discours. La condamnation est là. Son ombre pesante plane sur la salle du palais de justice de La Haye. Même pas besoin de revenir sur la politique d’apartheid, les maisons détruites, les déportations, les détenus administratifs, la judaïsation d’Al Qods… Aaron Barak, choisi par le bourreau Netanyahu pour défendre l’actuel génocide commis en Palestine, est un néonazi notoire.
A la tête de la Cour, Aharon Barak a toujours avalisé les punitions collectives qu’exerce l’armée en détruisant les maisons des résistants palestiniens. A la tête de la Cour, Aharon Barak a toujours avalisé les assassinats ciblés.
A la tête de la Cour, Aharon Barak a toujours avalisé les détentions massives de suspects sans charges ni limites de temps. Débordé sur les flancs, et se sachant vaincu d’avance, et à plate couture, il s’est noyé, a tenté de noyer le poisson, en s’appesantissant sur la définition du génocide, du crime de guerre et du crime contre l’humanité aux yeux du droit international.
Ce néonazi, complice des bourreaux des civils palestiniens, se sait sur des sables mouvants. Ses attaques hystériques contre le mouvement de résistance Hamas n’ont ému ni convaincu personne. Ses risibles effets de manche non plus. La condamnation ne fait de doute pour personne, même si on garde en tête une part de doute concernant le complexe que continue de nourrir l’Occident vis-à-vis des sionistes à cause de la shoah.
Ce qui fait que toute critique objective et fondée du sionisme, des crimes et de l’apartheid d’Israël passent outrageusement et honteusement pour de l’antisémitisme.
Pas tous égaux devant la justice, ni devant la… mort !
Moyen efficace de censurer, d’imposer silence aux défenseurs de la Palestine, du droit légitime et immuable du peuple palestinien. Alors, si les choses se présentent ainsi sou les meilleurs auspices, pourquoi suis-je donc si pessimiste ?
Deux principales raisons justifient ce qui me fait dire et penser que l’horizon est on ne peut plus sombre, désolant et désolé. « Aujourd’hui, la Cour de justice ne décidera pas si Israël commet un génocide, mais évaluera plutôt si les arguments de l’Afrique du Sud sont suffisamment solides pour émettre des mesures provisoires qui « fourniraient une protection contre d’autres dommages graves et irréparables aux Palestiniens » et « garantiraient les droits d’Israël.
Autrement dit, l’affaire est actuellement dans la phase de mesures provisoires. L’Afrique du Sud exige une « mesure de protection temporaire » pour les Palestiniens de Gaza afin de mettre un terme aux procédures en cours en cas de suspicion de génocide jusqu’à ce qu’une affaire à plus long terme démontrant qu’il s’agit bien d’un génocide soit enfin établie.
En termes plus clairs et plus terre-à-terre, même dans cette urgence absolue, avec des dizaines de morts chaque jour, et plus de deux millions de personnes tentant de survivre dans une sorte d’enfer dantesque, les jeux sémantiques et débats procéduriers risquent de trainer des jours, ou des semaines dans le temps. Quant au verdict final, le jugement peut ne pas être rendu que dans plusieurs années. Peut-être même une décade, estiment de nombreux juristes.
Et dans le meilleur des cas, si une condamnation est prononcée contre Tel-Aviv, celle-ci peut se permettre de ne pas s’y conformer, et de défier le droit international, forte quelle est du soutien complice et protecteur dont elle jouit de la part d’au moins deux membres permanents du conseil de sécurité, Washington et Londres en l’occurrence. Preuve en est les dizaines de résolutions déjà rendues par l’ONU qu’Israël a décidé d’ignorer ostensiblement.
Mon épilogue, amère désolante et désolée, est qu’il ne faut pas se bercer, se berner d’illusions. Le droit international n’est rapide et efficace que quand il s’agit d’appliquer les desiderata de l’Occident. Pas de justice protectrice à espérer pour les arabo-musulmans. Non, nous ne sommes pas tous égaux devant la justice. Non plus devant la mort, d’ailleurs…
Mohamed Abdoun