Entretien/ Souhil Meddah, expert financier : «veiller sur l’assainissement des actifs des banques ciblées par l’ouverture du capital »
Entretien réalisé par Mohamed Ait S
Le président Tebboune a affirmé que la création, l’organisation et la gestion des zones industrielles doivent répondre à une nouvelle vision qui attire les investissements, y compris les investissements privés. Comment ?
Les traitements quasi-administratifs des dossiers pour le foncier, ont occasionné des tares à la fois opérationnelles, pratiques et organisationnelles, notamment par rapport aux incompatibilités des sites attribués moins conformes à la nature technique des projets inscrits, ou sur la situation réelle de chaque promoteur par rapport à la taille du projet qu’il propose.
D’autre part, vis-à-vis des conditions d’aménagement post-attribution, de conditionnement ou d’alimentation énergétique et autres aménagements.
Additivement aux contraintes évoquées, les investisseurs sont également heurtés aux actions de contrôle par les services de l’administration locale pour constater et évaluer les états d’avancement des étapes des projets considérés préalablement comme éligibles aux conditions d’investissement et d’attribution du foncier.
L’efficience escomptée dans le domaine d’une nouvelle gestion pragmatique et dynamique doit prendre en charge au moins cinq critères importants.
Lesquels ?
D’abord, de considérer la situation financière actuelle ou future disponible du promoteur du projet, qui de facto doit associer avec lui des banques ou institutions financières dans des notifications d’engagement qui répondent aux critères des business plans soigneusement élaborés et adoptés par toutes les parties. Sans cette condition, le promoteur se verra ajourner sa demande afin de lui éviter de tomber dans des impasses structurelles et financières très coûteuses pour lui et pour les collectivités locales.
Deuxièmement, une diversification dans les activités insérées dans les zones industrielles. Car hormis les unités de production, de transport et autres plateformes, les zones industrielles auront besoin de sociétés de gestion, de catering ou de traiteurs et d’hébergement de proximité.
Troisièmement, assurer une organisation en amont de la parcellisation des assiettes foncières, selon les demandes potentiellement programmées et destinées aux industries diversifiées selon les critères techniques qui leur incombent
Quatrièmement, impliquer le guichet unique en tant que coordinateur pratique et opérationnel dans le suivi des projets d’investissement dans la centralisation des processus avec les lignes procédurales multisectorielles.
Le cadre juridique doit s’adapter de façon pragmatique avec des textes et des directives qui facilitent l’acte d’investir, son développement et son ouverture vers des formes nouvelles de financement et d’organisation interne de gestion.
Cependant, il est important de rappeler que la cadre juridique doit veiller à une moindre incorporation de l’interprétation judiciaire litigieuse probable à chaque fois qu’un acte de gestion ou de développement de la forme de l’investissement est engagé.
À titre d’exemple, les sociétés qui bénéficient des avantages du foncier industriel ne peuvent pas modifier leur forme juridique une fois que l’arrêté de concession est établi.
Ce qui bloque définitivement les opportunités de partenariat ou d’ouverture de capital de ces sociétés en scellant leur vision future.
Le Président a également affirmé que l’objectif de la numérisation n’est pas seulement de moderniser les transactions administratives, mais relève de la sécurité nationale et vise à servir le citoyen. Comment réussir cette transition numérique ?
La question de numérisation est relative au besoin d’une consolidation à la fois structurelle et multisectorielle qui doit permettre aux différents intervenants le traitement d’une même information fiable et confirmée dans une base de données commune.
A ce titre, il est question de coordonner plusieurs interfaces, notamment celles des douanes pour les transactions courantes depuis l’extérieur et leur flux à l’échelle locale.
Et par rapport aux données fiscales pour les besoins de détermination des revenus bruts et nets des personnes et du montage de l’échelle des revenus et des ressources pour les agents économiques de différentes couches. Plus précisément, ça doit servir la base de détermination de la tranche de la population qui sera soumise à l’impôt sur la fortune
Il s’agit aussi d’un noyau utile qui permettra le traitement et la modélisation des données statistiques pour une anticipation prospective maîtrisable, tout en permettant au différents centre de décisionnels de statuer sur les orientations strictes et rapides face aux futurs évènements probables
L’autre recommandation du Chef de l’Etat a trait à l’accélération du processus d’ouverture du capital des banques publiques suivant une méthode scientifique et savamment étudiée qui encourage le changement de l’ancien mode de gouvernance. Quel apport pour la réforme bancaire ?
Il faut rappeler qu’il s’agit de deux banques qui totalisèrent plus de 80 milliards de dinars de capital nominal, sachant aussi que dans une ouverture, il faut compter sur un prix d’émission qui est probablement plus élevé que sa valeur nominale.
Si on tient compte du fait que chaque banque doit ouvrir sur le marché primaire du compartiment principal un minimum 20% de son capital avec un prix d’émission équivalent trois fois le prix nominal, ça donnera un capital flottant moyen de 60 à 70 milliards de dinars, ce qui peut dépasser sensiblement le niveau moyen habituel de 6 à 10 milliard de dinars entre investisseurs privés et institutionnels.
Ainsi, devant le cas présent il nous reste deux hypothèses. La première est de déroger à la règlementation et d’accorder un taux d’ouverture inférieur à 20% pour le marché principal et de descendre à plus ou moins 5%, sachant qu’avec un plan business qui ne prévoit aucune autre extension, le RST (revenu sur titre)dans ce cas de figure sera naturellement revu à la baisse vu que la valeur marchande du titre sera plus élevée que sa valeur nominale initiale.
Cependant la valeur de l’action peut sensiblement et graduellement augmenter pour offrir plus d’intéressement sur les plus-values marché secondaire, contre des revenus en dividendes quasiment limités.
La deuxième hypothèse c’est de procéder à la filialisation des quelques activités bancaires susceptibles s’ouvrir sur le marché boursier avec des taux régulièrement limités, qui permettent la dotation de plusieurs placements croisés et multiplicateurs, qui assurent des placements respectifs ou simultanées avec la reproduction de la masse financière contre un cumul tares important de l’ensemble des valeurs transigées.
D’autre part, il est très important de veiller sur l’assainissement des actifs des banques ciblées, avec l’ouverture d’une nouvelle institution financière qui peut jouer le rôle du compensateur chargé d’absorber les valeurs irrécouvrables issues des décisions publiques et politiques des anciens programmes de restructuration ou de mise à niveau des Entreprises Publiques Économiques.
M. Ait. S