Scandale Pegasus : Ali Lmrabet enfonce Mohamed VI
Dans un article bien documenté et truffé de révélations, le journaliste et ancien diplomate Ali Lmrabet, finit d’enfoncer le roi marocain Mohamed VI dans le scandale planétaire lié au logiciel espion Pegasus.
Devenu blogueur et journaliste d’investigation, Ali Lmrabet nous livre dans un article paru sur Midle East Eye», un concentré de ce qu’il faut retenir de ce scandale qui continue de défrayer la chronique.
« Que dit l’affaire Pegasus ? D’abord, qu’il est impossible pour la DST marocaine d’avoir agi sans l’aval du roi. Ensuite, que tous les secrets détenus par le Maroc le sont aussi par Israël. Enfin, que la crise avec l’Algérie va s’aggraver ».
De quoi donner froid dans le dos. Et se dire aussi que le caractère belliqueux et expansionniste de Rabat n’est pas prêt de s’estomper.
« La meilleure défense, dit-on, c’est l’attaque. Le régime marocain tente ces derniers jours de se dédouaner de l’immense scandale Pegasus qui secoue sa police politique, la Direction générale de la sécurité du territoire, plus connue sous l’acronyme DST, et son puissant patron, Abdellatif Hammouchi, en sortant les griffes et en rameutant la meute habituelle ».
Ce faisant, Rabat peut compter sur un nombre important de relais et de porte-voix soit corrompus, soit contraints d’agir sous menace et le chantage, comme l’a bien montré l’affaire de l’hôtel de luxe Mamounia, sur lequel nous comptons également revenir avec une importante note de lecture.
« Et contrattaque en déposant plainte pour diffamation en France contre Forbidden Stories et Amnesty International, les ONG à l’origine de ces révélations, ainsi que contre
Le Monde, Mediapart et Radio France, qui ont donné une large couverture à cette affaire. Cette méthode du chantage et de l’intimidation est commune chez les dirigeants marocains.
L’avocat du militant sahraoui Naama Asfari, Joseph Breham, lui-même victime de Pegasus, évoque ce modus operandi dans l’entretien accordé récemment à La Patrie News.
« Depuis l’affaire Zakaria Moumni, cet ex-champion du monde de boxe thaïe qui, en accusant publiquement le secrétaire particulier du roi, Mohamed Mounir Majidi, et le patron de la DST, Abdellatif Hammouchi, de « tortures », avait été poursuivi en diffamation par l’État marocain, la Cour de cassation française a statué qu’« un État étranger ne peut saisir la justice française».
À moins que les plaintes n’aient été déposées au nom d’« institutions » marocaines, la DST par exemple ou le ministère de l’Intérieur, l’État ne faisant que relayer ».
En attendant de voir plus clair dans cette ténébreuses affaire, l’auteur dégage une série de déductions toutes plus importantes les unes que les autres.
« Premièrement, contrairement à une idée en vogue dans certains cercles hexagonaux pro-régime marocain, il est impossible que le puissant patron de la DST, Abdellatif Hammouchi, ait décidé tout seul de mettre sur écoute le gouvernement français, des généraux marocains et des membres de la famille royale sans le feu vert du palais royal. C’est impossible ».
Mohamed VI, tout puissant roi du Maroc, est enfoncé jusqu’au cou dans ce scandale énorme. Très simple, la démonstration de Lmrabet dit ceci : « Espionner des journalistes, du Maroc ou de l’étranger, des activistes des droits de l’homme, des politiciens marocains et même de hauts responsables algériens ne nécessite aucun acquiescement du souverain alaouite. Mais tenter de s’introduire dans le portable du président de la République française, Emmanuel Macron, et dans ceux de son Premier ministre et d’une quinzaine de membres de son gouvernement – surtout qu’il s’agit en l’occurrence de solides alliés du régime alaouite –, ne peut être l’œuvre du seul Hammouchi ». CQFD.
Enfantine et imparable à la fois, cette démonstration place le souverain marocain dans l’œil du cyclone.
Le fait assoir aussi dans le banc des accusés, lui qui s’empresse d’en appeler à la justice, d’intimider « ou alors, c’est de la déraison pure, de la folie des grandeurs de la part d’un homme qui, il est vrai, se considère au-dessus de toutes les lois, au Maroc comme à l’étranger ».
Ici, Lmrabet verse dans la pure ironie. Il se gausse de la tête penaude de ce roitelet franchement pathétique.
« Il faut savoir que Hammouchi n’est pas de ceux qui oseraient se hausser du col. Il est d’origine modeste, des environs de Taza, rude région montagnarde située entre les cimes du Rif et celles du Moyen Atlas ».
La Patrie News a réservé de nombreux articles de fond à ce barbouze sorti brusquement de l’ombre de la manière la plus humiliante qui soit. « Étudiant dans les années 1990, il est passé directement de l’université à la DST. Ce qui suppose deux choses : ou bien il collaborait déjà avec la police de Driss Basri quand il occupait les bancs de sa faculté de droit de Fès ou bien le métier de flic politique était une vocation dès sa prime enfance. En résumé, Hammouchi, qui détient ses abusifs pouvoirs directement de son seigneur et maître le roi du Maroc, lequel, à travers l’un de ses conseillers, Fouad Ali El Himma, garde le contrôle absolu sur les services secrets, n’a pas l’ambition politique qui en ferait un électron libre. Afin de dédouaner le palais royal et même le régime de ce vaste réseau d’espionnage, certains ont sauté sur le fait que l’un des téléphones du roi Mohammed VI avait été sélectionné par les services secrets marocains pour une éventuelle mise sur écoute ».
Dès l’éclatement de ce scandale, nous avions exploré la possibilité selon laquelle Hammouci pourrait être sacrifié pour épargner le palais. Mais, il semble la relation qui lie ce dernier au roi soit « spéciale » et « particulières ».
La question qui se pose dès lors, posant la main dans ce panier de crabes, est celle de tenter de savoir qui fait chanter qui….Wana aâreft…
Ali Oussi