Dialogue de Berlin sur la transition énergétique 2022 : Le rendez-vous manqué de l’Algérie profite au Maroc
La session 2022 du Dialogue de Berlin sur la transition énergétique, est en cours. Elle revêt, cette année, une importance particulière, eu égard à la crise énergétique induite par la guerre russo-ukrainienne.
Plus que jamais, les pays consommateurs -essentiellement européens- sont déterminés à investir de gros budgets dans les énergies propres pour réduire considérablement leur recours au pétrole et au gaz et par là même s’affranchir de leur dépendance à la Russie et respecter, au-delà l’engagement sur l’énergie neutre à horizon 2050.
Des partenariats juteux sont en perspective avec des pays à grand potentiel en énergies renouvelables, solaire notamment.
La région de l’Afrique, est en mesure de capter, pour ce segment, des capitaux étrangers supérieurs à 50 milliards d’euros. Une opportunité à saisir pour l’Algérie, qui se profile comme une interface incontournable, car elle dispose d’immenses superficies ensoleillées, quasiment toute l’année.
Une étude exploratoire sur le potentiel du Power-to-X (transition vers la production de l’hydrogène vert) de l’Algérie (les résultats ont été déclinés en décembre 2021 lors de la troisième édition de la journée algéro-allemande de l’énergie) ont montré que les « conditions de démarrage sont favorables pour la production d’H2 et ses dérivés en Algérie».
Certaines options sont techniquement et économiquement viables déjà à court et moyen terme.
Le « Low hanging fruits », principe du maximum de réussite avec un minimum d’effort, est envisageable pour le court terme ».
Contre toute attente, l’Algérie ne participe pas à l’évènement cde Berlin, à la hauteur des enjeux de l’heure. Le ministre de la Transition énergétique est présent mais n’a pas pris part au débat dans les différents panels.
Ce qui aurait permis au pays d’avoir une visibilité et de peser dans la balance.
« Les organisateurs auraient été heureux de la participation plus marquée de notre pays, car ils connaissent son potentiel en la matière » souligne un spécialiste algérien des relations algéro-allemandes dans le domaine des énergies.
A contrario, des pays, comme le Maroc, le Nigéria, l’Egypte et les Emirats font le forcing pour s’accaparer des parts importantes de ce marché prometteur. « La ministre de l’Energie du Maroc a fourni des données fausses.
Elle a affirmé que le programme nord est toujours en cours, alors que les bailleurs de fonds européens ont suspendu son financement. Elle a sous-entendu aussi que le gazoduc qui passe par le Maroc (fermé par l’Algérie depuis plusieurs mois, ndlr) pourrait servir de canal pour l’hydrogène vert. Elle fait de la propagande pour avoir un maximum de financement » a soutenu notre interlocuteur, participant à la rencontre en sa qualité d’expert.
De son point de vue, les autorités algériennes compétentes doivent se ressaisir rapidement et prendre en main ce dossier stratégique pour le pays. « Le sort de l’Algérie n’est pas scellé car les investisseurs ont besoin de nous. Il faut qu’on soit actifs et rapide dans la prise de décision, sinon, ils mettront en exécution le plan B, c’est-à-dire se tourner vers l’Amérique du sud, le Chili en premier lieu ».
Pour cet expert, il est primordial de doter l’Entreprise de production et de distribution des énergies renouvelables Chams, de moyens et prérogatives analogues à ceux du groupe pétrolier Sonatrach.
Il conviendrait de la mettre entièrement sous tutelle du ministère de la transition énergétique.
« Ca sera un signal fort pour l’extérieur » explique-t-il, en rappelant qu’il n’y aura plus de financement extérieur pour la prospection et la production du pétrole et du gaz à partir de 2025.
« Des participants à la rencontre de Berlin ont plaidé pour suspendre immédiatement ce financement » affirme-t-il.
Pour lui, le déplacement d’une délégation d’experts allemands en Algérie, prévu au mois de mai prochain, est une occasion à saisir pour rattraper le rendez-vous manqué de la BETD 2022 de Berlin.
A la clé de cette visite : un financement allemand d’une valeur de 35 millions d’euros pour la construction d’une usine d’hydrogène vert.
S.Biskri